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Master Retrospective : La série Metroid Prime

Par Shadowdeath - Le 19/02/2014 à 05:34

La série Metroid Prime marque le renouveau de la licence mythique des « Metroid » et surtout l'entrée de celle-ci dans le monde de la 3D. Cette série, composée de trois titres (Metroid Prime, Metroid Prime 2 : Echoes et Metroid Prime 3 : Corruption), est l'instigatrice du genre FPA (First Person Adventure). Elle est le fruit d'un dur labeur, celui de l'équipe de développement de Retro Studios au début des années 2000 à laquelle Nintendo commande le premier opus de la série futuriste pour sa nouvelle console de salon : la Nintendo GameCube. En reprenant le flambeau après le succès de Super Metroid dès sa sortie en 1994, encore aujourd'hui considéré par beaucoup comme LA référence des Metroid, la « Metroid Prime Trilogy » insère l'héroïne la plus charismatique de l'univers Nintendo, Samus Aran, dans une nouvelle ère.

La création de Retro Studios : Les prémices de la saga.

Impossible d'aborder l'histoire de la série Metroid Prime sans parler du studio de développement qui l'a engendré. Ce développeur, c'est Retro Studios, une boîte américaine qui voit le jour en octobre 1998, à l'issu d'un projet d'alliance entre Nintendo et le fondateur du studio Iguana Entertainment, Jeff Spangenberg. L'ambition de Nintendo pour sa nouvelle entité de développement, sous la tutelle de Spangenberg, consiste à lui confier quatre titres à créer pour la GameCube sur le point d'être commercialisée. Ainsi, quelques vingt-cinq membres d'Iguana Entertainment rejoignent le nouveau studio et s'affairent à la conception de ces quatre jeux. Néanmoins, le développement de ces titres est laborieux voire même catastrophique car les différentes équipes peinent à collaborer et n'interagissent quasiment jamais. C'est en 2000 qu'intervient la visite de Shigeru Miyamoto dans les bureaux de Retro Studios à Austin, Texas. Au cours de cette prestigieuse visite, l'équipe de développement fait une démonstration de son moteur de jeu qui laisse Miyamoto sur sa faim. Le légendaire game designer propose alors aux membres de Retro Studios de se charger de concevoir un nouveau titre Metroid. Après avoir accepté cette offre, la société se voit recevoir la licence ainsi que les ressources nécessaires pour ce nouveau projet ambitieux. De ce fait, les précédents projets sont abandonnés, ce qui donne lieu au licenciement de près de 100 employés. Un million de dollars sont alors confiés à Jeff Spangenberg par Nintendo, faisant de Retro Studio une division de la Firme de Kyoto. Une fois ce pactole en main, Spangenberg commence à négliger ses devoirs en tant que président, notamment en se rendant de moins en moins à son lieu de travail. Quelques photos « choc » de lui, posant avec des femmes à moitié nues, sont même diffusées sur le web et lancent une polémique. C'est pourquoi à quelques mois de la sortie de Metroid Prime, il est remplacé par Steve Barcia qui devient « vice-president of Product Development. ».

De nouveaux développeurs, surveillés par les Anciens.

