Nintendo Wii U

Project Zero: La Prêtresse des Eaux Noires

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Project Zero: La Prêtresse des Eaux Noires

Par rifraff - Le 27/10/2015 à 14:55

La série des Project Zero / Fatal Frame fait partie des grandes séries du survival horror avec Resident Evil, Silent Hill et Forbiden Siren.  Très japonais dans son ambiance, mettant toujours en scène des héroïnes très court-vêtues, la série a énormément de fans à travers le monde. Depuis quelques années, la série est devenue une exclusivité Nintendo qui permet à la firme au plombier d’ajouter une licence « Mature »  à son catalogue tout en mettant en avant les spécificités de ses consoles : la wiimote avec Project Zero 4 et le remake du 2 sur Wii ou encore la réalité augmentée avec le spin off mal-aimé « Spirit Camera : Le Mémoire Maudit " sur 3DS. Aujourd’hui c’est le GamePad qui est mis à l’honneur dans Project Zero : la Prêtresse des Eaux Noires. Il faut dire qu’il simule à priori parfaitement la fameuse caméra obscura qui est la seule arme capable d’anéantir les fantômes qui hantent le jeu.

A Japanese Ghost Story

L’histoire de Project Zero : la Prêtresse des Eaux Noires ou plutôt les histoires nous entraînent sur les pas de trois personnages aux destins différents qui s'entrecroisent et dont le point commun semble être le mont Hikami, une montagne maudite réputée pour ses nombreux suicides, sur laquelle se serait déroulé il y a longtemps (?) d'horribles sacrifices dont la série est si friande... L'un des personnages principaux du jeu, si ce n'est le personnage principal (celui qui sert de fil rouge) est une jeune femme du nom de Yuri qui tient une boutique d'antiquités au pied du Mont Hikami.  Suite à un drame ayant décimé toute sa famille, elle a développé un don extrasensoriel lui permettant de voir les morts et d'enquêter désormais sur les mystères qui entourent le mont Hikami. Les deux autres personnages du jeu sont Ren, un écrivain hanté par d'affreux cauchemars dans lesquels il se voit, enfant, en train de commettre un meurtre et la jeune et jolie Miu qui recherche sa mère mystérieusement disparue et que les fans de la saga reconnaîtront peut-être puisque c'est l'un de ses personnages phares... A dire vrai, les histoires sont plutôt confuses et s'il n'y avait des tas de documents et de résumés à lire, on n'y comprendrait pas grand chose même si les habitués auront plus de facilité à s'y retrouver. 

Il est de toute façon évident que pour bien apprécier le jeu, il ne faudra pas chercher à trop comprendre ni à être rationnel. Project Zero : la Prêtresse des Eaux Noires est un jeu vidéo et non un film. Ce qui serait inacceptable au cinéma comme, par exemple, voir l'héroïne partir en nuisette crapahuter en pleine nuit dans les marécages sans même prendre une petite laine avec son gros appareil à photo sous le bras, ne posera, à priori, aucun problème ici.  Au contraire, si les héroïnes du jeu avaient décidé tout d'un coup de partir en expédition avec un passe-montagne, une doudoune, un sac à dos et une application de la camera obscura sur leur portable, il y aurait sûrement eu de la rébellion dans l'air.. 

Superbement modélisées et apprêtées dans des tenues moulantes frôlant l'indécence voire l'embrassant goulûment si vêtues des  tenues bouts de tissu bonus, les héroïnes sont encore une fois la grande attraction du jeu reléguant le rôle masculin au rang d'anachronisme incongru et contribuant au plaisir coquin qu'auront les grands garçons à les diriger. On pourra toujours regretter le choix d'avoir gardé la même maniabilité rigide qui fera dire à certains qu'il y a sûrement un manche à balai coincé quelque part (la question étant de savoir où) sans parler de la palette de mouvement, réduite au minimum, qui fait qu'il est impossible de sauter ni même d'enjamber une petite barrière de deux centimètres. On pourra aussi pester sur la lenteur des héroïnes, obligeant à les faire courir constamment pour ne pas avoir l'impression de faire du surplace et limite de croire que c'est le décor qui recule...Mais là encore, si, un jour, il faudra forcément que la série fasse sa révolution, pour le moment, la prudence des héroïnes, leurs manières délicates comme le calme et la dignité dont elle font toujours preuve quelque soit la situation participent grandement à poser l'atmosphère du jeu contrebalançant d'une certaine façon les tourments et les abominations qu'elles affrontent.

