Annoncé en août dernier, Atelier Ryza Secret Trilogy Deluxe Pack arrive relativement peu de temps après la sortie des jeux d’origine — à peine six ans pour le premier Atelier Ryza. Gust et Koei Tecmo misent cette fois sur quelques améliorations graphiques ainsi qu’une belle dose de contenu bonus pour convaincre les fans de repasser à la caisse. Compte tenu de leur parution récente, il ne s’agira pas vraiment de juger si ces titres ont bien vieilli, mais plutôt de prendre du recul sur l’ensemble de la trilogie et de voir si les nouveautés proposées valent le détour.
Trois jeux sinon rien !
Atelier Ryza marque un tournant dans la série, avec un pic de ventes impressionnant et un accueil critique solide pour une franchise considérée comme outsider. Les qualités habituelles de la série (proposition originale, rythme plus posé laissant place à des tranches de vie, galerie de personnages attachants), soutenus par une direction artistique renouvelée, ont largement contribué à un succès mérité.
Dans la trilogie Atelier Ryza, le joueur incarne Reisalin « Ryza » Stout, une jeune fille vivant paisiblement à la ferme de ses parents sur l’île de Kurken. Sa vie bascule lorsqu’une expédition improvisée avec ses amis la conduit à rencontrer un alchimiste, qui l’initiera à cet art mystérieux. Dès lors, la série suit les aventures de Ryza à travers trois environnements distincts : l’île de Kurken dans le premier volet, la capitale Ashra-am Baird dans le second, puis l’archipel de Kark dans le troisième.
La formule reste globalement la même : exploration, quêtes, discussions entre amis, et mystères à élucider. Loin du cliché de JRPG où une bande de gamin partant sauver le monde d’une apocalypse imminente se retrouve à affronter des demi-dieux au bout de 10 heures de jeu, Atelier Ryza préfère un cadre plus intime et chaleureux, centré sur la vie quotidienne et les petits plaisirs de la découverte. Certes, si vous n’êtes pas amateur de « tranches de vie », le rythme tranquille pourra rebuter, mais c’est ce ton plus posé et réconfortant qui fait tout le charme singulier de la série.
Côté rythme justement, la série prend son temps, tant dans son gameplay que dans sa narration. Aucun tutoriel interminable ici : les mécaniques s’introduisent naturellement au fil de la progression. Par exemple, l’alchimie, cœur du système de jeu, ne se dévoile qu’après une bonne heure d’aventure dans le premier épisode.
Un RPG au rythme savamment dosé
Mais concrètement, en quoi consiste un Atelier Ryza ? Comme tout bon jeu de rôle, il s’agit de remplir des objectifs, d’accomplir des quêtes et de faire progresser l’histoire. Toutefois, le combat n’est pas le centre d’attention : il remplit sa fonction, mais l’essentiel du gameplay repose sur la récolte de matériaux et la synthèse d’objets via l’alchimie.
Ryza, en tant qu’alchimiste, peut créer toutes sortes d’objets: des matériaux de construction aux armes et équipements. Pour cela, elle utilise un système de recettes prenant la forme d’un arbre de compétences, où chaque case représente un ingrédient ou un effet possible. Il faut y placer les bons éléments pour réussir la synthèse, tout en ajoutant des ingrédients optionnels afin de débloquer de nouvelles propriétés ou branches de création. Le nombre d’actions étant limité, l’objectif est de produire la meilleure combinaison possible en optimisant le coût et la qualité des ressources. Les propriétés obtenues peuvent aller d’un bonus élémentaire à une augmentation du prix de revient
Il est possible d’améliorer la qualité des synthèses, afin d’en renforcer les effets et d’obtenir des propriétés supplémentaires. Les recettes, quant à elles, se débloquent progressivement au fil de l’aventure, mais aussi en réussissant certaines combinaisons, ou en faisant monter le niveau d’alchimie de Ryza — un niveau qui augmente tout simplement en pratiquant la synthèse.
Pour cela, il faut bien sûr récolter des ingrédients dans les différentes zones d’exploration. Certains se trouvent librement dans la nature, d’autres nécessitent un outil spécifique pour être extraits, et quelques-uns ne s’obtiennent qu’en vainquant des ennemis. Une fois l’inventaire plein, on retourne à l’atelier pour faire sa popotte. Suivre uniquement la trame principale permet d’éviter tout ce pan de gameplay, certes, mais ce serait passer à côté d’une grande partie du charme du jeu. Les synthétisations sont très utiles, comme les objets utilisables en combat, les pièces d’équipement ou les objets de soin, mais d’autres servent à terminer des quêtes secondaires fort sympathiques, et servant à approfondir un peu l’univers du jeu.
