Sorti simultanément sur Switch, PC, PS4 et Xbox One, Infernax s’est présenté comme un jeu destiné aux durs à cuire et on veut bien le croire quand on voit la quantité de sang qu’il affiche dans ses bandes-annonces. Sorti le 14 février, c’est un cadeau de Saint-Valentin peu orthodoxe mais il faut avouer qu'avec son aspect 8-bit voulant clairement surfer sur la nostalgie des joueurs aguerris, style très répandu chez les jeux indépendants, on peut comprendre l'hésitation à l'achat. Il valait donc bien la peine qu’on lui consacre un test dans nos colonnes.
Le bain de sang, ça donne un teint délicat
Infernax nous fait incarner un jeune duc de retour de croisade dont nous pouvons choisir le nom. Il est visuellement semblable à un mélange entre Solid Snake de Metal Gear Solid et Ryu de Street Fighter, sa force et son courage sont également à la hauteur. À peine de retour sur ses terres, le jeune duc apprend qu’en son absence, un livre démoniaque a été ouvert, ce qui a transformé presque tous ses sujets en monstres. Pour dire à quel point la situation est grave, notre première rencontre se fait avec un zombie crucifié, l’occasion d’apprendre les bases du combat.
En progressant, on arrive dans notre château pris d’assaut par les créatures démoniaques. L’une d’entre elle, particulièrement imposante, détruit même les murailles et il faut une brillante intervention de notre part pour l’empêcher de tout détruire. En la poursuivant, on arrive à la forteresse abritant le livre qui a déclenché tout ce bazar, hélas, elles a été condamnée par notre mage pour contenir les forces démoniaques en attendant notre retour. Pour détruire la source du mal, il est nécessaire de briser le sceau qui prend sa source dans 5 donjons différents, c’est le grand objectif du jeu.
Ce serait une histoire assez classique si le jeu ne se distinguait pas par son aspect et sa musique 8-bit rappelant les heures de la GameBoy Color et surtout par son ambiance qui est des plus gores. La violence est très stylisée et absurde à la manière d’un film de Quentin Tarantino, il y a des effusions de sang et d’organes dans tous les sens à chaque fois qu’un ennemi est battu, du simple trouffion au plus redoutable des boss. Bien évidemment, plus l’ennemi est imposant, plus la quantité d’hémoglobine dégagée est importante, ce qui rend les combats des plus addictifs. Mais en contrepartie, les ennemis qui réussissent à nous vaincre se font une joie de nous ratatiner de bien des manières sadiques.
On rentre dans le lard et les ténèbres !
Si on ressent autant de plaisir à vaincre nos ennemis, c’est aussi parce que la difficulté est assez corsée, nous poussant à rester concentré en permanence. D’autant qu’au départ, il est possible de choisir une difficulté normale ou accessible, le second choix offrant plus de vie, plus d’expérience et de santé, moins de perte d’or en cas de game over, etc… Si la difficulté normale est choisie, il est possible de passer en mode accessible mais pas l’inverse, ce serait trop facile autrement. Dans les deux cas, si on a épuisé toutes nos vies, notre héros revient au précédent point de sauvegarde.
Il ne faut pas croire que le mode facile est vraiment facile, le défi reste très corsé. Infernax révèle vite son côté die and retry, surtout dans les donjons. Hormis quelques zones de repos, le risque de trépas est permanent et il faut rester sur ses gardes constamment. Ça n’empêche pas les morts (très) fréquentes, on n’a donc guère le choix de recommencer et de tirer des leçons de nos précédentes défaites. Heureusement, la difficulté est justement dosée et l’aspect très sanglant du jeu donnent ce qu’il faut d’envie pour continuer à avancer la plupart du temps. Il faut cependant avoir conscience que chaque mort nous fait perdre tous nos points d’expérience et une partie de l’or récupéré.
Les contrôles très agréables et la fluidité du jeu contribuent à rendre le jeu des plus sympathiques en main. Les commandes d’action sont simples puisqu’on ne peut qu’asséner des coups de massue et lancer des sorts magiques comme des soins, des boucliers ou des éclairs pour griller tous les ennemis à l’écran. On dispose aussi d’un bouclier physique qui fonctionne comme dans le deuxième The Legend of Zelda, c’est-à-dire qu’il fonctionne uniquement si on est totalement à l’arrêt et orienté dans la bonne direction.
On peut cependant regretter qu’au vu du nombre conséquent d’ennemis à l’écran, les attaques ne soient pas davantage diversifiées, on ne fait qu’appuyer sur « Y » pour attaquer et quand les ennemis sont nombreux, ça peut devenir lassant. Il aurait suffi d’une deuxième attaque par un deuxième bouton pour mieux rythmer les combats. Il y a bien sûr des sorts comme celui d’armure ou celui de soin mais leurs effets sont temporaires et les plus efficaces consomment beaucoup de mana qu’on ne peut recharger qu’en buvant des potions ou en allant aux points de sauvegarde. Dit autrement, ces sorts s’utilisent rarement.