Il pleut, il pleut, sorcière...

Dans un Project Zero, plus encore que dans les autres survival horror, ce qui prévaut c'est l'ambiance. Et de ce côté là, on retrouve dès les premières secondes tout ce qui fait le charme de la série et qui renvoie aux grands films d'épouvante de Takashi Shimizu (auteur de l'inoubliable The Grudge) mais aussi de Hideo Nakata, papa de Ring et de... Dark Water qui est probablement la référence la plus évidente. Se déroulant le plus souvent de nuit, alors que la pluie tombe sans discontinuer (l'eau jouant un grand rôle dans l'histoire) le jeu sait distiller une ambiance feutrée et élégante contrastant avec les apparitions démoniaques savamment orchestrées et les crimes commis sur le mont Hikami que l'on devine puis découvre au fur et à mesure de sa progression. Graphiquement le jeu est à l'image de ses héroïnes, véritablement magnifique avec des environnements fouillés, fourmillant de petits détails malgré un léger retard parfois dans l'affichage des textures et aucune interaction avec le décor hormis l'ouverture et la fermeture de portes et de quelques tiroirs, On apprécie néanmoins la variété et la beauté des nombreux environnements différents du jeu dont chaque cm2 semble avoir été pensé et décoré avec soin. On les apprécie d'autant plus facilement que l'écran est débarrassé de toute indication.

Généralement dans les Project Zero, le décor est traité comme un personnage à part entière que l'on découvre au fur et à mesure avec ses mystères et ses secrets. Dans Project Zero : la Prêtresse des Eaux Noires c'est encore le cas malgré une construction plus éclatée avec plusieurs personnages sur plusieurs endroits. Le lieu de départ, dans lequel on revient entre chaque chapitre est la boutique de Yuri. C'est à partir de cette boutique et de l'appartement la jouxtant que l'on part explorer la montagne et sa forêt dense qui elle même conduit à différents endroits, une gare abandonnée, une plage déserte, une vieille baraque à moitié brûlée ou encore à un temple mystérieux aux salles tantôt lugubres tantôt illuminées et féeriques. Les environnements sont nombreux et vastes même si on les découvrira souvent par petits bouts et qu'on aura tendance à y repasser au moins trois fois avec les trois personnages.Alors certes, le plus souvent ce sera pour découvrir de nouvelles zones mais avant cela il faudra forcement repasser par des chemins déjà empruntés, ce qui n'est pas très emballant.Sans parler des fois, où il faudra refaire le chemin dans le sens inverse pour retourner à la boutique...

Les trois visages de la peur

Par rapport aux autres épisodes, Project Zero : la Prêtresse des Eaux Noires innove peu et reste très classique avec un gameplay toujours séparé en deux parties : la partie recherche et la partie photo. Dans la partie recherche, le joueur passera son temps à faire trottiner son héroïne (ou son héros) dans des couloirs à l'affût de la moindre apparition, prêt à farfouiller dans tous les coins pour ramasser le moindre objet, livre et document qui y sont disséminés. Il sera aidé par le "filament", le seul élément apparaissant de temps en temps sur l'image en s'éclairant en présence d'objets ou de fantômes et aussi par des petites flèches indiquant ou chercher exactement. Il pourra aussi utiliser le don des héroïnes qui leur permet de voir des traces du passé et pour parler plus simplement, de savoir dans quelle direction aller- ce qui est toujours très pratique.

Pour éviter que les phases de recherche ne tombent dans la routine,  les développeurs ont réutilisé le système apparu dans le numéro 4 et repris ensuite dans le wiimake du 2, qui transforme chaque collecte d'objet en un petit moment de suspens et d'angoisse. Pour faire simple, à chaque fois que l'on trouve un objet, il faut garder son doigt appuyer sur A pour que l'héroïne tente de le ramasser. Ainsi plus on appuie longtemps, plus la main de l'héroïne se rapproche de l'objet sachant que parfois une main fantomatique surgit et agrippe la malheureuse avec force. Une excellente idée qui transcende ce passage obligé des "Survival Horror" et permet de garder toujours les sens du joueur en alerte.

