Quand Capcom annonce une nouvelle série Mega Man? en l'an 2000, les fans ont de quoi être méfiant. Il faut dire que les derniers opus ne sont pas à la hauteur des attentes placées en eux, les jeux de plateforme iconiques de la série ayant beaucoup de mal à se réinventer, voire à s'adapter aux nouvelles consoles du marché. Ce qui fonctionnait bien sur 8 et 16 bits ne fonctionne plus trop sur 32 bits. Mais cette fois, les choses sont différentes : exit la plateforme, bonjour le tactical-rpg. Nombreux sont les joueurs stupéfaits par cette volte-face de chez Capcom, d'autant plus que c'est le producteur de toujours des Mega Man?, Keiji Inafune, qui est aux manettes de cette nouveauté.
Bien qu'ayant divisé les fans, tout en en créant une nouvelle communauté, Mega Man? Battle Network a réussi à se faire sa place au soleil, puisque 5 suites au premier opus ont vu le jour sur Game Boy Advance. Et cela fait désormais 17 ans que la série s'est terminée puisqu'aucun jeu de cette franchise n'a vu le jour depuis Mega Man? Battle Network 6. Capcom a jugé bon de nous rappeler que son petit héros bleu existait toujours en nous fournissant une compilation de 10 jeux issus des Battle Network, avec quelques nouveautés. Que vaut donc cette compilation, disponible depuis le 14 avril 2023 ?
Entre légèreté et côtés plus sombres.
Tout démarre à Dentech City, ville high tech dans laquelle tous les habitants possèdent un ordinateur portable appelé PET, qui comporte chacun une entité informatique humanoïde, les NetNavi. Ceux-ci sont capables de réaliser bon nombre de tâches dans le monde du Net, y compris celles de devoir affronter des NetNavi méchants ou plus généralement des virus qui viennent de temps à autre semer la zizanie. Vous incarnez Lan Hikari, un jeune habitant de cette ville dont le NetNavi n'est autre que Mega Man, avec lequel vous allez devoir veiller à ce que la paix des habitants de la ville ne soit pas troublée.
C'est sur cette base scénaristique que repose les 6 opus de la série des Battle Network, le principe du jeu étant de pouvoir vous connecter au monde virtuel via votre ordinateur ou alors via des appareils électroniques. Par exemple, dans le tout premier jeu, il faudra vous connecter au four de la maison familiale de Lan pour régler les problèmes d'incendie causées par des virus ayant fait irruption dans les circuits de ce dernier. Une entrée en la matière bien légère qui rempli à merveille son rôle d'introduction au jeu et à son système de combat. Les jeux sont découpés en journées dans lesquels vous devrez accomplir un certain nombre d'actions pour faire avancer le scénario principal pour passer au jour suivant.
Ainsi, libre à vous d'explorer la ville avec Lan, et les quelques lieux aux alentours, comme le centre de recherche scientifique dans lequel votre père travaille. Les problèmes ne tardent jamais trop à survenir et c'est à vous de vous connecter à la source électronique du problème pour y remédier, en dirigeant Mega Man cette fois. Plus on avance dans chaque scénario et plus on se rend compte que les problèmes sont délibérément provoqués par un groupuscule obscure, ayant tous des raisons diverses de vouloir semer le trouble au sein de la populace. On retrouve certains méchants emblématiques de la série des jeux de plateformes, et, rpg oblige, on les redécouvre avec plaisir car leurs personnalités et leurs backgrounds sont bien plus étoffés.
Ainsi, on passe de problèmes légers à des problèmes bien plus graves à résoudre. Peu à peu la tension monte progressivement, pour atteindre son maximum dans les derniers chapitres, avec parfois de véritables rebondissements dans les scenarii dignes des JRPG de l'époque. Les missions secondaires, introduites dès le second opus, permettent de souffler entre 2 gros chapitres de jeu, bien que certaines missions soient assez chronophages. Les jeux réussissent l'exploit de gagner en longévité d'un opus à l'autre, et chaque jeu peut se targuer d'introduire à chaque fois du changement dans son gameplay, ce qui contribue à ne pas se lasser d'un opus à l'autre.
Un système évolutif.
A l'instar de nombreux RPG, les combats sont très souvent aléatoires, seule la plupart des boss sont visibles à l'écran avant chaque combat. Vous dirigez Mega Man dans une arène fermée dans laquelle vous pouvez effectuer des attaques mais aussi esquivez celles de vos ennemis. Sur un genre de plateau de damier, de un à trois virus vous font face et vous aurez 2 solutions pour en venir à bout : soit d'utiliser votre Mega Buster (le tir de base), soit d'utiliser des chips (puces) de combat. Ces chips vous permettent d'utiliser des attaques plus puissantes comme lancer une bombe, frapper à coup d'épée ou encore d'invoquer un Navi qui vous portera assistance au combat. Rien que le premier jeu de la série comporte 175 chips à découvrir, toutes les collectionner promet un nombre d'heures conséquents !
Les chips se trouvent sur les diverses maps, que l'on joue avec Lan ou avec Mega Man, on en obtient aussi en récompense après les combats. Vous pouvez aussi en acheter, moyennant des zennys, la monnaie qui a cours à Dentech City. De la même sorte que les puces, vous pouvez en récolter après les combats ou alors en fouillant les zones. Améliorer les capacités de Mega Man réclamera beaucoup de zennys donc n'hésitez pas à faire et refaire des combats jusqu'à en obtenir assez pour que votre robot soit assez puissant. Le nombre de puce augmente à chaque nouvel opus, ce qui garantit une durée de vie colossale pour toutes les obtenir, bien que cela ne soit pas primordial pour finir les jeux.
