Ce n'est pas tous les jours que l'on assiste à une résurrection en bonne et due forme. Epic Mickey, jeu de plate-forme 3D sorti en 2010, est un jeu qui a connu un succès correct mais également de nombreuses critiques. En effet, il n'a pas su être à la hauteur des idées que les joueurs s'en faisaient au vu de ses concept arts incroyables, et sa réalisation était des fois douteuse. Mais il est temps aujourd'hui de retrouver ce jeu qui a su nous faire rêver de mieux, en meilleure forme que jamais.

Test réalisé sur une version fournie par l'éditeur

Mickey is back ! And it's Epic !

Epic Mickey : Rebrushed, en bon remaster, reprend en tout point l'histoire du titre original. Il y a longtemps, le magicien Yen Sid a créé grâce à un pinceau magique un pays, réplique du parc DisneyWorld, où tous les toons oubliés pourraient vivre. Mais une nuit, Mickey arrive et chamboule tout : il crée un monstre d'encre avec le pinceau et renverse du diluant magique sur la maquette du parc, rendant le pays méconnaissable. Ce n'est que des années plus tard que notre mascotte aux oreilles rondes est rattrapée par ses actes, alors que le monstre l'attire de force dans le Monde de la Désolation qu'il a lui-même ruiné. Voulant sortir à tout prix, Mickey va pouvoir utiliser le pinceau magique et deux sortes de liquide : la peinture qui crée, et le diluant qui efface.

Ces deux produits sont au cœur de votre progression dans Epic Mickey, et représentent également un système de moralité basique, mais efficace. Lorsque vous traverserez les niveaux du jeu, vous verrez des objets très colorés que vous pouvez effacer, et des objets transparents que vous pouvez matérialiser avec de la peinture. Votre usage de la peinture et du diluant vont influencer le monde autour de vous, et aussi l'opinion que les habitants du monde de la désolation ont de Mickey. Ne pas détruire les choses, réparer les machines et convertir les ennemis et les boss à votre cause sont du bon karma, et tout casser, bah c'est du mauvais juju, c'est basique. Mais les changements de gameplay sont pourtant efficaces.

Vite ou bien ? On choisi !

Utiliser la peinture pour résoudre les problèmes du jeu et ses combats est souvent un peu plus long, et ne paye que plus tard, vous imposant par exemple de trouver un chemin caché, de faire plus de quêtes secondaires ou même de vous séparer de ressources précieuses. En échange, les habitants du monde vous aimeront, et vous aurez la bonne surprise d'éviter des boss, de vous voir donner des trésors cachés, et d'autres bonnes surprises qui collent à l'image de Mickey tel que on l'imagine (si tant est qu'on oublie que tout ça c'est la faute à son ego surdimensionné et à ses bêtises mais bon, hein...)

Utiliser le diluant va vous permettre de prendre des raccourcis, de vous débarrasser définitivement des ennemis, et de rendre certaines batailles plus faciles en étant une menace réelle. C'est un chemin direct vers les objectifs de Mickey, et on pourrait comprendre qu'il ne veuille pas passer plus de temps dans cet endroit où il ne connaît personne et où tout le monde est jaloux de sa célébrité. En plus, c'est déjà en ruine. Blague à part, il est très tentant d'utiliser ces raccourcis, et pour une fois le « mauvais » chemin a de véritables avantages en termes de gameplay. Que choisirez-vous ? La satisfaction d'un travail bien fait ou celle d'arriver à votre objectif ?

Le retour du platformer 3D

Au delà de ses mécaniques de peinture, Epic Mickey est avant tout un jeu de plateformes 3D. Dans des environnements fermés de taille modeste, Mickey devra résoudre des puzzles environnementaux et battre des ennemis afin d’accéder au prochain niveau, et ainsi de suite jusqu'à la confrontation avec un boss, l'objectif étant de récupérer les pièces de la fusée de Discoveryland et de s'échapper du Monde de la Désolation. A ces fins, il peut sauter, faire un double saut, attaquer au corps à corps, attaquer à distance et plus tard dans le jeu, invoquer des objets. Et bien sûr, utiliser son pinceau. Les capacités de mouvement de Mickey ne sont pas bien riches, mais les niveaux s'articulent autour, et des idées comme celle d'enlever le sol sous les ennemis, de matérialiser un mur afin de sauter dessus ou de trouver un raccourci derrière une affiche effaçable rendent le jeu très inventif. Il y a également beaucoup d'objets cachés et de quêtes à faire afin de vous faciliter la vie ou de rendre celle des autres compliquée en échange de quelques billets qui vous permettront d'acheter des objets de soin ou même de quoi progresser dans la quête principale sans quêtes secondaires.