Il faut savoir que Metroid Prime est le premier Metroid à sortir après le hit planétaire « Super Metroid ». Pour le retour de la licence, Miyamoto veut frapper fort ! En réalité, Nintendo avait déjà songé au développement d'un titre Metroid sur Nintendo 64, mais faute « d'idées concrètes », cette volonté n'a jamais abouti. L'un des grands responsable de la licence Metroid depuis ses débuts, Yoshio Sakamoto, affirme même que Nintendo aurait tenté de se rapprocher d'une société de développement en leur proposant de créer un Metroid sur N64 tandis que cette entreprise a refusé, craignant de ne pas pouvoir faire un jeu du même calibre que Super Metroid de son temps. C'est donc sous la direction d'un certain Mark Pacini que le développement de Metroid Prime débouche sur la sortie de ce dernier en 2003, après une étroite collaboration à distance entre l'équipe de production nippone et celle située au Texas via des e-mails, des appels téléphoniques et parfois même des conférences vidéos. Au final, la musique sera le seul élément du jeu à avoir été fait en dehors de Retro Studios par le game composer Kenji Yamamoto, qui réalise des prouesses pour agrémenter l'ambiance futuriste de Metroid Prime par une bande-son qui l'est tout autant. D'ailleurs, Yamamoto était déjà à l'origine de la bande-son de Super Metroid, c'est donc pour garder une continuité dans ce domaine là qu'il est sollicité une fois de plus. Même l'intrigue du jeu est écrite par Retro Studios, tout en étant cependant soumise régulièrement, pendant son élaboration, à l'œil attentif de Sakamoto, afin de veiller à conserver son authenticité dans le respect du background scénaristique déjà existant.

Un univers élaboré dans le respect de l'authenticité.

L'histoire, parlons-en ! Samus Aran, la célèbre chasseuse de prime travaillant en tant que mercenaire pour la Fédération Galactique, vient de défaire les Pirates de l'Espace qui se trouvaient sur la planète Zebes, l'un des sanctuaires sacrés de la race intellectuellement ultra-développée des Chozos. A bord de son fameux vaisseau, elle intercepte un signal de détresse en provenance de l'Orpheon, une station spatiale fantôme en orbite autour de la planète Tallon IV. Une fois à l'intérieur de la station, elle rencontre quelques Pirates de l'Espace, morts pour la plupart, et affaiblis pour le reste. Elle parvient au cœur de la station dans lequel elle affronte la Reine Parasite, le premier boss de la trilogie qui, une fois vaincue, crée une surcharge générale et déclenche la destruction de la station. Samus, dont la Combinaison de Puissance a été endommagée et réduite à un stade primaire, se voit fuir de la station et atterri sur Tallon IV juste après avoir aperçu son ennemi juré, le terrible Ridley, dont le corps a été robotisé pour augmenter ses capacités physique à la suite de sa cuisante défaite contre Samus sur Zebes, s'envoler également dans cette direction. Sur place, [Spoil] elle découvre un monde à l'agonie, voire dévasté. Qui-plus-est, certaines espèces sont victimes d'une substance organique extrêmement néfaste et infectieuse appelée « Phazon ». Ce nouvel élément, qui s'avère être fortement récurrent dans la saga « Prime », possède des propriétés spectaculaires lui permettant de prendre le contrôle d'un organisme, même mort, pour en faire une créature possédée, puissante et vindicative à l'égard de Samus. Plus tard dans l'aventure, Samus apprend que Tallon IV était, elle aussi, un sanctuaire Chozo tandis que la race a également été décimée par les effets d'un Léviathan, c'est à dire un astéroïde essentiellement composé de Phazon en provenance de la planète Phaaze, qui, lorsqu'il s'est écrasé sur Tallon IV, s'est mis à générer une infection de Phazon planétaire. Ainsi, afin d'endiguer l'afflux de celle-ci, les Chozos ont construit un Temple au dessus du cratère dû à l'impact du Léviathan. Pour avoir accès à l'espace confiné du Temple, Samus se doit de parcourir Tallon IV à la recherche de douze artéfacts servant de clefs. C'est en cela que consiste la quête principale du premier opus Metroid Prime. Une fois parvenue à ouvrir le Temple, le Lévithan ne peut être observé par Samus. En revanche, se trouve à la place une gigantesque créature issue de sa mutation, constituée de Phazon en effervescence qui, en réalité, était à l'origine un Metroid ayant subi l'influence néfaste du Phazon et dont les propriétés physiques ont été décuplées. Il s'agit du boss final du titre : le « Metroid Prime ». (Beaucoup considèrent le Metroid Prime comme le successeur spirituel de l'entité « Mother Brain » qui existait déjà dans le tout premier Metroid, notamment par un design similaire.) Une fois ce boss final vaincu par Samus, celle-ci voit les caractéristiques de sa Combinaison Varia dérobées par les restes gélatineux du monstre juste avant de s'enfuir du cratère puis de la planète. A partir de ces propriétés technologiques dérobées se créent, au sein du cadavre du Metroid Prime, l'antagoniste emblématique de la trilogie Metroid Prime : « Samus Sombre ».