D'autres nouveautés sont introduites dans les opus ultérieurs, ainsi le Style Change apparaît dès le second opus, qui se traduit par la possibilité de modifier Mega Man selon 4 formes et 4 éléments, ce qui permet 16 combinaisons différentes. Le style aura un réel impact sur la stratégie à adopter en combat, il faudra donc les prendre en compte. Un mode Hard fait son apparition une fois le jeu terminé, ainsi que d'autres nouveautés qui tranchent pas mal avec le premier opus. Plus on avance dans la série de jeux, plus on le 1er opus sera relégué à un brouillon par rapport à ses successeurs. Mega Man Battle network 3 introduit quant à lui le Navi Customizer, qui permet de personnaliser Mega Man comme vous le voulez (que ce soit l'attaque, les HP, les déplacements...). C'est d'ailleurs le premier opus à se dédoubler et à proposer 2 versions du jeu, très proches ingame l'une de l'autre, mais avec des chips différentes dans les 2 versions.
Battle Network 4 adopte quant à lui le Soul Unisson, un nouveau système de transformation qui supplante le Style Change. En fusionnant avec l'esprit d'un Navi, Mega Man en ressort avec un nouveau look et de nouvelles aptitudes valables pendant 3 tours de jeu. Pour tout collectionner il faudra faire le jeu 3 fois, celui-ci verra sa difficulté augmenter à chaque fois et des puces de combat de type dark font leur première apparition dans cet opus, avec les effets indésirables que cela implique quand on s'en équipe. La 5ème itération simplifie l'acquisition des Souls et apporte son lot de missions inédites comme celles de libération, qui consiste à vaincre ses ennemis en 3 tours maximum. Enfin l'ultime opus voit le système du Soul Unisson remplacé par le Cross System, qui est plus efficace dans son fonctionnement et qui ne requiert pas de sacrifier des puces pour les activer.
Une compilation fainéante ?
Histoire de permettre de jouer dans les meilleures conditions possibles, Capcom a ajouté des filtres afin que l'étirement de l'image soit tout à fait présentable sur nos télés HD dernier cri. Il faut dire que l'écran de base, la GBA, est loin de nos standards actuels en terme de télévision et que l'émulation sans filtre de ces jeux donne souvent un rendu pas très joli. Ici le filtre haute résolution donne une image plus claire aux jeux, ce qui ravira l'ensemble des joueurs. Quelques bonus sont de la partie comme un lecteur de musique contenant toutes les pistes de tous les jeux, une galerie d'art et surtout un mode qui permet de joueur en ligne, qui n'a pas pu être testé à ce jour étant donné que le jeu a été reçu quelques jours avant la remise de ce test, mais on est en droit d'espérer un mode qui permettra aux joueurs de se livrer des duels acharnés et intéressants ainsi que des échanges de cartes.
Là où le bat blesse, c'est qu'il faudra être un minimum anglophone pour saisir l'ensemble des scénarios, les quelques subtilités qui en découlent mais aussi pour bien comprendre à chaque opus les évolutions dans le gameplay proposées. Un enfant qui souhaiterait jouer à ces Mega Man risque de bien galérer à en comprendre les principes, comme tous ceux qui sont réfractaires à l'anglais - ce qui concerne une partie de la population en France, notamment chez les joueurs - pour des raisons qui leurs sont propres. On ne peut que fustiger ce parti pris, surtout que des Mega Man plus récents ont eu droit à leur traduction, qu'il s'agisse de Mega Man 11 ou 9 (le 10 a été également traduit mais pour une raison qui demeure mystérieuse à ce jour, cette traduction contenue dans le jeu n'est pas sélectionnable dans les options). De la part d'une petite production on aurait pu comprendre, mais là c'est de Capcom qu'il s'agit, un acteur majeur de l'industrie du jeu vidéo.
D'autre part, il manque au moins 4 jeux pour que cette compilation puisse réellement contenir tous les jeux estampillés Battle Network. Ainsi, manquent à l'appel l'opus 4.5, qui à l'époque n'est sorti qu'au Japon, ainsi que l'édition spéciale Rockman.EXE 6 Beast Link Gate DX Edition. Battle Chip Challenge, pourtant sorti chez nous à l'époque, n'est pas non plus inclut dans cette compil tout comme l'opus Wonderswan, là encore exclusif au Japon. Enfin, Network transmission, paru sur Gamecube en 2003, aurait également eu toute sa place dans cette compilation. Pourquoi ne pas non plus avoir inclus, en bonus, les 3 Rockman EXE (le nom des Battle Network au Japon) qui sont sortis uniquement sur téléphone portable en 2004 ? Et pourquoi diable ne pas avoir inclus dans la compilation Battle Network 5 Double Team, paru sur DS (et qui est à ce jour le seul opus de la franchise à avoir été traduit en français) ?
On ne fera certes pas la fine bouche vu que l'on a tout de même droit à 10 jeux, bien que 6 d'entre eux - les opus 3, 4, 5 et 6 - ne sont en réalité qu'un même jeu proposant chacun quelques différences mineures avec leur double. En réduisant à 6 le véritable nombre d'opus disponible, cela représente tout de même quelques bonnes dizaines d'heures de jeu pour en venir à bout, même en ligne droite, si vous jouez sans utiliser le Mega Buster amélioré. L'ajout de ce dernier présentera un véritable confort pour ceux qui veulent découvrir les différentes histoires de ces jeux sans aucune prise de tête, les puristes auront certainement plus de mal à s'y faire, puisque tout le côté tactical part, de fait, en lambeau. Dommage qu'aucun doublage, même partiel, n'ait eu lieu car on aurait aimé entendre Mega Man prononcer des "Jack in !" quand il se connecte au réseau, à l'instar des animés issus de cette série de jeux.