Si en essence, tout semble classique, le fait que les niveaux soient des version tordues du parc DisneyWorld est également un vrai délice pour les fans, et on a grand plaisir à explorer le manège Small World (sans la musique, ouf), le repaire des pirates ou Main Street. On retrouve une ambiance glauque délicieusement décalée, et un véritable hommage à ce qui a été oublié. Les transitions entre les niveaux se font dans des niveaux de plate-forme 2D basés sur des dessins animés célèbres de Mickey, complets avec leur musique d'époque et moult références qui feront sourire les connaisseurs. Le level design est très intelligemment pensé autour du système de peinture et diluant et on en vient à se demander pourquoi ce jeu n'a pas trouvé preneur à son époque.

Il faut bien dire que lors de sa première sortie, Epic Mickey était en triste état, et sa maniabilité, sa caméra, et surtout sa version Wii désastreuse gênaient une expérience qui, du coup, manquait son potentiel. Cette nouvelle version corrige la plupart de ces problèmes et le jeu est fluide et agréable dans sa navigation, même s'il n'est pas exempt de défauts. Par exemple, les niveaux de plate-forme 2D sont obligatoires à chaque voyage, sans exception, et on se paye deux temps de chargement qui peuvent être longs, un cauchemar lors des quêtes qui demandent de faire des allers-retours. Il y a de quoi vouloir utiliser du dissolvant.

Une vraie œuvre d'art

Epic Mickey : Rebrushed est un jeu de plateforme classique contenant de très bonnes idées, mais il y en a plein des comme ça. Ce qui fait son aura, c'est sa direction artistique et le matériel de base. Lors de son annonce, Epic Mickey avait fait du bruit grâce à des artworks préparatoires complètement dingues, tranchant avec ce qu'on attendait d'un jeu Mickey : sombre, angoissant, même horrifique. Mais il s'avéra que ces illustrations n'étaient que des idées, et la direction finale du titre en a déçu plus d'un, qui s'attendait à autre chose. Si l'ambiance est toujours glauque, nous sommes toujours dans quelque chose de familier et même enjoué par moment. Mais si le titre a déjà été tué par sa propre hype une fois, ce remaster est enfin l'occasion de le découvrir et de l'apprécier pour ce qu'il est, et non pas pour ce qu'il aurait pu être. Car il faut bien le dire, Epic Mickey a eu ses fans, et a influencé les produits Disney pendant un moment, provoquant un intérêt pour les vieux personnages et cartoons, et recevant même deux suites directes.

Avec le gameplay bien « réparé » de ce remaster, la direction artistique si particulière du jeu ressort, et le Monde de la Désolation est un lieu fascinant à explorer, plein de secrets, de bonnes idées et de références. Il faut dire que avec quelqu'un comme Warren Spector à la barre (Ultima, Deux Ex) les idées innovantes et saugrenues (mais bienvenues) sont légions, et Epic Mickey est sans nul doute un jeu qui a été pour beaucoup un rendez-vous manqué à son époque, la faute à une technique pas toujours au top.

D'ailleurs, sur Switch, la technique est globalement bonne et le jeu est joli malgré quelques ralentissements et temps de chargement intempestifs. Peu de bugs ou de problèmes de maniabilité à signaler, choses qui avaient plombé l'original. Force est de constater que l'on peut profiter de l'expérience confortablement. La musique est superbe, immersive, et tout le côté sonore est très réussi, même si on regrettera que les dialogues ne soient pas du tout doublés, ce qui enlève beaucoup de charme aux personnages, surtout quand on les entendrait presque dans nos têtes. Le jeu possède une bonne durée de vie avec pas mal de secrets à trouver (dont trois dessins animés d'époque complets) et la rejouabilité est intéressante pour voir l'autre côté de l'aventure si on s'est cantonné à n'utiliser qu'un seul des pouvoirs de Mickey.