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Entretien avec les développeurs d'A Musical Story, les Français de chez Glee-Cheese : Du développement du jeu à sa sortie en passant par l'avenir du studio

Par babidu - Le 26/03/2022 à 07:00

Après la sortie d'A Musical Story sur Nintendo Switch puis son test dans lequel le titre obtint la jolie note de 9/10 (cliquez ici pour lire le test), nous avons proposé une interview aux développeurs de chez Glee-Cheese. Les 4 membres du studio, Alexandre, Charles, Maxime et Valentin ont accepté de répondre à nos questions, nous les en remercions. 

Partie I : La création du studio

Charles : « Avec Valentin nous nous connaissons depuis que nous sommes adolescents, on a grandi dans un petit village dans l'Allier. Nous avions un groupe de musique ensemble il y a 20 ans et depuis nous ne nous sommes jamais lâché. Nous avons vécu en colocation à l'époque After Bit, nous avions commencé l'émission pour parler de jeu vidéo de manière différente, en analysant la musique des jeux. Nesblog, à qui nous avions parlé du concept, sont allés directement démarcher jeuxvideo.com et l'émission a duré quelques années. Pour moi l'arrière-pensée derrière l'émission était qu'After Bit nous serve de tremplin pour nos carrières dans le jeu vidéo au niveau musique. Cela nous a donné une certaine légitimité . De fil en aiguilles nous avons continué à travailler ensemble jusqu'à vouloir démarrer notre premier projet de jeu ensemble.

Valentin : « L'histoire derrière la création de Glee-cheese s'entremêle avec celle d'After Bit. Pendant la troisième saison de l'émission, Charles est parti à Cannes rejoindre un studio dans lequel il a rencontré Alexandre et moi de mon côté j'ai rencontré Max en faisant des jeux avec lui, nous avons fait 2 jeux ensemble avant la création de Glee-Cheese. »

Charles : « Avec Alexandre nous travaillions chez Cubical Drift sur le jeu Stellar Overload [Ndlr : le jeu fut annulé le 15 novembre 2018], j'étais le directeur audio du projet et lui le directeur artistique. Lorsque le studio a fermé nous nous sommes dit que nous devions continuer à faire des jeux ensemble. Lorsque nous avons commencé à discuter de créer ensemble, à ce moment-là, Valentin nous a dit « j'en fait partie ».

Valentin : « Je fréquentais beaucoup le studio de Cannes parce que je m'occupais des making-off et des trailers du jeu, après After Bit j'ai beaucoup fait de vidéos. Les apéros d’après boulot sont devenus des réunions puis un vrai projet... pour au final devenir A Musical Story assez vite.

Charles : « Au départ nous avons commencé le projet avec Sylvain, un autre des membres du studio Cubical Drift mais il est finalement parti sur un autre projet. On a donc continué notre projet avec Maxime qui est venu apporter d'autres expertises de Game Design, des expertises acquises sur d'autres projets sur lesquelles il avait travaillé avec Valentin. On peut donc découper les 4 ans de développements d'A Musical Story en 2 ans et 2 ans. Avec Maxime nous sommes rentrés dans une production totale.

Maxime : « La version qui avait été développée à mon arrivée était totalement différente de celle qui était à la toute base. L'idée était la même, faire avancer la narration avec la musique, sauf que tout l'enrobage de gameplay a beaucoup évolué. »

Alexandre : « Quand Maxime est arrivé sur le projet il a fait une « The Social Network »,la scène dans laquelle Sean Parker dit à Mark Zuckerberg « C'est pas The Facebook, c'est Facebook ». Maxime a dit « 4 Boutons ? Non... 2 boutons ».

Charles : « On se donne des rôles bien définis pour nous présenter aux éditeurs ou aux influenceurs mais nous avons tous plein d'étiquettes. Nous sommes tous co-quelquechose, nous avons tous plein de casquettes. Ça n'a pas rendu tout le développement plus facile mais c'est aussi l'un des avantages d'être un studio indé. »

Logo de l'émission d'After Bit sur les musiques de Mario Kart 8 

Partie II : « Nous avons fait un jeu avec des choix radicaux. »

Nous avons donc aborder le sujet épineux des jeux de rythme qui sont souvent considérés comme des jeux de niche, difficiles et exigeants. La question de l'accessibilité semble aussi avoir été centrale durant le développement d'A Musical Story.