Les clichés de la peur

Evidemment, à tout moment, le joueur peut utiliser la caméra obscura pour passer en mode "photo". A ce moment-là, la vue bascule à la première personne ce qui permet de découvrir des secrets cachés dans le décor mais surtout d'anéantir les spectres en les mitraillant de photos.C'est la particularité de la licence Project Zero- pour ceux qui n'auraient toujours pas compris. Comme les personnages affrontent des fantômes, ils ne peuvent avoir aucune prise sur eux et le seule moyen de les neutraliser, c'est de les prendre en photo avec la caméra obscura. Dans le jeu, il y en a deux que se partagent les trois personnages mais à dire vrai, ça ne change pas grand-chose. Les trois personnages se jouent de la même façon,  mis à part quelques séquences bien précises et les deux "camera obscura' aussi. D'ailleurs le choix d'en imposer deux, ne s'explique pas vraiment si ce n'est par la logique de l'histoire mais grosso modo, ce sont les mêmes. La seule différence, c'est que la camera obscura  principale (celles des héroïnes qui sert le plus) peut être améliorée tandis que l'autre celle de Ren est utilisée (peu) telle quelle. La caméra obscura utilise différents films (à ramasser dans le décor) dont celui de base qui est infini (et peu efficace). Il y a aussi différents objectifs là encore à trouver dans le décor et à changer,  en fonction des spectres, certains en capacité de les ralentir, d'autres de les geler, etc... Chaque objectif peut-être boosté pour plus d'efficacité en utilisant les points reçus à chaque cliché sachant que certains aspects de la caméra obscura pourront aussi être améliorés comme sa puissance ou sa rapidité. Tout l'enjeu consiste ensuite à enclencher sa photo au bon moment afin de pouvoir déclencher une succession de clichés fatals sachant qu'en fonction des films et des améliorations, la caméra mettra plus ou moins de temps à se recharger avant de permettre un autre cliché et que donc on poeut se retrouver vulnérable pendant ce court laps de temps... Pour les habitués de la licence, il n'y a aura pas de soucis puisque c'est le principe de base développé depuis le premier épisode et que l'on retrouve à l'identique (jusque dans l'habillage sonore et graphique), la différence étant que désormais la camera obscura est matérialisé par le GamePad. 

Transformer le GamePad en camera obscura est une idée évidente qui permet au joueur de plonger littéralement au coeur du jeu et de ses environnements. C'est d'ailleurs assez fascinant puisque, à tout moment, on peut sortir l'appareil photo (en appuyant sur X) et grâce au gyroscope du GamePad scruter le moindre recoin du décor comme si on se trouvait à l'intérieur. Sur la base d'un gameplay asymétrique, dés qu'un fantôme apparaît sur l'écran de la télé, c'est sur l'écran du GamePad qu''il faut regarder pour réussir à le cibler et, grâce aux indications qui y apparaissent, l'anéantir.

En pratique, ça ne change pas grand chose si ce n'est qu'on se retrouve à gesticuler dans tous les sens en levant par exemple le GamePad au ciel pour capturer un fantôme qui se balade au plafond...  Si la détection de mouvement marche plutôt bien, il y a tout de même quelques ratés et il vaudra mieux parfois se contenter de bouger l'écran du GamePad avec le stick ou encore de cibler le fantôme avec une gâchette. Cependant, les choses pourront quand même se gâter lors d'attaques dans des endroits exigus ou d'attaques multiples avec quatre, cinq voire six fantômes en même temps chacun d'un côté. Des moments plus agaçants que flippants car partant dans tous les sens et entraînant parfois un game over (un des rares du jeu)  à cause de l'impossibilité de pouvoir prendre tous les fantômes en photo en même temps..Mais dans l'ensemble, l'utilisation du GamePad reste un plus très agréable et amusant même si on sent bien que les développeurs auraient pu encore aller plus loin en proposant d'autres utilisations.Il y a d'ailleurs un petit jeu avec les caméras de sécurité à un moment donné et aussi la carte qui s'affiche en permanence, hors mode photo (mais sans que l'on puisse l'annoter) sans parler du mode off-TV toujours bienvenu

