Nintendo Switch

La Parole aux Dév's - Blanc de Casus Ludi

Par babidu - Le 22/02/2023 à 10:00

Blanc est un jeu indépendant français développé par les Nantais de chez Casus Ludi. Dans ce jeu coopératif, un louveteau et un faon livrés à eux-mêmes dans le froid glacial de l'hiver doivent coopérer pour retrouver leurs familles respectives. Ce conte vidéoludique intégralement en noir et blanc et d'une beauté folle a su nous taper dans l'œil. Nous avons donc demandé à Florent de Grissac, game designer au sein de Casus Ludi et à Rémi Gourrierec, directeur créatif sur le jeu de répondre à quelques-unes de nos questions. Blanc est dès à présent disponible au prix de 14,99€ sur L'eShop de la Nintendo Switch.

Cet entretien eut lieu par questions-réponses interposées via des mails. Voici l'intégralité de celui-ci : 

Casus Ludi est un studio qui se démarque des autres studios de développement en portant des ambitions plutôt inédites pour le média vidéoludique. Comment s'est fondé le studio ?

Florent : Casus Ludi a débuté il y a bientôt neuf ans par des rencontres. Lors de game jams que j’organisais, j’ai eu l’occasion de découvrir et de faire se rencontrer Pierre Chabiland, programmeur, et Bastien Kerspern, designer d’interactions et de politiques publiques. Nous avons, au fil du temps découvert que nos envies d’expérimentations autour du jeu pouvaient se rejoindre. Nous avons fait quelques tests ensemble puis finalement nous avons structuré ça en un studio. Au début, nous voulions surtout explorer le newsgame, mais l’activité s’est organiquement diversifiée pour finalement se définir par la « médiation par le jeu ». C’est aujourd’hui ce que fait le studio, utiliser le jeu auprès de clients institutionnels comme privés pour interroger, sensibiliser, faire comprendre… Le tout en s’attachant à des valeurs progressistes et sociales. Finalement, la production d’un jeu vidéo grand public tel que Blanc n’est venue que par opportunité.

Blanc est-il le parfait reflet des valeurs que vous défendez ? À savoir le ludisme au service de l'enseignement des bienfaits de la coopération et de l'amitié.

Florent : Je ne pense pas qu’il y ait de parfait reflet, mais Blanc s’inscrit certainement dans le sens des valeurs que nous défendons. Ce n’est cependant pas un jeu militant, nous avons juste pris soin de ne pas nous contredire à travers ce jeu. L’industrie du jeu est encore aujourd’hui assez stéréotypée, notamment sur des concepts de compétition et d’affrontement, d’adversité et de violence, même si heureusement le champ des sujets et de leur traitement s’améliore grandement avec le temps (cependant souvent cantonné à la sphère indépendante). Nous ne luttons pas d’ailleurs contre ces types de gameplay compétitifs, mais nous souhaitons juste faire partie de celles et ceux qui apportent un peu de diversité dans le paysage.

Blanc semble être le digne héritier de Journey pour son accessibilité sans borne grâce à l'absence de texte. Avez-vous d'autres inspirations ?

Rémi : Journey et sa capacité à faire jouer des personnes peu habituées aux jeux vidéo tout en satisfaisant les plus expérimentés est effectivement une source d’inspiration évidente. Brothers l’a été aussi, notamment pour l’évolution du gameplay de coopération en réponse à la narration.
À titre personnel, A Short Hike est un jeu dont les choix en termes d’ambiance, de rythme et de mise en scène me sont restés beaucoup en tête pendant la production. Il réussit à amener beaucoup de subtilité dans une apparente simplicité.

Florent : Les inspirations sont multiples, mais oui, Journey en est une importante. On peut également citer Brothers: A Tale of Two Sons ou Shelter. Côté cinéma on peut évidemment citer Rox et Rouky pour l’antagonisme du duo. Mais ces sources d’inspirations sont venues au fur et à mesure que le projet se définissait, pour venir illustrer les directions que nous choisissions, et non pas comme des points de départ de l’inspiration.

