Il serait injuste de dire que tous les jeux mobiles sont mauvais. Mais il serait également faux de dire que leur plate-forme leur offre tous les outils pour être de bons jeux. Alors quand le papa de Final Fantasy fait un jeu mobile, et que celui-ci est adapté sur Switch, sommes-nous face à une petite perle trouvée dans la fange, ou trouverons-nous une autre preuve que les téléphones ne sont pas faits pour les gamers?
Test réalisé sur une version fournie par l’éditeur
Budget Fantasy
L’histoire commence avec Leo, protagoniste qu’on dirait échappé d’un jeu Nier, alors qu’il se retrouve amnésique dans une usine robotique sur le point d’exploser. Aidé par deux robots amicaux, il se téléporte hors de danger sans comprendre ce qu’il se passe et atterrit dans une ville inconnue et un monde qu’il l’est tout autant. Pourtant, lui est connu, et guidé par les pistes qu’il s’offre à lui, Léo se voit rejoint par plusieurs alliés dans un combat contre une entité se faisant sobrement appelée “Le Dieu Maléfique,” responsable d’une infection mondiale de “mechteria” qui change la faune et la flore en robots. Un combat qui le dépasse, mais dans lequel il a toujours trempé, alors que son passé lui est révélé et que de mystérieux artefacts ne cessent de croiser son chemin.
En termes de gameplay, Fantasian est un RPG très classique rappelant les Final Fantasy de l’ère PS1… en moins bon. Vous allez parcourir des villes et une carte du monde, explorer des “donjons” et allez faire des combats au tour par tour. Très classique, sauf que, la faute au support mobile d’origine, absolument tout est simplifié, et les quelques systèmes en place ne tiennent pas la distance, et ce malgré une volonté de pousser la créativité. Par exemple, tous les décors sont de véritables maquettes prises en photos. Un effort louable mais qui fait du mal à l’expérience quand on voit nos modèles 3D dignes de l’ère PS2 évoluer sur des décors photos réalistes à l’air de jouets, et très souvent baignés dans un flou absolument dégueulasse au vu de la capacité de stockage utilisée pour le titre. Cette direction prive également les décors de fantaisie: pas de grande ville impossible, pas de décors improbables qui nous laissent rêveurs, vu que tout devait être une maquette. Mais c’est loin d’être le pire.
Mobile Fantasy
Dans les défauts mortels du titre, on notera surtout les transitions entre les différents plans de vue sur les décors, qui se font avec un mouvement très rapide de caméra et un effet de flou immonde. Ces transitions sont suffisamment abruptes et violentes pour donner le mal des transports, et assez fréquentes pour ne pas être ignorées. Si un jeu est suffisamment râté pour vous rendre physiquement malade, c’est un mauvais signe. Comment ne pas regretter les décors réalisés amoureusement de FF7 ou 9? Ou même les environnements en 3D charmants de Grandia? A l'heure où un téléphone mobile peut faire tourner un jeu comme Fortnite, ce type réalisation n'est simplement pas acceptable.
Les combats, eux aussi, se voient tronqués. Si chacun de vos personnages a quelques capacités propres, comme de voler ou de lancer des sorts, ils se ressemblent beaucoup, et vous n’avez pas beaucoup d’options en bataille. Tout juste pourrez vous attaquer dans différentes directions, ou vous gaver de potions sans véritable choix tactique ou personnalisation. Le fait de choisir la trajectoire de vos attaques afin de toucher plusieurs ennemis est amusant et novateur, mais c’est bien la seule chose de qualité dans ce système très basique. Pas de défense, de lignes de combat, de capacités uniques, d’invocations, de limit break, de couverture… On s’ennuie ferme. Même l’équipement des personnages est réduit à peau de chagrin (arme, armure, accessoire) et n’affecte que quelques stats basiques. La seule bonne idée du jeu de ce côté est le “Dimengeon,” une machine qui rassemble tous les monstres aléatoires en un seul combat très long, ce qui réduit le grind et permet de déboiter du mob par paquet de douze. Mais s’il est amusant de d’utiliser ses meilleures attaques pour aligner les ennemis, on se rend du coup compte à quel point les combats normaux sont ennuyeux.
L’histoire, bien qu’elle ne soit pas inintéressante, est elle aussi très peu développée, et des raccourcis sont souvent pris, surtout avec le développement des personnages, racontés dans de simples textes. Des moments comme "je suis la princesse mais je vais te suivre car je fais un caprice sont dignes de grincements de dents quand on connait les œuvres sur lesquelles Sagakuchi a travaillé. Difficile de s’immerger dans un monde où les enjeux nous sont tout à fait inconnus même après quelques heures, où les personnages ne sont ni profonds ni attachants, et si l’histoire globale peut quand même être intéressante, elle met tellement de temps à démarrer, et on s’ennuie tellement en jouant que ça ne vaut pas le coup. La bande-son par Nobuo Uematsu et un doublage anglais intégral aident à donner un peu de vie à ce monde, mais même là, rien ne retiendra votre intérêt tant le style et la qualité des musiques va d'un extrême à l'autre. La possibilité de remplacer les musiques de combat par celles des Final Fantasy récents est bienvenue, mais cela donne juste envie de jouer à un meilleur jeu, fait pour une plate-forme qui saura l’accueillir.