Décidément, il semble que les anges aiment se faire attendre. Après 21 ans d'absence depuis son dernier périple, Pit était enfin de retour sur nos 3DS et pour le plus grand plaisir de tous. Malheureusement, il aura fallu attendre encore de longs mois avant de pouvoir poser nos mains sur la nouvelle aventure divine de l'ange, chapeautée par Masahiro Sakurai à qui l'on doit Kirby et Super Smash Bros. Une telle attente en valait-elle la peine ? Ailes déployées et arme à la main, Pit nous apporte la réponse de la plus belle manière, épaulé par la majestueuse Palutena.
On prend les mêmes et on recommence ! Cela fait 25 ans que Pit a triomphé de Medusa et que la paix est revenue dans le Royaume des Cieux. Mais comme tout bon ennemi qui se respecte chez Nintendo, ce n'est jamais vraiment terminé. Cette dernière n'a pas dit son dernier mot et, après avoir récupéré des forces, envoie l'armée des Enfers pour s'approprier les cieux de la Déesse. Il n'en faut pas plus à cette dernière pour envoyer son meilleur élément, le fier Pit, pour réprimander le Mal à nouveau, armé cette fois plus que d'un simple arc. C'est d'ailleurs le plus gros attrait du jeu, proposer au joueur un contenu à en pleurer. Cette fois, c'est parmi 9 classes d'armes qu'il vous faudra choisir (bâtons, lames, griffes, arcs, mains, massues, canons, satellites et bras), chacune ayant sa particularité. Les arcs, par exemple, sont de très bons choix pour les combats à distance et ont une grande portée mais les rafales ne sont pas leur point fort de même que les combats au corps à corps, alors que les Lames se révèlent être les plus équilibrées. Il faudra donc trouver le meilleur compromis selon votre façon de jouer, en déterminant si vous êtes plus rentre-dedans ou tout en finesse. Un choix qui doit s'avérer judicieux car comme beaucoup le savent, l'aventure ne se passera pas que dans les Cieux mais aussi à terre. Pit étant un ange qui ne peut voler de lui-même, il doit s'aider du pouvoir de Palutena pour pouvoir virevolter durant 5 minutes maximum avant que ses ailes ne brûlent. On commence donc chaque chapitre par une phase de vol en shoot'em up avant de passer au sol pour la partie aventure/action. Grâce à cette dualité des chapitres, on a presque l'impression de jouer à deux jeux différents, ce qui empêche une quelconque monotonie qui pourrait finir par s'installer. Ici, Masahiro Sakurai a décidé de ne laisser au joueur aucun temps mort, les phases en ciel étant exigeantes, surprenantes et surtout très bien mises en scène, alors que les phases au sol permettent un côté exploration plus poussé et des tactiques plus évidentes à mettre en place. Cerise sur le gâteau, un boss viendra pimenter le tout à chaque fin de chapitre, ces derniers étant toujours délicieux à affronter, de par leurs charismes, leurs designs et la façon de les affronter.
Mais ce qui se remarque de suite, dès les premières minutes de jeu, c'est le soin apporté à l'univers et surtout au scénario et dialogues. Ces derniers sont tout simplement savoureux, on enchaîne les blagues à une allure folle sans redite, les jeux de mots, les clins d'oeil à d'autres productions Nintendo et au Kid Icarus originel mais aussi des références tout autre, on notera par exemple Wikipédia, Star Wars et même la crise économique actuelle. C'est bien simple, en profitant des répliques des personnages, on a l'impression que Pit essaye de retracer ses 25 ans d'absence et autant de références manquées. Tous les dialogues sont d'ailleurs doublés en anglais et sont réellement réussis. On sent les doubleurs entièrement impliqués dans l'aventure, toujours le ton juste en fonction des situations ce qui apporte une réelle crédibilité aux personnages et un côté attachant indéniable, même pour vos ennemis. D'ailleurs, si le scénario commence sur des bases on ne peut plus basiques, attendez-vous à aller de surprise en surprise, l'histoire prenant un tournant tout à fait inattendu et se permettant toutes les folies possibles pour nous offrir du rebondissement en pagaille. C'est un réel plaisir que d'aider Pit à travers sa quête, on a toujours envie d'aller plus loin pour connaître le fin mot de l'histoire. Il est vrai que la firme n'a jamais vraiment brillé pour ses scénarios et on aurait pu s'attendre à une bête confrontation Palutena contre Medusa mais c'est là que Sakurai est entré en jeu. L'influence du bonhomme se sent de l'écran titre aux crédits de fin de Kid Icarus : Uprising. Les menus ont ce design et ce côté pratique emprunté à Super Smash Bros. Brawl, tandis que le contenu montre une nouvelle fois l'ambition démesurée de son créateur.