L'aventure étant pensée pour être jouée à deux, faudra-t-il faire l'aventure deux fois en inter-changeant entre le louveteau et le faon pour véritablement découvrir tout ce que Blanc a à nous offrir ?

Rémi : Nous voyons la même chose à l’écran quel que soit notre personnage, l’aventure n’est donc pas fondamentalement nouvelle en rejouant avec l’autre animal. Mais une nouvelle partie vous permettra d’intervenir à d’autres moments, sur d’autres passages et de découvrir ce que vous auriez pu manquer lorsque vous étiez concentré sur votre personnage.
Nous avons aussi en tête que cela permet aux personnes ayant envie de faire découvrir le jeu autour d’eux de relancer une partie avec un nouveau binôme, tout en ayant une approche différente de l’expérience.
Une partie des joueurs appréciera aussi sûrement particulièrement de pouvoir jouer en mode solo pour de nouvelles parties. Dans ce mode, on contrôle les deux personnages avec une seule manette, c’est un peu plus complexe en termes de manipulation, mais permet aussi de vivre l’aventure à son propre rythme.

Florent : Dans la mesure où il n'y a pas de séparation d'écran, les deux personnages, et donc les deux personnes qui jouent, vivent la même aventure. Donc pas besoin de refaire le jeu en changeant de personnage, sinon, et on l’espère, pour le plaisir de refaire l'aventure, notamment de la partager avec d’autre personnes.

Comment-avez vous trouvé la patte graphique si adorable de Blanc ? A-t-il toujours été convenu de réaliser un jeu intégralement en noir et blanc ?

Rémi : Blanc a été d’abord un jeu de game jam, des événements où l’on réalise un petit jeu complet en équipe sur un seul week-end.
Cette direction artistique découle donc beaucoup de l’intégration dans notre équipe de Raphaël Beuchot, un auteur de BD et illustrateur avec qui j’ai déjà beaucoup travaillé par ailleurs. Il réalisait pendant cette période une série d’illustrations personnelles en noir et blanc avec beaucoup de grain, de hachures et de texture. Sans même savoir ce qu’on allait faire comme jeu, il y avait déjà cette envie dans l’équipe d’aller amener ce style dans le projet. Le jeu original de game jam que nous avons finalement créé n’allait pas encore aussi loin dans cette direction, mais nous permis de poser les intentions notamment du tout noir et blanc et de la sensation de dessin dans un monde 3D.
Lorsque l’on a décidé ensuite de partir dans la production d’un jeu complet, la direction artistique finale s’est définie en essayant de trouver le juste équilibre entre cette chaleur du dessin et notre capacité à l’ajuster à un environnement et des personnages tout en 3D. Ce n’est pas une traduction directe des illustrations originales, mais les textures des objets ou du ciel ont par exemple toutes été réalisées sur papier par l’illustrateur lui-même et intégré sur les modélisations.

Florent : L'idée du noir et blanc est en effet arrivée très tôt puisqu'elle vient de la volonté de Raphaël Beuchot de travailler cette technique simple du stylo sur papier. Il est illustrateur et auteur de bande dessinée et donc habitué de différentes techniques. Mais là, quand il a été convié à participer à la game jam où est né Blanc par Rémi Gourrierec, il avait envie de changer de son quotidien de travail et d’être dans un style plus personnel. Notre interprétation de la thématique de la game jam qui s'est traduite par un jeu présentant un monde enneigé n'a fait que renforcer la pertinence de ce choix, qui a lui ensuite eut un impact sur le choix des protagonistes et de certains aspects de la narration. Mais donc, cela reste une décision liée à cette participation à une game jam, pas un projet initial de faire un jeu commercial en noir et blanc.

Pour rappel, Blanc est disponible sur l'eShop de la Nintendo Switch au prix de 14,99 euros.