Dear me, I was est un jeu sorti le 31 juillet 2025 en exclusivité sur Nintendo Switch 2. Développé et édité par Arc System Works, détenteur de grosses licences bien dynamiques, l'éditeur laisse cette fois-ci l’empreinte artistique à Taisuke Kanazaki, l’homme derrière Hôtel Dusk, Another Code, ou Last Window, pour proposer une expérience unique, une parenthèse dans un genre de roman visuel à laisser défiler. Loin des enquêtes ou des énigmes desdits jeux de son tableau, nous allons être entraînés dans une histoire de vie, dans toute sa sensibilité.
Test réalisé à partir d'une version fournie par l'éditeur.
Une histoire sur soi-même
Nous allons suivre les souvenirs d’une femme depuis les évènements de sa plus tendre enfance jusqu’à sa période de forte expérience, en passant par son adolescence et sa phase adulte. À travers ses relations familiales, amicales et amoureuses, nous allons donc être portés le long de son histoire, en découvrant ses choix, ses doutes et ses émotions. Tout un panel d'événements qui vont définir l’identité de cette femme, reconnaissable par un grain de beauté localisé sous son œil gauche, mais dont nous ignorions tout en début de jeu. L’histoire s'enchaîne à travers une dizaine de chapitres reprenant les moments charnières de sa vie. Nous sommes spectateurs d’une introspection inspirante et imagée de la vie, pleine d'émotions et de sensibilité. Les événements vécus nous permettent de nous identifier à l'histoire, au personnage ou aux situations. Néanmoins, les ellipses sont plutôt larges, avec des chapitres plutôt courts.
Nous aurions apprécié pouvoir découvrir d’autres moments de vie supplémentaires de notre personnage, surtout quand on ne comprend pas forcément certaines de ses réactions. Cela nous laisse face à l’impression que tout est allé trop vite. Même si, quand on y pense, cela rappelle la métaphore même de la vie et surtout des souvenirs que l’on retient, qui reprennent des épisodes clés, parfois brefs ou plutôt vagues, sur des évènements qui nous ont marqué. Ce jeu a pour spécificité d’être animé sans aucun dialogue, seulement à travers des images et une bande son propice à la transmission des émotions. C'est une expérience éphémère, dont l'histoire et la progression sont linéaires. Elle se suit comme le fil de la vie entre les souvenirs, les relations sociales et les épreuves personnelles, dans un déroulement nostalgique et empreint d'humanité. L'histoire de notre protagoniste nous démontre que les choix personnels ne permettent pas toujours de revenir en arrière, mais que la vie nous réserve parfois de belles surprises après les épreuves traversées.
Spectateur des évènements
Dear me, I was est un jeu narratif, donnant sur une expérience contemplative ponctuée par quelques interactions en lien avec les situations. Ces interactions sont limitées à quelques actions, comme celle de toucher la nourriture pour manger un repas dont le régime sera amené à évoluer au fil du temps. Nous pouvons également déplacer des éléments d’un endroit à l’autre, interagir avec certains détails environnementaux ou griffonner dans un cahier pour y faire apparaître les dessins de notre protagoniste. Il faut savoir qu’en dehors d’une seule exception, le joueur n'a aucune influence sur le court de l'histoire. Nous sommes laissé sur quelques actions de gameplay, mais dont les possibilités sont réduites car très dirigistes, voire frustrantes à certains moments. L’exemple le plus flagrant est l'interaction permettant de découvrir les illustrations que notre personnage dessine sur un cahier.
Le dessin se complète tout seul avant que le joueur n'ait pu finir son action, puis enchaîne sur la suite de l'aventure. Le jeu met en ce sens davantage l’accent sur le déroulement de l’histoire, dont les interactions sont un léger ajout destiné à renforcer la narration, même si la participation du joueur reste anecdotique. Le joueur est donc un spectateur passif de l’histoire qui se déroule d'elle-même, dont l'activité sera limitée à des actions simples et déjà prédéterminées. L'expérience de découverte des événements, de l'histoire et des émotions transmises prend le pas sur le jeu vidéo.
Dear me, I was va assumer sa simplicité et sortir des sentiers bien connus du genre, en choisissant de nous proposer davantage de suivre un court film d'animation interactif, et sortir des codes conventionnels d'un jeu vidéo.
Des émotions intenses
D’une durée de trois quart d’heure, c’est une expérience très condensée mais intense dans l’émotion qu’elle veut nous apporter, en résonance avec nos expériences personnelles. Les animations sont travaillées avec la technique de rotoscopie, qui est une méthode où les scènes du jeu sont dessinées image par image par dessus des séquences filmées afin d’ajouter de la sensibilité, de la vie et du réalisme dans les mouvements et les émotions des images présentées. Cette méthode demande un travail colossal, c'est donc les moments forts et éloquents qui sont montrés à l'écran. Les actions sont limitées à l’essentiel et les scènes sont présentées de manière brève avant de passer à la suivante. Les illustrations sont dessinées à la main, et à travers le savoir-faire maîtrisé des développeurs, les expressions et les émotions des personnages sont très bien réalisées. Les différents visuels aux couleurs pastels sont poétiques, et les scènes animées possèdent un style visuel doux grâce à l’aquarelle. On y remarquera également de nombreux jeux de couleur en fonction des moments de vie perçues par notre personnage.
L’association des couleurs varie du plus terne au plus chaleureux selon les personnages, les situations et l’émotion qui en ressortent. Un effet de nostalgie est ressenti tout au long de l’expérience, et renforcé dans ce sens par la bande son, dont les musiques sont sublimées par les sonorités du piano ou du violon. La bande son s'enchaîne de manière naturelle et fluide entre les différentes scènes, tout en restant en cohérence avec les situations et les émotions vécues. Pour parfaire cet effet de nostalgie, l'histoire de notre personnage est mise en scène à travers un cadre délimité aux formes rondes, ce qui ajoute davantage l'effet d’un souvenir qui défile. La présence de contours épais autour des personnages et de certains éléments permettent de se focaliser sur ce qui semble avoir de l'importance pour notre protagoniste. Enfin, nous remarquons un thème central en rapport avec le dessin et les illustrations, que cela soit dans la façon de présenter le jeu ou dans la vie de notre personnage. L'histoire de notre protagoniste est imagée à travers son talent, qui devient dans ce jeu son mode de communication direct avec le joueur.