La série Shin Megami Tensei est bien plus longue et ancienne qu'on ne le pense. Même si elle a connu un gain de popularité grâce à la sous-série Persona, les fans des RPG ATLUS ont beaucoup d'autres jeux à se mettre sous la dents, et Raidou, un jeu PS2 remastérisé récemment, est le dernier en date, et il tranche avec l'habituel tour par tour des Shin Megaten.
Test réalisé grâce à une version fournie par l'éditeur
Test de la version Switch 1 du jeu sur une console Switch 2
Les démons en action !
Vous êtes Raidou Kuzunoha, le quatorzième du nom pour être précis, un invocateur de démons talentueux tout juste sorti d'une formation létale a qui la raterait. Dépêché par l'association Yatagarasu afin de veiller depuis les ombres sur le Japon, vous faites équipe avec un détective privé de Tokyo afin d'empêcher le monde des ombres d'empiéter sur celui de la lumière. Une tâche faite dans l'ombre pour laquelle personne ne vous remerciera. On ne se souviendra certainement pas de votre nom en tout cas. Pas dans la lumière. Et le jour où une jeune femme d'une famille influente disparaît après avoir tenté de vous contacter, enlevée par une armée de soldats robotiques, c'est tout Tokyo qui menace de sombrer. A vous de déjouer un complot qui va plus loin qu'on ne pourrait le soupçonner.
Raidou and the Mystery of the Soulless Army est un RPG d'action dans lequel vous enquêter dans le Tokyo des années 1920, l'ère Taisho. Vous vous baladerez sur quatre types de cartes : la ville, où des quêtes secondaires et des PNJS abondent, la ville sombre, où les démons prennent possession des rues, les donjons et la carte de simplifiée du grand Tokyo. Si vous croisez un démon hostile, un combat en arène fermée se lance, et vous devrez triompher de vos adversaires en enchaînant attaques et esquives. Puisque vous êtes un invocateur de démons, vous pourrez avoir des alliés recrutés avec vous, qui agiront indépendamment et peuvent être changés si besoin. Durant ces combats, vous pouvez lancer diverses attaques, physiques ou magiques, esquiver, bloquer, et déclencher des compétences spéciales si votre timing est bon. Un système qui change du tour par tour habituel de la grande série Shin Megaten, mais qui en garde les racines : les noms des sorts et démons vous seront familiers si vous avez joué à un Persona, par exemple.
Lors des combats, vous et vos démons partagez la même jauge de magie. Il vous appartient donc de la remplir en lançant des attaques faibles, qui la recharge à défaut de faire des dégâts, afin que vos troupes puissent lancer leurs meilleures attaques ou même vous soigner. Un côté gestion de ressources assez frénétique et divertissant. Mais vous ne ferez pas que ça ! Vous aussi devez combattre, et Raidou est très compétent. Il possède une arme à feu qui paralyse les petits démons qui voudraient s'échapper, des sorts afin d'exploiter des faiblesses, des coups spéciaux, et il peut changer de démons invoqués pour s'adapter aux circonstances. Autant dire que vous avez peu de chances de vous ennuyer en combat. Et si vous êtes d'un niveau supérieur à un démon, vous pourrez même tenter de le dominer et de le recruter dans votre équipe.
Cœur de démon
Les démons sont d'ailleurs la clé de voûte de vôtre équipe, comme dans un Shin Megaten classique : ce sont eux qui feront que vous pourrez vous adapter à n'importe quelle situation. Ils prennent également des niveaux rapidement et sont une puissance de frappe non-négligeable. Dans ce jeu, frapper un ennemi avec un coup auquel il est faible (grâce au système classique de faiblesses élémentaires) le paralyse quelques secondes, ce qui est une très bonne opportunité de regagner quelques points de magie, de vous soigner, ou juste de l'enchaîner afin qu'il regrette ses actes répréhensibles. Et Raidou ne peut pas couvrir toutes les faiblesses, alors une équipe variée sera votre salut. Vous pourrez également rappeler les démons à vous afin de les protéger si besoin, alors gardez un œil sur le champ de bataille.
