Sorti en 2011 sur NDS (et iOS), Ghost Trick est un jeu culte créé par Shu Takumi, le papa de la série Ace Attorney dont on reconnaît immédiatement le style et l’humour. Malgré ses qualités, le jeu n’a cependant pas eu le succès qu’il méritait ni atteint le degré de notoriété des jeux du célèbre avocat de Capcom. Son retour sur Nintendo Switch en Haute définition lui donne une seconde chance, ce qui est totalement raccord avec l’histoire du jeu.
La mort lui va si bien
Ghost Trick est un jeu d‘enquête un peu particulier puisque son héros, Sissel, meurt avant même que ne débute l’aventure ! En effet, tout commence lorsque Sissel, un jeune homme au look impeccable avec des lunettes de soleil très nineties sur le nez et et une improbable coupe de cheveux, se réveille après une longue et étrange « perte de connaissance ». Auprès de lui, une jeune fille, Lynne, qu’il ne connaît pas et un mystérieux homme en noir qui la tient en joue. Sissel doit agir vite pour éviter à la jeune femme une mort certaine. Seul problème : il est affalé sur le sol dans une position pour le moins gênante et, surtout, il est mort. Il a été assassiné. Par qui ? L’homme en noir ? Il n’en sait rien. Ses souvenirs sont confus... Une chose est sûre : il n’est plus de ce monde. Il est désormais un fantôme.
Cependant, tout n’est pas perdu. Une lampe de bureau nommée Ray (!) lui explique qu’il a une nuit pour résoudre le mystère de sa mort. En outre, il peut encore agir et même empêcher la jeune femme de subir le même sort que lui. Pour cela, en tant que fantôme il peut basculer du monde réel au monde des fantômes et déplacer son âme d’objet en objet, à condition qu’ils soient suffisamment proches les uns des autres, pour en prendre possession.
Il peut ainsi allumer une lampe pour attirer l’attention, actionner un levier pour mettre en marche une machine ou encore ouvrir une porte, déplacer un chariot, etc… Grâce à ce pouvoir, nommé "Tour de fantôme", Sissel prend alors possession d’une barrière qui se trouve près de son cadavre. De retour dans le monde réel, il l’actionne, ce qui surprend l’homme en noir et permet à la jeune fille de s’échapper… Sissel vient de lui sauver la vie… Seulement, la victoire est de courte durée car l’homme en noir rattrape Lynne et finalement, lui tire dessus, et la tue. Mais, pas de panique, dans Ghost Trick, la mort n’est pas une fin et en tant que fantôme, Sissel dispose d’un pouvoir bien pratique. Il peut remonter dans le temps de 4 minutes pour changer le cours des choses. A charge pour lui de bien comprendre l’enchaînement des événements qui ont conduit à la mort tragique de la jeune femme et de trouver les bons objets à posséder au bon moment pour modifier son destin.
Mort et remords
Ghost Trick est un jeu très original dont l'intérêt réside autant dans ses puzzles malins que dans son intrigue délirante truffée de situations abracadabrantesques et de personnages hauts en couleurs. Le jeu commence fort avec une entrée en matière percutante et insolite, à l’image du jeu basé sur la réflexion mais aussi, beaucoup sur la narration. On n'est pas loin d'un visual novel et autant prévenir que si vous n'aimez pas lire, ce jeu n'est pas pour vous. Il est certes possible de faire défiler (grâce à une option) les dialogues pour les plus pressés mais l'écriture du jeu et tellement excellente et les gags, parfois, tellement énormes, qu'il serait dommage de passer à côté. Shu Takumi a un vrai talent pour créer des situations farfelues et croquer des personnages non conventionnels, délirants mais toujours humains et attachants. Si vous êtes fan des jeux Ace Attorney, vous ne serez pas dépaysé par Ghost Trick puisque le jeu en reprend énormément d’éléments que ce soit dans le style, la musique et même les bruitages. D’ailleurs, le jeu pourrait presque être considéré comme un spin-off des Phoenix Wright et un cross-over pourrait facilement être imaginé tant les univers partagent les mêmes codes, le même genre de personnages et le même style graphique.
Ghost Trick: Ace Attorney
Ghost Trick est donc, comme les jeux Ace Attorney, un titre bavard. L’intrigue est très présente, et si le joueur a parfois le choix des embranchements, en réalité, il doit suivre un cheminement précis. Certes, le joueur peut rapidement se déplacer dans différents endroits mais en réalité, il n’y a toujours qu’un chemin à suivre. Sissel peut se rendre dans de nombreux endroits mais si ce n’est pas encore le bon moment, il ne pourra pas y faire grand-chose. Tout juste pourra-t-il assister à une petite séquence amusante. Et c’est la même chose au niveau du gameplay. Sissel doit sauver la vie de différentes personnes en réalisant des actions précises en suivant un tempo incontournable. Il n’y a pas plusieurs façons de se sortir des situations créées. Il faut trouver le bon agencement et réagir au bon moment.
