Nintendo Switch

Decarnation

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Decarnation

Par Lotario - Le 12/06/2023 à 08:00

Decarnation est l'œuvre de Quentin De Beuk, ayant un parcours dans l’industrie du jeu vidéo avéré en ayant notamment travaillé chez Ubisoft. Désormais à la tête d’Atelier QDB, il nous livre leur premier jeu qui mise sur la narration et l’horreur. Disponible depuis le 1er mai 2023, avons-nous été bousculé par cette histoire se déroulant dans le Paris d’hier ?

Gloire à Gloria !

Nous sommes à Paris durant les années 90, et quelles années ! Ce furent aussi les années de ma période de jeune adulte (20 ans et plus), autant dire que cette période ne m’est pas étrangère. L’histoire s’axe sur une jeune femme approchant la trentaine, Gloria. Artiste dans l’âme, et plus précisément danseuse, nous débutons alors que Gloria pose nue pour un sculpteur. Une fois la séance finie, elle est rejointe par Joy, sa petite amie, à son appartement. Après quelques échanges, Joy repart et elles conviennent toutes deux de se rejoindre le lendemain pour l’exposition de la sculpture. Très vite, on comprend que Joy est en proie au doute et que sa vie ne tourne peut-être pas comme elle le souhaiterait.

Dans la vie, Gloria est donc danseuse. Ainsi, le soir, elle se produit au Black Swan, une sorte de petit cabaret. Elle semble avoir une certaine notoriété. Mais revenons à l’exposition, les deux jeunes femmes arrivent au musée et c’est l'occasion de découvrir la personnalité très forte de Joy. Alors qu'elles débutent visite, nous pouvons découvrir bon nombre d'œuvres ô combien connues telles que celles de Rembrandt (mais pas que). Gloria finit par arriver seule devant la sculpture et découvre avec effroi quelque chose de très dérangeant, malaisant même… Affectée, elle retrouve Joy et décide de quitter l’expo. Mais tout commence à peser sur sa vie, son patron lui fait entre temps une proposition qu’elle vit probablement comme une mise au placard. En effet, il lui demande de quitter la scène, en tant que coach, pour laisser la place à de nouvelles danseuses. Bref, Gloria voit sa vie basculer peu à peu jusqu’à un curieux coup de fil… Mais là, ce sera à vous de découvrir la suite…

Horreur narrative

Parler gameplay pourra être un peu particulier. Bien que le titre se présente comme un jeu d’horreur, il vous fait vite comprendre qu’il ne mise pas sur la survie ou même la peur. Pour le coup, il se veut avant tout narratif. SI vous cherchiez un minimum d’action, passez votre chemin, ici, c’est l’écriture qui prime, ce que vit Gloria et l’ambiance qui se dégage de l’univers. Il faut donc prendre ce soft comme une expérience tel un film d'horreur psychologique. Pour ne rien gâcher de la découverte, il faut vous imaginer que vous allez en quelque sorte affronter l'esprit de Gloria ou plutôt faire face à ce qui la perturbe sans trop comprendre réellement pourquoi elle se retrouve là où elle est. En tout cas, dans un premier temps. Si vous n’êtes pas réceptif à ce type de structure de jeu, ce sera difficile d’accrocher. Mais dans le cas contraire, il y a comme un attachement au personnage, une empathie qui se dessine et l’envie de savoir ce qu’il adviendra du personnage. Voyez tout ça comme une mini série où les épisodes sont ici des actes s’axant sur un sujet bien précis.

Malgré tout, le gameplay est existant puisque vous êtes amené à déplacer votre personnage et fouiller l’environnement un peu comme dans un point’n click. D’ailleurs, les phases d’exploration (pour le dire ainsi), sont se limitent assez souvent à déplacer Gloria et l'observer commenter ce qu'elle voit ou ce qu'elle ressent. Mais pas uniquement, il faut parfois réaliser certaines tâches dans l'environnement tout en échappant à de vilaines créatures, parfois il faut même les repousser. Quelques mécaniques viennent donner un peu de peps comme le fait de marteler le bouton pour tirer quelque chose. D’autres phases peuvent être comparées à de mini-jeux (tout en servant parfaitement bien l’histoire) avec par exemple des phases en mode jeu de rythme. C’est assez ponctuel, parfois surprenant car on ne s’y attend pas, mais tellement pertinent quand ces phases se présentent à nous. Mais attention, il est important de retenir que ces phases sont très ponctuelles et font partie d’une infime fraction du jeu.

Pixel & Horreur

Sur le plan visuel, le titre se base sur du pixel art plutôt bien rendu et réussi. On peut réellement observer la laideur artistique de certains éléments ou personnages. Outre cet aspect horrifique, le rendu de certains lieux de Paris est tout bonnement très réussi et donne une impression de beauté architecturale. En parallèle, d’autres lieux peinent sans mal à démontrer une misère ou un dégoût visuel. Mais il serait dommage d'en dire trop. Sur le plan sonore, le jeu arrive sans mal à vous surprendre. Outre des musiques parfaitement orchestrées, il se paie le luxe d’inclure une chanson et en français s’il vous plaît. Il faut avouer que c’est assez marquant et pas fréquent (avouons le, nous avons plus l’habitude de voir dans les jeux des opening japonais).

Enfin, la durée en soi n’est pas très longue. Comptez entre six et sept heures de jeu. Mais aurait-il fallu plus ? Certainement pas, le titre étant narratif, ça aurait été un mauvais choix. D'ailleurs, si durant la première heure le titre vous tient en haleine et ce avec intensité, il se peut que vous puissiez ressentir quelques moments poussifs tant l’histoire avance peu par la suite. Comme précisé plus tôt, parfois, on s’axe plus sur Gloria que sur le fil rouge de l’histoire. Être réceptif au traitement psychologique du personnage est tout aussi capital pour apprécier à sa juste valeur le titre. C'est d‘ailleurs pour cette raison qu’on peut, dans une certaine mesure, estimer que ce titre est un ovni dans son genre. 

7
Decarnation est plutôt particulier puisqu'il mise à la fois sur l'horreur et le narratif, nous imposant alors une progression plus lente et passive. Et bien que l'on pourrait prendre ces deux aspects comme un défaut, si vous arrivez à comprendre Gloria, le titre sera alors très parlant. Il traite avec brio de la psychologie de cette jeune femme qui est à un tournant compliqué de sa vie. L'aspect visuel vient aussi renforcer tout ce que le titre tente de décrire en nous infligeant des lieux restreints et exigus qui peuvent en effet parfois ne dépeindre que l'horreur et le dégoût.

  • De l'horreur narratif de très bon goût...
  • Le traitement psychologique de Gloria...
  • Un pixel art maîtrisé
  • Une composition musicale (et en chanson !) de très grande qualité
  • .. Qui pourra ennuyer ceux souhaitant ne serait-ce qu'un peu d'action
  • ... Qui peut donner un sentiement de progression poussive