Fantômes (presque) en fête

Evidemment, ce que l'on recherche dans un jeu (comme dans un film) d'horreur c'est la peur. Et de ce côté là, tout dépendra  de votre degré d'émotivité mais aussi de vos connaissances dans le genre. Cependant, d'une manière générale, les fantômes de Project Zero : la Prêtresse des Eaux Noires  font plutôt dans le cliché (avec jeu de mot) et leurs apparitions sont assez inégales. Les fantômes, toujours translucides, ressemblent tantôt à des zombies tantôt à des sorcières.Il y en a qui volent, d'autres qui boitent, d'autres encore qui courent. C'est un véritable fourre-tout sans grand cohérence dans lequel on trouve un peu de tout...On pense à Ring, à Poltergeist et même à Death Note ! Pour un peu, on ne serait presque pas étonné de voir passer Casper, le gentil fantôme ! Il parait évident que le jeu manque d'un vrai réalisateur, de quelqu'un ayant une vision et un vrai sens de la mise en scène. Le plus embêtant, c'est que le jeu ne peut s'empêcher de réutiliser les mêmes spectres encore et toujours, même ceux ayant servi de boss, laissant penser qu'ils sont interchangeables et qu'ils ne sont donc pas la matérialisation de l'esprit d'une personne, avec une histoire, un destin tragique et/ou une mort violente. On aurait aimé que certains lieux soient hantés par certains fantômes  et pas qu'ils apparaissent n'importe quand, n'importe où... Il n'y a rien de plus énervant que lorsque, après avoir anéanti un boss coriace, le jeu (au lieu de clore le chapitre) nous demande de rebrousser chemin et qu'au détour d'un couloir,  on retrouve le même boss (mais qui n'en est plus un) en deux ou trois exemplaires...

Histoire d'eaux

Il n'empêche que Project Zero : la Prêtresse des Eaux Noires distribue quelques jolies frayeurs et certaines séquences restent plutôt joliment mises en scène. On retiendra particulièrement les fantômes d'enfants jouant à cache cache autour de l'héroïne, les corps de dizaine de femmes aux yeux arrachés flottant dans une rivière, l'apparition démoniaque contre laquelle on ne peut rien faire, cette jeune fille qui se tranche la tête ou encore ce fou-furieux se précipitant en courant sur l'héroïne pour lui arracher les yeux !  On retiendra aussi les petites séquences furtives durant lesquels un fantôme, qui n'est jamais agressif, apparaît pendant quelques secondes et qui sont comme des tranches de vie parfois tragiques (une femme qui se pend) parfois flippantes (un enfant qui est juste planté dans un coin et qui vous regarde°.

Découpé (à la hache) en une douzaine de chapitres plus ou moins longs, le jeu n'est pas très difficile (sauf peut-être vers la fin, si mal préparé) d'autant plus qu'il n'est pas avare en potions et qu'il est aussi possible de faire des provisions entre chaque chapitre. Il est vrai aussi que le jeu est très (trop) dirigiste et que même les phases d'exploration sont sur des rails.Le jeu se terminera en une douzaine d'heures en mode normal sachant qu'un mode cauchemar se débloquera ensuite ainsi qu'une courte aventure sympathique en mode furtif sans parler des costumes de Zelda et de Samus qui permettront de refaire le jeu d'une façon décalée. A noter que Nintendo a eu la délicate  idée de proposer gratuitement le prologue et les deux premiers chapitres en téléchargement gratuit sur l'eShop pour que chacun puisse s'en faire une idée. 

 

 

 

 

 

7.5
Project Zero : la Prêtresse des Eaux Noires est un jeu qui ne cherche pas à bouleverser les codes et les mécanismes initiés depuis le premier épisode de la série ce qui d'un côté assure aux joueurs de se retrouver face à un vrai survival horror comme à la grande époque mais de l'autre lui donne un côté suranné voire dépassé. Pour autant malgré des problèmes de rythme et de style l'empêchant de se placer au-dessus de la mêlée, il saura satisfaire les fans du genre et les joueurs en quête de délicieux frissons d'autant plus que le GamePad se révèle parfait en camera obscura.

  • Plastiquement classieux
  • Ambiance envoûtante
  • Héroïnes magnifiques
  • Quelques belles séquences
  • Le système de collecte d'objets
  • Le GamePad parfait en camera obscura
  • Allers et retours fastidieux
  • Problème de rythme
  • Manque de personnalité
  • Du recyclage
  • Trop dirigiste
  • Quelques soucis de reconnaissance