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Généralement, le jeu nous demande, en tant que fantôme, d’épier les conversations des vivants et de récolter des indices et, surtout, des numéros de téléphone sachant que chaque nouveau numéro de téléphone, débloque un nouvel environnement. Il suffit ensuite à Sissel de prendre possession d ‘un téléphone pour choisir la ligne à suivre et l’endroit où se rendre.
Evidemment les gros puzzles du jeu concernent les meurtres. Lorsqu’un meurtre est commis, le joueur est invité à regarder la séquence qui a conduit à l’homicide pour bien décomposer chaque événement et comprendre quel objet clé va pouvoir modifier le cours des choses sachant que c'est le principe des dominos en cascade... Ensuite, Sissel remonte le temps de quatre minutes, et la scène recommence en « temps réel ». Sissel (et le joueur) a alors quatre minutes pour changer l’issue fatale.
Un jeu d'art et d'essai... Encore
La difficulté réside dans le fait que l’âme de Sissel ne peut se déplacer que dans certains objets (ceux qui disposent d’un noyau) et à condition qu’ils soient proches de son âme. Généralement, l'âme de Sissel débarque dans un nouvel environnement via le téléphone. On commence donc de là. En passant dans le monde des fantômes, on avise les objets possédant un noyau et on voit même ce que chaque objet peut faire une fois possédé grâce à un petit message (comme un chariot qui peut se déplacer, une porte qui peut s’ouvrir, une boîte à musique qui peut jouer de la musique, un ventilateur qui peut se mettre en marche, etc.) Parfois, il n’y a qu’un objet à côté du téléphone. Il faut en prendre possession et trouver un moyen d’atteindre les autres objets plus éloignés. Il suffit parfois tout simplement d'attendre qu'il se passe quelque chose... Les puzzles ne sont pas toujours évidents mais il n’y a rien d’insurmontable. Il faut bien regarder la séquence et actionner le bon objet au bon moment (par exemple lorsqu’un personnage passe à côté). Le stress monte vite (bien aidé par la bande-son) car les secondes s’égrènent et on sait le sort qui attend la victime à la fin des quatre minutes si on n'arrive pas à modifier son destin.
Il y a souvent de la tension et c‘est très souvent à la dernière seconde que l’on évite le pire. De toute façon, malgré cette tension, le jeu n’est pas punitif. On peut se tromper, et remonter dans le temps (au dernier changement de destin ou au début des quatre minutes) pour recommencer autant de fois qu’on le souhaite. Il ne sera pas rare de ne pas pouvoir éviter le crime lors de sa première tentative. Il faudra donc recommencer- et pas qu'une fois... Notez que le jeu n'est pas très long. Il y a 18 chapitres. Cependant la durée du jeu dépendra de vous et de vos petites cellules grises. Comptez plus ou moins quinze heures pour en voir le bout et découvrir le fin mot de cette étrange et délirante histoire. Par contre, il n'y a pas de rejouabilité (à moins de vouloir refaire le jeu !)
Une version HD réussie
Pour cette nouvelle version, Capcom a refait les graphismes mais sans vraiment changer le jeu : c'est le même. Les personnages qui étaient pixélisés auparavant (et qui avaient, et ont encore aujourd'hui, un charme fou) sont désormais tout lisses mais leur look et leur personnalité restent heureusement les mêmes. Leurs animations n'ont pas vraiment changé mais, à dire vrai, elles étaient déjà excellentes. On retrouve sinon toujours les personnages version manga lors des phases de dialogues (un peu comme dans les Ace Attorney). C'est toujours un réel plaisir de voir le commissaire se déplacer ou les policiers improviser un pas de danse.. Le résultat est très convaincant. Il faut noter que le format d'origine du jeu en 4:3 est respecté. L'image est donc encadrée par deux bandes personnalisables. C'est un choix qui pourra déplaire mais qui au moins ne dénature pas l'œuvre originale. Les excellentes musiques du jeu ont été réarrangées avec subtilité mis on note que de nouvelles compositions ont été ajoutées (sachant que l'on choisir dans les options, le score original). Il n'y a sinon aucune nouveauté si ce n'est qu'on retrouve les ajouts présents sur la version iOS et une galerie inédite;
Du côté du gameplay, le jeu se joue désormais avec les boutons et le stick. On passe du monde réel au monde des fantômes (et vice versa) en appuyant sur le bouton L). Quant à la possession d'objets, on passe d'un noyau à l'autre, en orientant le stick droit dans la bonne direction. Pour rappel, le jeu sur DS se jouait dans ces moments-là au stylet. Sur Nintendo Switch, en mode portable, on peut utiliser l'écran tactile pour se déplacer d'objet en objet. A l'arrivée, il n'y a pas de souci de maniabilité et tout se fait très naturellement, une fois qu'on a compris le principe. Le jeu est disponible uniquement en téléchargement sur l'eShop au prix de 29,99€. Une démo permettant de faire le premier chapitre du jeu (avec sauvegarde transférable dans le jeu final) est disponible gratuitement.