Le système d’alchimie se révèle extrêmement satisfaisant et gratifiant. On débloque sans cesse de nouvelles recettes simplement en expérimentant ou en gagnant de l’expérience, ce qui rend la progression fluide et naturelle. Une option permet bien d’automatiser les synthèses — pratique pour les joueurs pressés — mais la mécanique est tellement plaisante et addictive qu’on prend rarement la peine d’y recourir.
C’est clairement dans ce domaine que Atelier Ryza excelle. L’alchimie pousse à explorer en profondeur chaque zone traversée. Les points de récolte, signalés par une surbrillance pas toujours très discrète, sont nombreux et variés, et il y a toujours de quoi faire. La diversité des environnements participe aussi à ce plaisir : entre les paysages enchanteurs du premier jeu, les ruines du second et les vastes zones ouvertes du troisième, on profite pleinement de décors réussis et inspirés. Grâce à des couleurs vibrantes et une direction artistique cohérente, les paysages dégagent la même impression de dépaysement chaleureux que le reste de la trilogie.
Mais attention : sous leurs airs idylliques, ces décors peuvent se révéler dangereux. Les zones sont peuplées de créatures parfois redoutables, l’occasion de s’essayer à un système de combat qui se démarque des habituels tour-par-tour figés. Inspiré d’un mélange entre Grandia et le système ATB de Final Fantasy, le combat repose sur une gestion du temps d’action : chaque personnage doit attendre que sa jauge soit pleine avant d’agir (attaque, compétence, objet, etc.). La subtilité vient de la jauge d’AP partagée entre les membres de l’équipe, qui se remplit à mesure que l’on attaque. Ces points servent à lancer des compétences ou à augmenter le niveau tactique du groupe, permettant ainsi d’enchaîner des enchaînements de plus en plus conséquents.
L’élément le plus particulier est l’utilisation des objets: plutôt que d’en faire de simple consommable, le jeu vous donne la possibilité d’assigner une sélection d’objet à votre personnage, qu’il sera possible d’utiliser plusieurs fois en combat tant que la jauge de Core Charge n’est pas vide. Il faut bien sûr faire attention à ne pas tomber en panne juste avant d’affronter un adversaire retors, mais au moins, on ne passe pas son temps à faire des provisions pour nos expéditions.
Le système de combat n’a jamais été le point central des jeux Atelier, mais dans la trilogie Atelier Ryza, il remplit parfaitement son rôle sans jamais devenir une corvée. On ne contrôle qu’un personnage à la fois, mais il est possible de changer à la volée en plein affrontement. La difficulté plutôt clémente permet d’ailleurs de laisser l’intelligence artificielle de ses compagnons gérer les combats sans trop de risques.
Toute une cargaison de contenu supplémentaire
Passons maintenant à ce qui nous intéresse aujourd'hui : le fameux suffixe « DX ». Que cache-t-il ? Tout simplement du contenu supplémentaire. On y retrouve l’intégralité des DLC des versions d’origine, mais aussi quelques nouveautés inédites plutôt bienvenues. Chaque jeu s’enrichit d’un scénario additionnel (deux pour le premier opus), d’une nouvelle carte (sauf pour le premier) et de personnages jouables inédits.
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Le premier Ryza propose une aventure intermédiaire située entre les deux premiers épisodes, ainsi qu’une histoire parallèle centrée sur Kilo et Bos.
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Le deuxième offre une quête d’exploration d’un laboratoire souterrain, aux côtés d’Empel et Lila.
- Le troisième permet de partir à la découverte d’une île inédite avec Clifford et Serri.
Ces scénarios, comme les DLC du tout premier jeu, restent plutôt courts et non indispensables à la compréhension globale, mais ils se dégustent avec plaisir et prolongent agréablement l’expérience.
Du côté des améliorations techniques, on note plusieurs ajustements de qualité de vie : capacité d’inventaire augmentée, éléments d'interface ajoutés et quelques options graphiques supplémentaires. Rien de révolutionnaire, mais des ajouts appréciables. En revanche, ceux qui espéraient des performances améliorées risquent d’être déçus. Que ce soit sur Switch 1 ou Switch 2, le jeu reste limité à 30 images par seconde et à une résolution maximale de 1080p. La version Switch 2 souffre toujours de problèmes de popping, tandis que les textures et modèles 3D demeurent assez grossiers. Même si les versions Switch et Switch 2 sont au même prix, après près de six mois d’existence de la console, on aurait pu s’attendre à une version un peu plus aboutie sur cette dernière. C’est regrettable, car une simple hausse du framerate aurait suffi à donner à cette édition DX un sacré atout.
Enfin, côté localisation, aucune surprise : seul le deuxième épisode profite d’une traduction française. Un choix d’autant plus frustrant que les nouveaux scénarios bénéficient d’un vrai soin d’écriture. On ne peut s’empêcher de regretter que Koei Tecmo et Gust n’aient pas fait l’effort d’offrir à l’ensemble du public la possibilité de découvrir cette trilogie dans les meilleures conditions possibles.