« Metroid Prime », un titre inédit qui bouscule les codes.

Sur ce background scénaristique en concordance avec l'esprit originel de la saga Metroid, des innovations considérables ont vu le jour. Sur le plan du gameplay, c'est une révolution ! Les développeurs de chez Retro Studios hésitent entre la « third-person perspective » et la « first-person perspective ». C'est finalement la deuxième option qui est adoptée « pour son caractère intuitif ». Ainsi, Metroid Prime est un jeu d'exploration 3D extrêmement élaboré qui marque la rupture avec Super Metroid et Metroid, qui fonctionnaient, eux, en scrolling classique. La richesse du titre se dévoile explicitement grâce au « viseur d'analyse » qui, lorsqu'il est utilisé sur un élément du décors, un adversaire ou tout autre objet, relate l'histoire, la fonctionnalité et la particularité de ces derniers. Les informations du viseur d'analyse constituent une véritable encyclopédie sur l'univers Metroid. Par défaut se trouve donc à l'écran les informations que donne l'affichage tête haute du casque de Samus, avec tous les éléments nécessaires : une mini map, la barre de vie et aussi les différents rayons entre lesquels il est possible de switcher ! Car il ne faut pas oublier que, par ce choix de jeu à la première personne, Metroid Prime est un FPS. Cependant, le titre dévie grandement de la lignée des FPS ordinaires car il comporte un énorme pan, son aspect « exploration » au sein d'un open world gigantesque, qui diffère de la linéarité classique d'un FPS de base. Car pour progresser dans Metroid Prime, il faut très souvent revenir sur ses pas pour observer l'environnement avec attention, histoire de voir si un petit élément du décor, pouvant s'avérer capital, n'a pas échappé au joueur. C'est en cela que le titre est considéré comme le précurseur d'un nouveau genre que l'on nomme « First Person Adventure ».

« Metroid Prime 2 : Echoes », ancrage et dépassement d'un genre.

Après le succès commercial remarquable de Metroid Prime, qui s'est écoulé à près de 1,5 million d'unités aux Etats-Unis seulement, Retro Studios cherchent une « rebelote » ! C'est pourquoi en 2004 sort le second opus de la trilogie : « Metroid Prime 2 : Echoes ». Pour ce nouveau titre, on décide de ne pas conserver la même bande-son, ni les même bruitages que pour le précédent. La philosophie de conception de celui-ci est liée au titre précédent. En effet, Retro Studios considère que Metroid Prime fait office de titre didacticiel, permettant de découvrir la prise en main du genre FPA, c'est pourquoi il souhaitent cibler, pour « Echoes », une communauté de gamers plus avisée et même plus « hardcore ». D'ailleurs, l'une des critiques négatives récurrentes concernant ce jeu, bien qu'elles soient excellentes pour la plupart, se focalisent sur sa difficulté abrupte. L'un des objectifs affichés de Retro Studios est de faire en sorte que le joueur soit « constamment aux aguets quant à sa barre de santé » au cours d'une partie. De nombreux mini-boss ont été ajoutés offrant au joueur la possibilité de vivre des combats uniques. On constate donc que le deuxième titre gagne beaucoup en maturité, est agrémenté de davantage de cut scenes, d'une ambiance nettement plus sombre et met en avant, par le biais de l'intrigue, une dichotomie thématique permanente. Car cette fois, la trame du jeu se fonde sur des éléments quelque peu étrangers aux coutumes de l'univers de la saga. C'est dans Metroid Prime 2 : Echoes que le rôle du doppelgänger de la protagoniste, Samus Sombre, revêt une certaine importance. Samus se retrouve donc sur la planète Éther, un monde fractionné en deux dimensions, une partie lumineuse et une partie ténébreuse. Cet étrange phénomène s'est produit après qu'un autre Léviathan se soit abattu sur Ether et aient conduit les Luminoths, le peuple de l'Ether de lumière, à affronter les Ings, des créatures féroces venant de la dimension des ténèbres. On retrouve ainsi le Phazon et ses effets de corruption sur les races endémiques ainsi que Samus Sombre qui joue de cette situation chaotique. Il y a donc une dualité, non seulement entre Samus et Samus Sombre, mais aussi entre Ether et Ether Sombre. Mike Wikan, le principal game designer du titre, confie que « le jeu consiste en un "va-et-vient" du joueur entre les ténèbres et la lumière, un style de gameplay qui se reflète sur ses facultés de base ». Samus Sombre aurait été inspirée d'un combat opposant Samus à son reflet dans un miroir dans le jeu « Metroid Zero Mission » sur GameBoy Advance. D'ailleurs, pour l'élaboration de ce monde dichotomique, les développeurs ont demandé des conseils aux concepteurs de The Legend of Zelda: A Link to the Past, dont l'intrigue comportait un principe identique. Il est à noter que le producteur du jeu Kensuke Tanabe a indiqué que le titre n'est achevé qu'à 30% seulement trois mois avant la date limite qu'a fixé Nintendo pour sa commercialisation. A l'issu de cette dernière, les critiques se font très élogieuses et les notes attribuées par les médias sont souvent proches du maximum.