Charles : « La vraie première pensée c'était qu'on voulait faire un jeu de musique différent dans lequel on allait avoir l'impression de jouer de la musique et pas juste de regarder un écran défiler. Faire une expérience très sensorielle. L'accessibilité est arrivée très tard, grâce à Maxime, nous nous avions une vision hardcore de l'expérience. »

Alexandre : « L'accessibilité vient aussi de la formule qui reste très simple « on raconte une histoire avec des images et on joue de la musique » avec un gameplay très simple. »

Charles : « Le gameplay c'est vraiment « Jacques a dit », on répète une mélodie. Tous les jeux musicaux ont été pensés sur des morceaux entiers. Nous, nous l'avons basé sur l'écoute et donc sur des choses courtes, des boucles de 5 ou 10 secondes pour qu'on puisse retenir une mélodie. Nous savions très vite que notre jeu n'aurait aucun game over. Alexandre disait régulièrement qu'il fallait que l'on rajoute des messages d'encouragement dans le jeu « Prends le temps d'écouter », je ne sais si nous aurions dû le faire ou non. »

Alexandre : « C'est dur d'avoir le bon ton pour aider quelqu'un. Est-ce qu'en écrivant des messages dans le jeu ça aurait marché ? »

La loi de Bushnell qui veut qu'un bon jeu se doive d'être  "facile à apprendre, difficile [presque impossible] à maîtriser", loi si chère à Nintendo est aussi au centre de la création d'A Musical Story.

Charles : « Dans tous nos documents de travail ou quand nous allions pitcher le jeu à des éditeurs, on parlait directement de la philosophie du jeu « Easy to learn, hard to master [Ndlr : Facile à apprendre, dur à maîtriser]. C'est aussi notre philosophie en général, nous sommes beaucoup dans le studio à avoir grandi avec des jeux Nintendo et des jeux indépendants, accessibles mais exigeants, c'est la philosophie qui récompense le plus le joueur. »

Alexandre : « Il y a plein de jeux auquels je ne joue pas parce que je n'y comprends rien. Tu ne peux pas accéder à certains mondes ou jeux parce que tu n'as pas les codes. Ça fait du bien de tomber aussi sur des expériences simples et accessibles. J'étais super content de faire un jeu aussi accessible. »

Charles : «Alex est moins consommateurs de jeux vidéo que nous autres dans le studio, il a amené avec lui un regard neuf. Il allégeait beaucoup les interfaces pour aller à l'essentiel. Il nous disait souvent « Less is More », « moins c'est plus ». C'est une philosophie qui nous aide à apporter de la clarté et de la simplicité dans tous nos projets. »

Alexandre : « J'ai la conviction qu'artistiquement, si les choses sont simples et claires pour nous, on ne perdra ni les joueurs ni nos intentions. »

Charles : « Il est certain qu'A Musical Story ne tiendrait pas sur 20 heures à cause de concept simple. Notre expérience ne doit durer que quelques heures mais le jeu a été pensé pour être court. »

Maxime : « Nous voulions mettre l'accent sur le côté « sans arrêt » du jeu, comme un album qui se file sans beaucoup de pauses dans le jeu, mis à part les retours à la map. Nous voulions qu'on puisse enchaîner les niveaux facilement pour que la narration et l'ambiance puissent se mettre en place rapidement. »

Charles : « Les retours au menu ont permis de montrer aux joueurs que le voyage avance et de donner de petites pauses aux joueurs. »

Maxime : « Le côté cool de la carte est aussi que l'on voit que l'on est toujours sur la route jusqu'à décrocher de celle-ci et de voyager vers l'inconnu après le clash. »

Valentin : « Il fallait que le jeu soit court pour encourager les joueurs à le faire d'une traite pour accentuer le côté cinématographique d'A Musical Story. »

Charles : « Il ne fallait aucun temps de chargement dans le jeu pour respecter notre vision d'un album qui ne s'arrête jamais. C'est une histoire qui ne s'arrête pas donc la musique ne doit pas non plus s'arrêter. »

Valentin : « La référence à l'album des Pink Floyd « Dark Side of the Moon », qui ne s'arrête jamais, était là depuis les prémisces du jeu. Avant même le passage aux années 70. »

Nous avons ensuite abordé le changement de gameplay qui s'opère lors du dernier niveau, celui avant les niveaux bonus.