Alors que l'aventure solo vous tiendra en haleine un peu plus de 10 heures (selon la difficulté empruntée), le jeu offre une rejouabilité exemplaire grâce à son très bon concept de difficulté. Ici, c'est vous qui choisissez avec un degré hallucinant de précision votre challenge, plus vous pariez de coeurs (récoltés en éliminant vos ennemis), plus la difficulté sera élevée mais les récompenses importantes. On se prendra donc à refaire tous les chapitres avec une difficulté variable, celle-ci offrant parfois un petit chemin alternatif au sein des niveaux. Et si le mode aventure ne vous suffit pas, vous pourrez compter sur une foule d'à côté. On notera par exemple la Chasse aux trésors, basée sur un système proche des succès. Il vous faudra réussir certaines conditions (obtenir 50 armes différentes, finir tel chapitre en tant de temps, éliminer 3000 ennemis etc.) et une fois le défi remporté un trésor vous est offert mais ce n'est pas le plus impressionnant. Il y a au total trois Chasses au trésors, chacune étant modélisée sous forme d'un tableau à découvrir. Chaque succès déverrouillé vous montrera un morceau de l'image et quand on sait qu'il y a un total de 360 défis à relever qui peuvent s'avérer peu évidents pour certains, les joueurs les plus déterminés prendront de longues heures supplémentaires pour tout débloquer et ce n'est qu'un des modes supplémentaires ! On peut également aborder la fusion des armes, qui vous permet d'en créer de nouvelles ayant leurs propres propriétés. Il y a également un système de Dons. Dans un carré personnalisable, les dons récoltés durant l'aventure et représentés sous des formes de pièces Tetris vous offriront des capacités supplémentaires (sauter, se régénérer, avoir une protection supplémentaire etc.) pour peu que vous réussissiez à en caser le maximum dans le carré de base. S'en suit donc une réelle partie de casse-tête, où il vous faudra tourner les pièces pour essayer de ne laisser aucun vide et ainsi profiter du plus de bonus possible. Le lancer d'Icaron est la dernière option du mode solo, ce petit jeu s'avère être une sorte de loterie semblable à celle connue dans Super Smash Bros. Melee. Plus vous jouerez en solo, plus vous récolterez d'oeufs qu'il vous faudra lancer en l'air pour débloquer des Icarons. Ce sont des représentations des personnages, ennemis et objets du jeu qui vous en apprendront plus sur eux, une sorte d'encyclopédie. Plus vous en débloquez, plus votre pourcentage de chance d'avoir de nouveaux Icarons baisse, il vous faudra donc mettre plusieurs oeufs en même temps pour espérer débloquer les derniers (contre des pièces dans Melee). Sinon, vous pouvez vous offrir des oeufs grâce aux pièces récoltées en marchant avec la console, une petite feature bien sympa que l'on aimerait plus courante dans d'autres titres de la firme.
Le StreetPass est également de la partie et vous pourrez échanger des pierres d'armes avec d'autres détenteurs du titre. Ces dernières contiennent, comme leur nom l'indique, une arme à récolter mais vous pouvez également fusionner des pierres pour des résultats plus originaux. Un principe sympathique donc, même si pas poussé dans ses derniers retranchements. Mais l'autre grosse partie du jeu ne se trouve de toute manière pas ici, mais dans son mode multijoueur local et online. Non content de proposer une aventure solo très riche, on nous offre en prime la possibilité de se castagner contre ses amis ou des joueurs du monde entier et ce dans deux modes différents. Le premier s'intitule Lumière Vs Ténèbres, une fois assigné à une équipe, vous devrez affronter vos opposants, chaque équipe étant composée de trois joueurs et c'est partie pour la baston ! Le level design des stages est plutôt réussi, ce qui permet d'essayer de se la jouer stratégique, même si le côté bourrin l'emporte un peu trop souvent. Une barre de vie liée à l'équipe est visible en haut de l'écran, chaque mort la descendra un peu jusqu'à ce qu'elle soit vide. Alors, Pit (ou Dark Pit selon l'équipe) apparaît (jouable par un des joueurs), le premier qui arrive à exterminer l'ange de l'autre à gagner. Un concept donc très sympathique et qui peut vite tourner à votre avantage, puisque les dons et armes récoltées en solo peuvent être utilisés en multijoueur, une raison de plus qui poussera les joueurs à fouiner le moindre trésor et à switcher entre le solo et le online. Le deuxième mode est un simple Chacun pour soi, vous serez donc livrés à vous-mêmes face à 5 autres joueurs. La tactique est de mise si vous voulez vous en sortir vainqueur mais la chance n'y sera pas pour rien non plus. Quasiment aucun lag n'a été rencontré durant les multiples parties effectuées, ce qui rend le multijoueur vraiment intéressant et qui prolongera sans mal l'aventure solo. Vous pensiez avoir fait le tour du contenu du jeu à présent ? Et bien détrompez-vous ! Nous n'avons pas encore abordé les cartes de Réalité Augmentée. Principe beaucoup mis en avant lors de l'annonce de la console, on ne l'a pour ainsi dire plus revu depuis les quelques cartes offertes avec la 3DS. On est donc content de voir que Kid Icarus propose dans son bundle un pack de 6 cartes parmi plus de 300 au total à récolter. Ces dernières s'avèrent en revanche peu originales, une fois le mode activé et la carte mise sur votre bureau, les personnages apparaitront à l'écran, ni plus ni moins (cela vous offrira 100 coeurs pour chaque nouvelle carte découverte, les coeurs étant la monnaie du jeu). Vous aurez bien sûr la possibilité de faire affronter ces cartes en leur faisant faire face mais nous ne sommes que spectacteurs, limitant donc fatalement l'intérêt de ces combats. Un principe plus poussé aurait été plus judicieux, en l'état cela ne restera qu'un gadget sur lequel on ne reviendra pas forcément.