 

« Metroid Prime 3 : Corruption », un Metroid Next-Gen.

Il est évident que Metroid Prime 3 : Corruption sait profiter des atouts qu'offre la nouvelle console de salon Next-Gen de chez Nintendo : « La Wii ». L'une de ces nouvelles caractéristiques avantageuse n'est pas des moindres puisqu'il s'agit de la wiimote, une manette qui s'accorde parfaitement au gameplay du FPA. En effet, la wiimote permet une immersion en jeu plus prenante, qui, selon Reggie Fils-Aime (Président de Nintendo US), « réinvente les codes du genre FPS » en repensant l'ergonomie générale. Une version modifiée de Metroid Prime 2 : Echoes est montrée au Tokyo Game Show en 2005 en guise de petit aperçu pour les gamers de ce que serait le gameplay du vrai titre. L'univers de Metroid Prime 3 est plus vaste que les deux précédents, tandis que l'intrigue, quant à elle, tâche de clore la saga et le problème du Phazon dans l'espace intergalactique. Ainsi, Samus Sombre, une nouvelle fois de retour, prend le contrôle des Léviathans via l'Unité Aurora, un supercalculateur biologique corrompu par le Phazon, à partir de la planète d'origine de cette même substance « Phaaze ». En début de jeu, Samus se trouve en réunion au cœur de la flotte de la Fédération Galactique, cependant, l'assemblée est interrompue par une attaque des Pirates de l'Espace. Samus et trois autres chasseurs de prime sont envoyés sur la planète Norion avec pour objectif d'activer les défenses planétaires juste avant qu'une Graine de Léviathan ne s'y abatte. Samus y parvient in extremis mais s’évanouit. Lorsqu'elle émerge, au sein d'un laboratoire de la Fédération Galactique, elle découvre qu'elle a été corrompue par le Phazon et que les scientifiques de la Fédération lui ont greffé un système permettant de canaliser l'afflux de puissance de la substance bleue pour s'en servir comme une arme redoutable. En l'activant, elle passe en « Hypermode », un système coûteux en énergie et en santé. C'est un élément de gameplay supplémentaire dont l'idée de l'intégrer dans cet opus fut controversé au sein de l'équipe de développement. Avec cet opus s'achève l'histoire d'une trilogie qui aura duré environs 8 ans et qui se perpétuera quelques années de plus avec l'édition du titre Metroid Prime Trilogy sur Wii, regroupant, comme son nom l'indique, les trois titres en un.