Les ennemis sont quant à eux très bien pensés et diversifiés. Partant de simples zombies faciles à vaincre, on se retrouve avec une myriade d’adversaires avec leur propres mouvements et leurs propres forces comme des yeux volants qui se dirigent lentement mais sûrement vers nous, des fantômes qui foncent droit devant eux, des tout petits nécessitant de s’accroupir pour les toucher ou encore des « ombres » difficiles à discerner la nuit et qui, dès qu’elles nous aperçoivent, se jettent sur nous comme si elles avaient aperçu une PS5. En les battant, certains ennemis lâchent une quantité plus ou moins importante d’or qui nous permettent d’acheter des potions de santé ou de mana ou de meilleurs équipements.
Les boss sont encore plus impressionnants, ils possèdent chacun leurs propres mouvements, ce qui nécessite une bonne dose de réactivité et de dextérité, et ne révèlent leurs points faibles qu’à certains moments. Comme tous les bons boss, ils paraissent compliqués à abattre au début mais dès l’instant où on a compris la technique, c’est limite de la rigolade. La persévérance est donc particulièrement importante pour les vaincre.
Ça s’en va et ça revient.
Infernax révèle également sa nature de Metroidvania. Les aspects plateforme et labyrinthe sont en effet très développés, certaines zones ne sont accessibles qu’en débloquant certains pouvoirs. Il y a même des passages créatifs, on doit par exemple grimper régulièrement sur des herses qui s’abaissent brutalement et qu’on doit franchir rapidement sous peine d’être écrasé contre le plafond. Évoquons aussi les roues à aubes des moulins qui nous contraignent à rester en mouvement en permanence au risque de tomber dans l’eau, ce qui est plus difficile qu’on ne le pense car le jeu prend un malin plaisir à y disposer des ennemis.
Il y a bien quelques ennemis qui se bloquent aux extrémités des plateformes, nous contraignant à reculer ou à prendre quelques coups pour avancer, mais ces moments sont rares. Parfois, on peste contre la carte qui ne nous permet pas de zoomer dessus alors qu’elle possède parfois un point de vue trop global mais là-encore, les moments où on aurait eu besoin des zooms sont rares. La seule véritable critique qu’on pourrait adresser au game-design, c’est la gestion de la caméra, surtout lorsqu’on doit se diriger vers le bas de l’écran. Il arrive quelques fois où la distance à chuter est importante et il est impossible de savoir où on atterrit, ça fait bien sûr partie du jeu mais on tombe parfois sur des ennemis en s’approchant du sol.
On retrouve bien évidemment un hub central avec le château du duc où on peut acheter des potions, des armures ou des armes et accepter des quêtes annexes. Celles-ci sont indispensables pour progresser car à moins d’être un joueur aguerri extrêmement doué, on ne peut pas réussir les donjons où se trouvent les principaux objectifs sans elles. Certaines ne sont possibles à réaliser que de nuit comme des bandits qui ne se montrent que sous l’éclat de la Lune.
Et bien sûr, de temps en temps, il y a des donjons à traverser. Ils sont assez classiques dans leur principe : il y a plus d’ennemis , des énigmes à résoudre, des portes à ouvrir et un boss à battre à la fin. Mais si vous trouviez le jeu difficile jusque-là, vous n’êtes pas prêt à faire face au défi que les donjons présentent, cela peut même devenir vicieux comme les plateformes situées près des plafonds, ce qui nous offre un aller simple au fond du précipice si jamais on saute trop tôt et qu’on se cogne contre le sommet de la pièce. En contrepartie, après avoir battus le boss, on débloque des capacités comme la destruction de rochers qui nous permettent d’ouvrir de nouveaux chemins. Dommage que le pouvoir de téléportation arrive tardivement car les distances à parcourir deviennent assez rapidement grandes.
Faire face à sa destinée
De temps en temps, notre jeune duc est confronté à des choix qui vont impacter ses possibilités de quêtes. Le premier de ces choix est de choisir entre tuer un habitant infecté nous suppliant de l’achever, ou bien de l’épargner. Au début, vu qu’on est bon seigneur, on est tenté de l’aider mais si c’est ce choix qui est fait, il se transforme en monstre très difficile à vaincre. On peut aussi décider de le tuer mais dans ce cas, pas de chance, sa femme nous aperçoit, ce qui nous prive d’une quête annexe.
Un autre choix que l’on fait un peu plus tard est d’obéir aux ordres d’un mage pour chasser des vagabonds de ses terres ou rester avec eux pour boire un verre et sympathiser. Si on choisit la première option, ils reviennent plus tard en tuant un innocent pour nous agresser en masse, mais heureusement, ils peuvent être battus si on a suffisamment amélioré notre équipement et nos techniques de combat et en prime, on apprend un sort de la part du mage.
De façon générale, le jeu nous propose à chacun de ces choix de nous rapprocher de la lumière ou des ténèbres, ce qui influe sur la fin du jeu. Hélas, hormis le tout premier, ces choix sont assez faciles à trancher une fois qu’on a compris qu’on se rapproche du Bien dès qu’on s’oppose aux monstres, aux voleurs et autres fieffés coquins et qu’on se rapproche du Mal dès qu’on les rejoint, les soutient ou les épargne.