Il y a quelques années, la réputation des jeux financés sur Kickstarter avait largement souffert du tollé de Mighty Number Nine, un jeu risible qui avait honteusement gâché l'argent de ses backeurs. Pourtant, quelques irréductibles idées de financement participatif ont survécu, et ont trouvé le succès. Parmi ceux-là, Blasphemous, magnifique œuvre du studio espagnol Game Kitchen. Sombre, tordu et difficile, ce Metroidvania n'a fait que s'améliorer avec ses mises à jour pour devenir une référence du genre. Sa suite pourra t-elle se montrer à la hauteur ?
Pénitent reviens parmi les tiens !
Encore une fois, Pénitent, vous êtes tiré de la tombe. Cvstodia a encore besoin de vous car est apparu au-dessus de la ville un gigantesque cœur, prêt à donner naissance à un enfant que vous devez empêcher de naître. Quand on vous dit que les voies du Miracle sont impénétrables ! Vous devrez vous frayer un chemin parmi les passages oubliés de la ville, explorer des temples célestes, et affronter les autres Pénitents pour accomplir votre destinée. Votre destinée l'exige !
Tout comme pour le premier jeu, l'histoire de Blasphemous 2 est assez obscure en surface, vous donnant tout juste un but et vous laissant reconstituer le reste. Et si vous traversez le jeu en ligne droite, il est possible que vous regardiez la dernière cinématique en vous grattant la tête. Mais comme dans le premier épisode, il y a de quoi creuser, et le monde s'ouvrira à vous pour peu que vous cherchiez un peu. Mais la moitié de la récompense reste le voyage, le plus souvent. Préparez-vous à bourlinguer, et pas qu'un peu !
Blasphemous 2 est un metroidvania (ou jeu de plate-forme exploration si vous voulez donner des catégories pas drôles) très centré sur le combat. Avec sa vitesse assez lente et ses animations détaillées, vous ne foncerez pas partout, bien au contraire, mais vous pourrez profiter à fond de l'atmosphère si particulière de ce jeu, inspirée de la culture espagnole, des heures les plus sombres du Catholicisme, et des peintures si particulières de Francisco Goya. Un cocktail identique à celui du premier jeu, mais toujours aussi enivrant, et avec quelques particularités : cette fois-ci, l'atmosphère n'est plus aussi lourde et horrifique. Attention, elle l'est toujours, mais vos actions du premier jeu ont l'air d'avoir porté leurs fruits, et la vie a repris des droits à Cvstodia, les couleurs sont plus vives, les personnages plus nombreux et en meilleure santé. La musique est aussi plus vive, et non plus un vague écho d'un passé oublié. C'est une bonne interprétation d'une suite, et une qui a du sens !
Le Pénitent le passe !
Dès ses premières minutes, Blasphemous 2 nous présente sa principale nouveauté en nous laissant le choix de l'arme qu'on maniera : une épée identique à celle du premier, dotée d'un super mode pour taper plus fort et qui peut annihiler certains murs. Une rapière et une dague très rapides mais plus faibles, qui se chargent en électricité et vous permettent de vous téléporter grâce à certains miroirs. Ou une immense masse lente et puissante, incapable de contrer les coups, mais qui peut sonner les cloches au littéral comme au figuré, révélant des points faibles comme des passages secrets. Vous aurez rapidement accès aux autres armes, et vous pourrez toutes les améliorer, mais ce choix changera votre début de jeu. En dehors des combats, vous aurez quelques passages de plate-forme qui vous demanderont de changer d'arme à la volée, créant des passages tendus mais restant très justes et faisables. En combat, changer d'arme n'est jamais obligatoire mais reste une possibilité très sympa en fonction des ennemis rencontrés.
Et des combats, vous allez en manger. Le principal défi de Blasphemous 2 n'est pas la navigation, même si elle reste importante dans une carte immense, mais plutôt les ennemis qui parsèment votre chemin, et qui peuvent vous ruiner en quelques frappes si vous les ignorez. Chaque combat est potentiellement mortel, ce qui vous gardera alerte, mais qui pourrait être lassant à force de retraverser la même zone. Et en plus de cela, le jeu adore vous bloquer dans une salle et vous faire combattre des vagues d'ennemis. Vous êtes loin d'être démunis ! Vous avez des sorts, vos armes et même une esquive en glissade, mais il suffit qu'un adversaire vous coince contre un mur, et ce sera la débandade, et la marche de la honte vers le site de votre défaite.
En cas de mort, vous perdrez une partie de votre magie, bien utile au combat. Et si vous mourrez sans en récupérer, vous ne pourrez utiliser toute votre barre sans aller voir un PNJ et payer pour effacer cette pénalité. D'ailleurs, le village central compte plusieurs personnages qui vous aideront, comme un marchand ou un sculpteur qui vous donnera des statuettes boostant vos attributs. Trouvez les bonnes combinaisons de statuettes, et vous pourrez même débloquer des super-boosts ! Et n'ayez pas peur d'aller partout : des salles de téléportation sont présentes, ainsi que des raccourcis à débloquer, et un objet caché vous débloquera aussi une super téléportation vers tous vos checkpoints ! Certaines amélioration vitales, comme l'augmentation de votre vie et de votre magie sont également cachées, alors il faudra s'y mettre ou se résoudre à faire le jeu en mode hardcore. Il n'y a pas à dire, Blasphemous 2 est un jeu qui sait récompenser votre exploration.
Personne ne s'attendait à l’inquisition espagnole !
Il y a beaucoup à dire sur la présentation de Blasphemous 2, à commencer par celle de ses boss. Oui, cela relève aussi du gameplay, mais il faut se rappeler que le premier épisode comptait des boss gigantesques, affreux et carrément impressionnants qui donnaient un certain cachet. Blasphemous 2 se montre beaucoup plus timide de ce côté, préférant pour beaucoup des boss à votre taille ou presque. Cela enlève certes le côté grand spectacle, mais rajoute beaucoup au gameplay en transformant ces combats de David contre Goliath en duel d'égal à égal, nerveux et satisfaisants. Un parti pris qui pourra en contrarier certains, mais qui donne son identité à cette suite.
Nous pouvons aussi noter que les scènes cinématiques, aussi rares qu'elles soient, sont maintenant sous forme de dessins animés de grande qualité plutôt qu'en pixel art comme avant. Combiné aux couleurs plus chaudes et aux musiques plus dynamiques, on peut sentir que Blasphemous 2 s'éloigne quelque peu de son côté grunge, grotesque et violent. Même les exécutions des ennemis sont moins « métal » qu’auparavant. C'est dommage, mais l'impression reste que Blasphemous 2 est un jeu maîtrisé de bout en bout, et qui n'a pas perdu son côté sanglant par manque de créativité, mais plutôt par décision artistique. On aimera, ou pas.
Ce qu'on ne pourra qu'admirer, par contre, c'est bien le délicieux pixel art du jeu, qui nous montre encore une fois l'étendu des talents de l'équipe ! C'est simple, le jeu est magnifique, fluide, lisible, unique... Quand on pense qu'une petite équipe indé est capable de telles prouesses, il y a de quoi être admiratif. Les musiques sont également très réussies, beaucoup montrant fièrement leur héritage culturel et donnant une identité forte au titre. D'ailleurs, on ne saura que trop vous conseiller de jouer au jeu avec les doublages espagnols, qui ajouteront beaucoup à votre immersion, quand bien même vos cours de 4ème seraient loin derrière vous. Blasphemous 2 est un vrai petit bonbon pour vos yeux et vos oreilles !