Charles : « On voulait que le gameplay change, nous avions remarqué que beaucoup des histoires qui nous touchaient avaient, juste avant leurs fins, une sorte de déclic, un changement de gameplay. Dans Journey, le personnage à la fin se mettait à voler, dans Celeste, il y avait le troisième saut. Nous voulions nous aussi avoir ce déclic. Nous avions d'autres idées mais nous voulions aussi pouvoir passer à ce niveau sans avoir à expliquer une nouvelle mécanique. Nous avions beaucoup d'hésitation, même jusqu'à la fin du développement sur ce dernier niveau. »

Alexandre : « Nous avions peur que ce niveau fasse tache vis-à-vis des autres. Pour nous nous l'avions « bricolé » et il n'allait peut-être pas être bien reçu par les joueurs mais ce ne fut pas le cas. »

Valentin : « Ce changement de gameplay marque aussi le retour au présent, ce ne sont plus des souvenirs de Gabriel mais son présent, il doit avancer. »

Charles : « Avec ce niveau nous avons aussi caché quelque chose musicalement et nous sommes étonnés de voir à quel point les joueurs l'ont compris. Vers la toute fin de celui-ci le joueur doit presser deux notes très rapidement et à répétition comme un battement de cœur pour ranimer Gabriel et certains joueurs l'ont tout de suite compris. On voulait avec Valentin que chaque note, chaque instrument aient une importance et une signification. »

Nous avons ensuite parlé de la liberté créative des studios indépendants et du côté artistique de l'industrie.

Alexandre :« Nous avons un pied dans le monde artistique mais un pied aussi dans l'industrie. La tête dans les nuages et les pieds sur terre. Il faut avoir une exigence et faire respecter notre vision. Aller à l'encontre de l'industrie c'est important mais il ne faut pas oublier que c'en est une. »

Charles : « Si on oublie que c'est une industrie, on ne sort pas son jeu ou à une échelle bien plus petite. »

Alexandre : « C'est possible de faire respecter sa vision, il y a des créateurs qui ont une envie d'auteur qui nécessite un certain temps de travail. »

Charles : « Après une conférence en Suède, à Malmö, pour trouver un éditeur, nous avons eu des propositions pour notre jeu. On nous a proposé d'utiliser notre formule pour faire écouter du Rihanna ou du Beyoncé pour débloquer des photos Facebook. Il voulait le gameplay sans l'histoire, nous avons évidemment refusé.

Interlude musical de Valentin :

Valentin : « J'aimerais faire écouter LA Woman des Doors, pour la simple et bonne raison que cette ambiance Road-Trip des années 70 est forcément liée aux Doors parce que c'était la musique que mon père mettait dans la voiture. C'est une musique qui s'écoute la tête par la fenêtre. Avec Charles on apprécie énormément ce groupe parce qu'ils ont démocratisé cet instrument qu'on affectionne énormément, le fender rhodes. Ce morceau des Doors, marque la fin du groupe, quand Jim Morisson crie plus qu'il ne chante parce qu'il a trop de Whisky dans le sang pendant les enregistrements rend sa voix moins belle mais plus animale. Ce morceau à été au cœur de la réflexion du niveau du jeu dans lequel le voyage commence.

Partie III : L'édition du jeu 

La musique par rapport au gameplay et les difficultés de trouver un éditeur.

