Après avoir été récompensé pas moins de six fois depuis sa sortie en 2019, le jeu développé par les Néo-Zélandais de Wildboy studio débarque ce 27 janvier sur la portable de Nintendo. A la croisée du récit narratif, rythmique et d’énigmes, Atone nous promet un voyage au cœur de la mythologie nordique que l’on n’est pas prêt d’oublier. Serez-vous prêt à affronter les dieux pour protéger les vôtres ?
Pour l’amour d’Odin
En des temps immémoriaux, les dieux vivaient parmi les Hommes. Un évènement tragique, cependant, conduisit les divinités à abandonner Midgard, la plongeant dans le chaos. Mais une chance fut laissée à l’humanité de se racheter. Cette tâche fut confiée au peuple Atori, race de grands guerriers à qui les dieux ont insufflé les trois énergies issues de l’arbre-monde. Estra est une descendante de cette exceptionnelle lignée. Sillonnant les routes aux côtés d’un étrange esprit, elle cherche des réponses. Quel mystère se tapit derrière cette tragédie d’il y a dix ans, alors qu’un village entier périssait sous les coups d’un étrange mal qui plongeait les Hommes dans une folie meurtrière incontrôlable ? Résolument axé sur la narration, Atone plonge le joueur dans une aventure poignante qui jongle dans un rythme effréné avec des thèmes aussi puissants que l’amour, l’amitié, la haine, la vengeance ou la mort. Souvent brutale et inattendue, cette dernière est tapie partout, et la crainte de son funeste passage ajoute en nous cette touche de fébrilité qui ne trouvera guère sa fin qu’à l’heure du dénouement. Une quête certes, un peu courte (un peu moins de sept heures dans notre cas), mais à l’intensité si réelle qu’on le lui pardonnera.
Et si Atone nous prend tant aux tripes, c’est bien grâce à ses personnages. Evoluant au cœur d’une terre de légende où les mythes nordiques ont forgé les convictions, les compagnons qu’Estra rencontrera au cours de son aventure seront aussi agaçants qu’attachants, aussi amicaux que dangereux. L’on pense tout particulièrement à Yri, esprit grenouille dont le dévouement et la sincérité en font un personnage tout aussi marquant que son héroïne. Sur ce point, il est heureux de constater qu’Atone fait avant tout appel à notre sensibilité par le regard. Entendez par là que si la présence du doublage anglais est plutôt convaincante, on ne saurait en dire autant de la traduction française qui l’accompagne. En effet, une bonne partie des textes manquent de naturel, la faute à une adaptation visiblement réalisée à l’aide d’un logiciel de traduction instantanée. Et bien que cela ne nuise aucunement à la compréhension globale du titre, l’on passe fatalement à côté de certaines idées tout comme certains dialogues.
Danse macabre et choix cornélien
Afin de rejoindre l’arbre-monde, Estra devra parcourir les terres de ses ancêtres et se frayer un passage par la force de sa hache et de son esprit. S’agissant des phases d’exploration, la jeune femme pourra donc classiquement interagir avec les éléments du décor pour obtenir renseignements et items, mais aussi discuter avec les habitants et créatures peuplant ces terres. La plupart du temps, ces interactions déclencheront une énigme qu’il faudra résoudre pour avancer. Alliant logique, mémoire et déduction, les différents puzzles disséminés çà et là ont l’avantage de la variété et l’efficacité du nombre restreint. Ni trop difficiles ni trop nombreuses, ces phases évitent avec brio la redondance en servant le récit et jamais l’inverse.
Bien entendu, nul ne saurait s’aventurer en terres hostiles sans se voir opposer une certaine résistance. Créatures fantastiques, esprits récalcitrants ou Hommes qui n’en sont plus vraiment, vous barreront le passage. Alors, sortez votre hache… et laissez parler votre sens du rythme. Vous êtes perplexe ? Ne le soyez pas. Dans Atone, les combats sont pensés comme une danse rythmée par la musique et les cris, ce qui ne les rendent moins sanglants et impactants. Bien au contraire. Pour l'emporter, il faudra appuyer au bon moment sur les boutons indiqués par les lignes de notes, au nombre de deux ou quatre selon la difficulté choisie (normal ou difficile). Original et plaisant, ce système de combat rythmique sait allier l’actif au contemplatif, puisque se diffuse en arrière-plan des images du combat à mort qui se joue. Encore une fois, ne vous attendez pas à une difficulté très élevée, pour ne pas dire quasi-inexistante. Pour notre test, par exemple, nous n’avons jamais perdu une seule fois un combat, malgré un nombre d’erreurs parfois très significatif. Si cela s’explique par le fait que les combats sont avant tout un prétexte pour approfondir la trame scénaristique, ce manque de difficulté baisse drastiquement l’intérêt qu’il y a à acheter des cœurs supplémentaires chez le marchand ou à partir en quête de points de résistance aux dégâts.
Jeu narratif oblige, Atone vous imposera parfois de faire des choix, et de les assumer malgré leurs conséquences. Epargner ou tuer ? Avoir confiance au risque de le payer cher ou être sans pitié quitte à imposer aux autres vos propres souffrances ? Le dilemme est réel, car on ne sait jamais vraiment quand frappera le destin que l’on vient d’enclencher. Sur ce point, notez que si le choix « par défaut » est la mise à mort de votre adversaire une fois le combat achevé, elle n’est pas forcément immuable. D’où l’intérêt d’être curieux et ne pas systématiquement se précipiter vers le prochain tableau pour passer à la suite. Parlez aux habitants, repérer des passages secrets, sont autant de stratégies qui peuvent déboucher sur une information cruciale qui débloquera une nouvelle issue moins sanglante pour le combat à venir.
La fureur du nord
Si Atone sait se montrer aussi impactant dans sa mise en scène, c’est aussi grâce à sa splendide direction artistique. Tout de lignes vêtues, les décors d’Atone offrent rarement un spectacle qui laisse de marbre. Des détails les plus évidents comme les arbres ou les montagnes, aux plus discrets comme les reflets sur l’eau, le studio offre aux yeux du joueur une succession de paysages différents à la beauté indéniable, couplée à un level design très bien pensé. On sait toujours où aller sans se perdre dans ces vastes étendus, et pas besoin d’une carte pour repérer quelques passages secrets menant à coffres, quêtes annexes, et autres. Enfin, l’on ne saurait terminer ce test sans dire un mot sur la splendide musique qui nous accompagne. Véritable compagnon de voyage, elle insuffle poésie et tension jusqu'à la toute fin.