Mais les démons vous servent également en dehors des combats. En effet, chaque « famille » de démons possède des compétences de terrain qui vous seront utiles lors de votre enquête : ils peuvent changer l'état d'esprit des gens, lire dans les pensées, voir même voler ou trouver des objets cachés. Ainsi, les démons ne sont pas qu'un gimmick sympa mais véritablement le cœur du jeu. Si un démon devient trop faible, vous pourrez en fusionner ensemble afin d’obtenir des démons de plus haut niveau, plus terribles, et pourquoi pas en faire la collection ? Si les démons de début de jeu sont modestes, vous aurez rapidement accès à des collègues colossaux que vous aurez d’ailleurs affronté en tant que boss la plupart du temps. Et quoi de plus classe que de parcourir Tokyo avec votre pote Satan ? Ouais, ça c'est la classe !
Ainsi accompagné, vous pourrez résoudre les quêtes secondaires du jeu, qui consistent souvent à aller chercher un objet et à la rapporter, où à avoir le bon démon avec soi. Toutefois, les objectifs ne sont pas toujours marqués sur la carte alors vous devrez quand même ouvrir l’œil et lire les dialogues. De nombreux portails démoniaques seront également à fermer ici et là dans la ville, portails qui vous donneront un immense bonus d'expérience et de respect. Mais qu'est-ce que le respect ? C'est votre deuxième jauge d'expérience : quand vous utilisez un démon, son respect monte. Monter votre respect total au-dessus d'un certain seuil et Yatagarasu vous récompensera en vous permettant d'avoir plus de démons avec vous par exemple. Ce système vous pousse à régulièrement changer d'équipe, car un démon au respect au maximum n'en générera plus. C'est un crève cœur, mais il faudra dire au revoir à vos compagnons adorés un jour.
Une époque troublée
On pourrait reprocher à Raidou un déroulement très haché : les quartiers de la ville sont petits et séparés par une carte pas toujours pratique, l'accès au monde sombre ne se fait que d'un seul endroit, les donjons sont presque coupés du monde et même la carte de la ville est segmentée et vous demande de payer le tram pour vous déplacer. On sent bien les limitations d'un jeu PS2 remis au goût du jour de temps en temps, même si certains ajouts de confort viennent tenter d'arranger la situation, comme un système de voyage rapide, une souplesse sur le recrutement des démons et même une sauvegarde automatique. En parlant de celle-ci, subir un game Over enclenchera une scène cinématique très drôle ou Raidou se fait enguirlander par ses prédécesseurs, le pauvre. Vite, chargez cette sauvegarde !
L'esthétique du jeu est elle aussi un peu vieillotte, avec ses PNJs qui se répètent et ses environnements peu variés, mais une forte ambiance et une direction artistique remarquable nous font passer outre ces considérations. Ce n'est pas souvent qu'on voit le Japon de l'ère Taisho, où la tradition et l'influence de l'occident s'opposent partout dans le pays, et c'est un cadre rafraîchissant et bienvenu, surtout pour les férus d'histoire. Le style graphique est également frappant grâce aux designs si forts de Kaneko Kazuma pour les démons comme pour les humains. A la musique, Shoji Meguro nous livre une bande-son géniale, encore une fois, qui lorgne plus du côté de Persona que de la série principale Shin Megami Tensei, mais qui est funky en diable et toujours un délice à écouter.
Niveau performance, il n'y a pas de ralentissements ou de temps de chargement à déplorer, et on appréciera que le titre ait une traduction française intégrale de grande qualité. On pourra regretter le choix de SEGA de ne pas offrir un upgrade Switch 2 à bas prix, ou que le jeu soit une carte-clé, ou des DLC bien trop chers pour ce qu'ils proposent, mais rien qui ne saurait distraire d'un cœur de jeu solide, amusant, et avec un scénario proposant un mystère inédit et très prenant dans un cadre si inhabituel. Et comme ça, on comprend enfin toutes les références à Kuzunoha planquées dans les titres ATLUS. C'est pas rien ! Regardez bien il y a en tellement !