Charles : «  Le processus de création du jeu fut assez étrange. En premier on a trouvé une formule, on en a testé beaucoup, mais dès la toute première formule la musique tournait en boucle. »

Valentin : « La musique est présentée par une intro, il y a plusieurs phases avec plusieurs instruments. Le premier instrument reste toujours en fond musical. »

Alexandre : « Cette formule a posé la base du projet et après il y a eu des pérégrinations, des envies artistiques, plus ou moins bien calibrées pour ce projet. Je venais de Cubical Drift sur un projet entièrement en 3D et je me disais que je pouvais aussi choisir la 3D pour ce projet. Peut-être aussi pour des raisons éditoriales mais c'était un mauvais choix. Mais il fallait modéliser entièrement un ou deux personnages et les décliner. Mais là il fallait une scène par niveau et c'était impossible d'un point de vue production. Le budget était tel que trouver un éditeur était difficile. »

Charles : « La 2D est venue tard, elle est même venue après que nous ayons trouvé un éditeur. »

Alexandre : « Le premier projet n'a rien donné mais la formule nous a prouvé que c'était possible et nous sommes reparti du début, sur de la 2D. »

Charles : « Nous sommes tout de même passé à quelques semaines de l'abandon. La signature avec Digerati à été la signature de la dernière chance. Nous ne trouvions pas la bonne forme pour le projet malgré plusieurs essais avec cette formule. Sur les 12000 jeux, sans même exagérer ce chiffre, il n'y en a même pas 500 qui sortent avec un éditeur. C'est une chance énorme de signer avec un éditeur, je comprends le risque et je félicite l'audace de Digerati de signer un jeu de niche pareil. On ne leur montrait en plus pas énormément de choses. »

Valentin : « Beaucoup de gens nous disaient « C'est génial mais pas pour nous, trop difficile à vendre, trop dur à trouver le public. »

Charles « C'était en plus notre premier jeu et c'est beaucoup plus difficile de trouver un éditeur pour un premier jeu qu'après avoir passé cette étape. Après la sortie d'un premier jeu, les éditeurs voient que tu es capable de produire un jeu, de le sortir. Si en plus tu arrives à avoir un score correct, trouver un éditeur c'est plus facile. Tu ne viens plus de nulle part et ça ça change beaucoup de choses. »

Maxime : « Nous n'avions aussi qu'une démo illustrée sur un seul niveau et 4 niveaux jouables avec seulement du gameplay à présenter aux éditeurs. »

Alexandre : « C'était en plus pas la meilleure période pour sortir un jeu narratif. »

Charles : « Il fallait que les éditeurs nous fassent confiance. Nous avons aussi eu de grosses déceptions, un des moments les plus décevants c'est quand on parlait avec Double Fine qu'on admire énormément et du jour au lendemain ils ont stoppé les transactions avec nous. Ils venaient d'être rachetés par Microsoft et ils ne pouvaient plus éditer de jeux.
Greg Rices [Ndlr : L'ancien vice-président de Double Fine, actuellement à la tête de la division « Jeu indépendant » de Sony] m'a appelé pour me dire « Tu fais le jeu que j'aurais rêvé de faire moi » et forcément une phrase pareille de la part d'un créateur que l'on admire fait énormément plaisir.
 Digerati ne nous a jamais freinés dans notre développement. Ni sur la thématique de la drogue ni sur la nudité. On a toujours globalement réussi à faire ce que nous voulions.»

Pourquoi avoir posé le cadre du jeu dans les années 70 ?

Charles : « Je suis étonné de voir le temps que nous a pris le fait de partir dans les années 70 pour notre histoire. Au début, nous avons écrit beaucoup d'histoires et il a fallu plusieurs années avant d'arriver aux années 70. Environ deux années après le début du développement. C'est Alexandre qui nous a dit au téléphone « Un road-trip ça serait quand même bien parce que ça nous permettrait de voir plein de paysages », du coup l'époque du road-trip c'est quand même les années 70 et pour des facilités de narration, c'était bien pour nous cette période-là. Un peu comme Stranger Things, les créateurs disaient que se placer dans les années 80 permettait de laisser de la liberté aux personnages sans avoir à se soucier de la technologie. Et là directement c'était évident que nous allions nous éclater avec les années 70. Avec Valentin nous avons pu nous imprégner de la liberté musicale des années 70 même si on est évidemment aussi inspirés par des groupes contemporains comme Air, Radiohead ou encore Syd matters dont l'influence se sent largement dans la BO comme Led Zeppelin, les Doors ou les Pink Floyd. C'est la liberté de cette période-là qui nous intéressait. Quels que soient les styles que nous avions pris, notre volonté de base c'était de nous dire que nous voulions nous éloigner de l’électro, avoir une musique plus interprétée et plus libre, sans avoir de beat marqué. »