Kid Icarus : Uprising est définitivement le jeu le plus riche de la 3DS et risque de le rester pendant un long moment (peut-être même jusqu'à la sortie de Super Smash Bros. 3D, qui viendra aussi du même développeur), mais qu'en est-il du reste ? Graphiquement, le jeu est magnifique. La patte artistique est sublimée par des animations géniales, une superbe association des couleurs et un design des environnements (et surtout des Cieux) à tomber et tout ça au service d'un effet 3D réussi qui nous plonge directement dans l'aventure. Certes, l'aliasing est présent mais devant un tel festival de beauté, difficile de lui en tenir rigueur. De même sur le plan sonore, outre les doublages de très bonne facture, Nintendo a eu la bonne idée de mettre des grands noms de la composition au travail, tel Sakuraba (Tales Of, Baten Kaitos), Mitsuda (Chrono Trigger, Xenogears), Takada (No More Heroes 1 & 2), bref des gens qui connaissent leur métier. En ressort une OST grandiose, un plaisir pour les oreilles de bout en bout, chaque compositeur apportant son talent et sa sensibilité pour plus de diversité. Alors, ce Kid Icarus : Uprising est donc parfait ? On aurait aimé pouvoir le crier sur tous les toits, malheureusement il va falloir noter quelques petits soucis pour la fin. Le gameplay du jeu, le grand méchant loup de beaucoup de joueurs à travers le monde. Si celui-ci a bien évolué par rapport aux premières copies, on ne peut que ressentir l'absence de compatibilité avec le Circle Pad Pro, obligeant même Nintendo à fournir un socle avec le jeu. Ce dernier est plutôt bien foutu mais ne fera pas oublier le manque d'ergonomie pour certaines phases, notamment celles au sol où l'on doit entièrement diriger Pit. Rappelons que vous dirigez l'ange avec le Circle Pad, visez avec l'écran tactile et tirez avec la gâchette L, une gymnastique pas forcément évidente pour tous. Les Dash, qui permettent d'esquiver les tirs ennemis lors des phases au sol et qui se font en effectuant un coup sec avec le Circle Pad, sont souvent difficiles à sortir car notre deuxième main ne tenant pas la console, l'équilibre est souvent trop faible. Après de longues sessions de jeu et des chapitres de fin qui ne laissent pas une seule seconde de répit, on ressent un certain inconfort aux mains et c'est bien dommage car notre ami Pit partait pour le sans faute. Ce trop plein d'action est d'ailleurs la bête noire des dialogues anglais, sous-titrés chez-nous. Le jeu demande une telle concentration de tous les instants qu'il est bien difficile de dévier son regard de l'écran principal, ne serait-ce que trois secondes, sans se faire tirer comme un lapin. On ratera donc quelques excellentes répliques et plus handicapant, quelques explications sur l'histoire. Un doublage français aurait donc dû être envisagé par la firme même si l'on conçoit qu'avec une telle dose de textes à doubler, le jeu ne serait sûrement pas sorti à la même date en Europe.
Quoiqu'il en soit et même si ces défauts sont bien présents et qu'il faut les souligner, ils seront bien peu de choses une fois arrivés aux crédits de fin, après avoir vécu une aventure si épique, si originale et surtout si ambitieuse pour un titre portable. Masahiro Sakurai et son équipe ont travaillé comme des forcenés pour offrir à Pit des ailes flambant neuves et malgré le petit soucis de jouabilité, on ne peut que dire chapeau l'artiste devant un tel contenu, une telle finition, un tel soucis du joueur et du détail. Pit est définitivement revenu sur le devant de la scène et il risque bien de ne plus la quitter, volant dès à présent vers la future console de salon de Nintendo.