Alexandre : « À cette époque-là je regardais aussi une série avec James Franco, The Deuce, qui se passe dans le New Yord des années 70 et j'avais bien aimé cet univers. Je me suis dit que ça pouvait marcher. Une fois qu'on a une bonne idée, c'est marrant de voir que derrière tout est fluide. Les personnages ont étés créés rapidement, beaucoup de choses sont arrivées assez vite. Cette époque est un ailleurs assez agréable, sans technologie. Le thème d'un road-trip dans les années 70 me parlait et m'inspirait. »

Valentin : « Depuis le dernier Tarantino les gens se rendent compte qu'ils adorent les années 70. C'est l'époque Peace'n love, du mouvement contestataire du rock américain et Tarantino a remis ça sur le devant de la scène. On a compris qu'il n'y avait pas que nous qui aimions les années 70. C'est une époque assez délaissée les années 70 dans le jeu vidéo. »

Charles : «C'est une époque très fantasmée. Alexandre y voyait des couleurs et des formes intéressantes. Raconter une histoire qu'avec de la musique et des images c'est un choix radical et il nous fallait donc avoir des formes et des images qui évoquent beaucoup de choses. »

Alexandre : « A aucun moment nous ne nous sommes dit « ça y'est c'est décidé nous partons sur les années 70 » mais à chaque moment on se rendait compte qu'on était ramenés à cette époque, dans nos créations et finalement les années 70 se sont imposées. »

Valentin : « Ce n'est pas simplement un jeu sur les années 70, c'est un jeu qui pourrait se passer à d'autres époques. C'est crédible pour l'époque mais nous ne nous sommes pas arrêtés à ça. »

Alexandre : « J'ai une fascination pour Jimi Hendrix et quand j'ai créé Gabriel j'ai eu peur de tomber dans le biopic. L'idée de base n'était pas de refaire Jimi Hendrix mais finalement le personnage a plu. Le personnage est tellement fort dans l'inconscient collectif qu'il s'est imposé lui-même. Je ne m'attendais pas à ce que le public s'empare autant de cette référence. Les gens ont besoin d'avoir des points d'ancrage. Mais encore une fois nous n'avons pas été « esclaves » des années 70 mais en rappelant cette époque, les gens sont rassurés. »

Valentin : « On fait clairement des citations à des références mais sans nous enfermer dans celles-ci. C'est juste pour nous faire plaisir. »

La drogue a-t-elle gâché le potentiel des artistes ?

Charles : « Nous avons énormément d'admiration pour les Doors, pour ces artistes de cette époque mais je suis persuadé que si ces icônes n'étaient pas tombés dans ces excès auraient pu faire des choses encore plus géniales, encore plus brillantes. Il y a un énorme gâchis de ce côté-là. Il y a une espèce de fantasme qui dit que la drogue rendait la musique cool mais quand tu regardes des reportages tu vois bien que quand ils étaient défoncés, ils ne produisaient rien du tout, ils n'étaient plus capables de faire quoi que ce soit. Ça a pu leur donner quelques idées c'est sûr mais bon. »

Valentin : « Les Doors en sont un parfait exemple parce que Jim Morrisson qui était complètement incontrôlable ne venait plus au concert ou faisait arrêter les concerts au bout d'un quart d'heure quand il était défoncé. Les Doors avaient une pureté dans le son mais vers la fin ce n'est plus le cas. Si Jim Morrison avait été moins dans les extrêmes, les Doors auraient pu encore faire une dizaine d'albums.

Charles : « Tous ces artistes auraient pu nous donner encore plus de choses si belles. »

Alexandre : « Un personnage qui se drogue c'est du pain béni pour montrer de manière visuelle qu'il ne va pas bien. Exprimer le mal-être grâce à la drogue permettait de traiter ça graphiquement. »

Charles : « La corneille nous a beaucoup aidés à montrer des choses sans avoir à partir dans trop d'extrême. »

Valentin : « Nous ne racontons pas un personnage qui se drogue mais nous raconter l'influence de celles-ci sur lui et sur ses relations. Nous ne voulions pas mettre le doigt sur la drogue.

Alexandre : « On voulait un personnage qui ne va pas bien. La drogue est venue comme une idée pour montrer un peu de noirceur. Il fallait que Gabriel s'en sorte et pour cela il fallait un point de départ dans lequel il aille mal. »

Charles : « On voulait un personnage qui affronte ses problèmes. Dans tous nos scénarios on voulait qu'il se passe quelque chose d'émotionnellement fort. La drogue aide à représenter un personnage dévoré par quelque chose. Le scénario de What Remains of Edith Finch nous a beaucoup inspiré, notamment le passage de l'usine. L'usine c'est aussi une référence à Dancer in the Dark [Ndlr : Film sorti en 2000 et réalisé par Lars Von Trier], il y a une scène dans laquelle Björk travaille à l'usine et les machines lui remplissent tellement la tête que les machines font de la musique. La corneille surgit aussi de la répétitivité des bruits et des tâches de travaux à la chaîne.»

Interlude musical de Maxime :

Maxime : « J'ai choisi Black Sabbath qui est un groupe que j'adore et la chanson Iron Man pour rester dans la thématique des années 70.»

Partie IV : Glee-Cheese et Nintendo

A Musical Story présenté comme une exclusivité Nintendo Switch à la toute base puis sorti sur toutes les plateformes.

Charles: «Les plateformes se sont ajoutés les unes après les autres. Maxime a fait la version PC puis la version Mobile, d'abord IOS puis Android qui est venue après. »

Maxime : « À la toute base, nous faisions la version PC et console et Digerati s'occupait du portage Switch. Le jeu a été pas mal repoussé parce qu'on a d rajouter 5 plateformes de plus avec les portages ps4, ps5, Xbox one, Xbox Series.... Ce n'était pas présenté comme une exclusivité Nintendo Switch mais ce n'était annoncé que sur PC et sur Switch à ce moment-là. »

Charles : « Nous sommes donc passé d'été 2021 à hiver 2022 à cause de ça. Mais ce que nous avons toujours voulu c'est que le jeu sorte sur le plus de plateformes possible pour être le plus vu possible. Notre jeu à un gameplay qui peut se jouer sur un Micro-onde alors autant le porter sur plusieurs plateformes. Au moment de l'annonce du jeu Nintendo nous partageait avec le compte Indie World mais quand ils ont su que c'était un jeu « M for Mature » ils ont arrêté de communiquer sur le jeu. »

Interlude musical d'Alexandre :

Alexandre : « Il y a une soundtrack qui m'a marqué c'est celle de The Young Pope de Paolo Sorrentino et dans celle-ci il y a un morceau qui s'appelle Senza Un Perché de Nada. C'est une bo que j'écoutais beaucoup au tout début de la création du projet. Cette musique me fait penser à la série qui elle-même me fait penser à de la Grâce. C'est une série sur le Grâce et de temps en temps cette idée à pu m'aider. J'aurais pu choisir du Jimi Hendrix mais je me doutais que mes camarades allaient choisir des musiques des années 70 et du coup j'ai voulu partir sur ce morceau.

De plus dans le jeu Amelia est presque Christique, c'est un personnage céleste qui vient sauver Gabriel. »

Charles : « Gabriel est entièrement fasciné par sa présence, ce qu'elle dégage. C'est la raison pour laquelle avec Valentin nous avons voulu qu'il y ait de la voix dans le jeu mais seulement à ce moment-là, puis à la toute fin. Nous voulions faire de ce moment un moment de grâce absolu. »

Alexandre : « Je ne suis pas persuadé qu'Amelia existe vraiment. En soi, Amelia agit comme un ange gardien ou la part de Gabriel qui veut se sauver.

Maxime: « En plus il n'y a qu'un seul niveau dans lequel Gabriel n'apparaît pas, alors que tout est dans ses souvenirs, et c'est le niveau dans lequel Amelia affronte le corbeau. »

Charles : « On est super contents aussi que les gens aient étés touchés par l'histoire. La première fois que j'ai fini le jeu ça m'a fait quelque chose, et voir d'autres gens en streaming être émus par l'histoire c'est incroyable et c'est vraiment rassurant. »

Partie V : Routes alternatives et seconde version du jeu

Alexandre : « Il faut savoir qu'A Musical Story qui est sorti est la version 1 du jeu. »
Charles : « Il y avait la version 1, celle que nous avons faite et une version plus chère à produire, la version 2 sans rentrer dans les détails. »

Alexandre : « Le jeu a sous le capot pour être plus. Plus de tout, plus d'histoires, plus de routes...Il y avait de quoi faire un truc plus fourni pour le jeu. »

Maxime : « Le souci n'était pas que l'argent mais aussi un souci de temps. Pour la version 1 il nous fallait 10 mois de développement tandis que la version 2 c'était quasiment 2 ans. Digerati a voulu limiter les risques et c'est normal. »

Valentin : « A la réflexion deux ans c'est court aussi pour ce qu'on a en tête. »

Quelle est la meilleure plateforme pour jouer au jeu ?

Charles : « J'ai toutes les consoles mais j'adore ma Switch. Le côté « pouvoir emmener A Musical Story avec moi » est juste ultra plaisant. C'est juste trop bien et c'est valable sur beaucoup de jeux. »

Valentin : « La version Nintendo 64... non la Switch aussi, le côté portable avec en plus un casque audio marche vraiment bien. »

Alexandre : « C'est la console la plus intimiste. Pour moi c'est la Switch aussi. »

Maxime : « Pour moi c'est l'Ipad, pour plus ou moins les mêmes raisons que vous mais l'écran est immense. La résolution est immense aussi. Pour moi c'est la version qui me happe le plus. »

Interlude musical de Charles :

Charles : « Je ne vais pas donner un morceau des années 70 mais il y a une petite histoire derrière ce morceau. Ce morceau c'est les Sardines de Patrick Sébastien... Non c'est Hunting Bears de Radiohead. L'histoire derrière ce morceau c'est que lorsqu'on a créé le niveau du bad trip on a essayé plein de chose et j'étais parti sur des pistes comme une expérience Chaman, j'étais parti sur des musiques un peu tribale. Les essais ne nous emballaient pas vraiment et avec Valentin nous avions très souvent parlé de ce morceau Hunting Bears qui nous fascinait parce que c'est quasiment qu'une guitare électrique seule face à elle-même avec quelques sons en fond. La guitare est là et prend tout l'espace sonore.
J'ai donc essayé de travailler dans ce sens-là pour ce niveau, parce que c'est Gabriel face à lui-même et face à ses démons, sa guitare prend tout l'espace. Ce morceau a vraiment été une référence pendant ce moment-là. »

Partie VI : Et la suite ?

Un vinyle ou une édition collector de prévue ?

Charles : « On n'a rien le droit de dire sur quoi que ce soit pour le moment mais on réfléchit à des choses. Certaines choses sont en cours de réflexion et si celles-ci avancent nous pourrons communiquer dessus. Il y a des discussions sur ces sujets. »

Au sujet d'une sortie physique du jeu avec une version collector, nos 4 compères semblaient amusés par cette question, il semble y avoir anguille sous roche de ce côté. Nous vous tiendrons évidemment informés sur le site dès qu'une actualité dans ce sens fera surface. Pour l'instant ni nous ni Glee-Cheese ni Digerati ne sont en mesure de confirmer ni vinyle ni sortie en physique ni édition collector de prévus.

Une suite pour A Musical Story ?

Charles : « On a des choses en tête, des idées, des envies mais pour l'instant il n'y a rien de prévu. On bosse tous sur d'autres projets. Le moment où l'on aura envie de repartir sur un A Musical Story arrivera peut-être. On travaille sur quelque chose de plus léger dans ses thématiques, de plus amusant. On est nombreux dans l'équipe à sentir que revenir sur l'expérience A Musical Story va nous titiller.

Maxime : « Penser à un 2 tout de suite, sans avoir vu la réception du 1 serait trop rapide. Ce serait un peu comme réfléchir à quelque chose qui ne se fera pas. Nous avons des idées et des angles pour préparer un deux mais sans les avoir travaillées pour qu'elles rentrent dans un planning. Mais il y a l'air d'avoir une place pour une suite. »

Noté 9/10 dans nos colonnes, A Musical Story est disponible sur l'eShop de la Nintendo Switch au prix de 14,99 eurosCliquez ici pour lire notre test complet du jeu
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