Nintendo Switch

Jack Jeanne

Test Switch

Jack Jeanne

Par Miki-Daisuki - Le 09/06/2023 à 10:00

Sorti en 2021 au Japon, le visual novel Jack Jeanne se voit bénéficier d’une sortie occidentale ainsi qu’une traduction anglaise en ce mois de juin 2023. Notoirement connu pour sa saga d’idols masculine « Uta no prince sama », le studio Broccoli remet le couvert accompagné cette fois-ci du mangaka Sui Ishida (Tokyo Ghoul, Choujin X) au scénario et à la conception des personnages. Au sein d'un titre mêlant roman vidéoludique, jeu de rythme, simulation et otome, préparez-vous à plonger au coeur de l'univers impitoyable du théâtre. 

Note : Jack Jeanne est proposé uniquement en anglais.

L’Ecole des hommes

De ses yeux emplis d’une admiration sans borne, Kisa Tachibana assiste à la représentation de la troupe Tamasaka où se produit son frère ainé. Dans la salle bondée, le public est subjugué. Et pour cause, tous les jeunes acteurs qui le composent font partie de « Univeil Drama School », une prestigieuse école de théâtre qui forme les meilleurs talents de leur génération. Monter sur les planches à leur côté, la jeune femme en rêve depuis toujours. Problème : l’école n’accepte que les hommes, lesquels endossent autant les rôles masculins (les Jacks) que féminins (les Jeannes). Par un coup du destin, cependant, elle se voit proposer de l’intégrer à deux conditions : se faire passer pour un garçon et obtenir le rôle principal dans la pièce de fin d’année. Accompagnée de ses camarades de classes, Kisa devra redoubler d’efforts pour perfectionner son art et brûler les planches.

Comme tout bon visual novel qui se respecte, Jack Jeanne est un jeu très bavard où le scénario s’apprécie sur le temps long. Si l’on percevra des longueurs çà et là, surtout dans les premières heures, l’on ne pourra que saluer un rythme global plutôt bien équilibré qui insère son lot de tensions entrecoupée de scènes plus calmes. Dommage, cependant, que ces dernières aient été si accentuées par une surabondance de dialogues et soliloques sans grand intérêt qui ont tendance à rallonger inutilement des scènes de vies quotidiennes qui auraient pu s'en passer. Heureusement, ce ne sera que passager, le jeu ayant le don de relancer toujours très rapidement cet investissement qui s’effrite par un évènement ou certains personnages clé, à l’image des inquiétants élèves de la classe Amber. Ces derniers ne représentent d’ailleurs qu’une petite part des mystères distillés çà et là dans l’aventure, et qui ne nous seront accessibles qu’en passant un certain temps avec les personnages, mais nous aurons l’occasion d’y revenir un peu plus tard. Car le personnage central de cette aventure, c’est bien le théâtre. Et il est ici parfaitement exploité. En proposant comme toile de fond un univers aussi mystérieux, déroutant et passionnant, Jack Jeanne fait passer le joueur par toutes les émotions sans jamais l’y noyer. Drôle par moment, touchant voire crève-cœur dans d’autres, l’histoire que l’on nous conte est autant celle de comédiens passionnés que celles d’un monde où il faut être prêt à tous les sacrifices pour décrocher les étoiles de la gloire.

Un jour je serai la meilleure actrice

Au sein d’Univeil, les élèves se répartissent en quatre classes, chacune étant en compétition pour les cinq représentations qui composent l’année scolaire. Avant chaque date butoir, il faudra donc s’entrainer seul et/ou en groupe afin d’augmenter ses « paramètres » et ainsi fournir la meilleure prestation possible le jour de la représentation publique. C’est dans cet objectif régulier que le joueur alternera entre les grands deux axes de jeu : la simulation et le rythme. S’agissant du premier point, il s’agira d’organiser le planning de sa semaine en choisissant chaque jour parmi une liste la discipline que l’on souhaitera améliorer (voix, charisme, acting, agilité, études et condition physique). Le tout en veillant à surveiller régulièrement sa barre de santé pour ne pas s’épuiser. Le week-end, instant de repos, l’on pourra se balader au sein du campus ou à l’extérieur afin de passer du temps avec nos amis ou améliorer nos statistiques en assistant à des cours pratiques. Malheureusement, et malgré l’efficacité et la sympathie du concept, l’on se rend vite compte de son caractère illusoire. En effet, contrairement à ce que le jeu nous affirme, il est assez difficile de savoir si le niveau que l’on acquiert dans les différentes disciplines a un véritable impact sur le score final de notre présentation. On serait tenté de dire que non, la victoire nous ayant toujours été octroyée malgré des statistiques médiocres dans certaines compétences pourtant fondamentales sur scène. En réalité, cette course effrénée au level up servira surtout pour l’aspect relationnel du jeu, chaque niveau gagné permettant d’augmenter notre affinité avec un de nos camarades de classe.

Là où Jack Jeanne a souhaité sortir du côté contemplatif du visual novel où le joueur interagit peu en dehors du passage des dialogues, c’est avec ses phases empruntées aux jeux de rythme. Justifié par le fait que chaque pièce propose des parties chantées, les « song rhythm action » proposeront au joueur d’appuyer au bon moment sur les touches affiliées à des lignes de notes ; tandis que les «dance ryhtm action » pensés pour les phases dansées s’effectuerons par un appui sur les touches « L » ou « R » selon la direction empruntée par la ligne de note. Un ajout de gameplay très appréciable qui a pour bienfait de dynamiser les sessions de jeu, d’autant plus que l’on peut choisir son niveau de difficulté. On sera d’autant plus motivé à obtenir la meilleure note possible qu’il s’agit là des véritables phases décisives en terme de points gagnés lors des représentations.

Be my Jack/Jeanne

« Seul, on va plus vite ; ensemble, on va plus loin » est un adage qui sied bien à Jack Jeanne, dans la mesure où développer ses relations avec les autres sera aussi important que n’importe quel entrainement. En effet, chaque choix fait au sein du jeu aura des conséquences sur l’affection qu’un personnage nous porte. Plus celle-ci sera élevée, plus il sera possible d’en apprendre plus sur la personnalité de ses camarades, notamment via les « évènements affectifs » qui se débloqueront au fur et à mesure que la jauge d’affection se remplira. Certains reconnaitront là le champ lexical propre à l’otome game, et auraient raison de le souligner. Car si l’amour n’occupe pas une place prépondérante, il en constitue une part non négligeable arrivé aux dernières heures de jeu. Six « routes » seront possibles, lesquelles donneront lieu à autant de fins et de segments de scénario différents, attribuant ainsi au jeu une bonne rejouabilité pour celles et ceux qui souhaiteraient tous les découvrir. S’intégrant parfaitement à l’histoire et sans jamais trop en faire, c’est avec attendrissement que l’on suit ces différentes histoires d’amour dont certaines sont particulièrement touchantes.

L’occasion de rappeler qu’au-delà de l’histoire, ce sont ses personnages qui font de Jack Jeanne un titre fort, à commencer par son héroïne. Là où son rôle aurait pu s’arrêter à celui d’énième protagoniste effacée dont le rôle est moins de servir d’avatar au joueur que de mettre en avant des héros masculins bien plus élaborés, Kisa brille par sa passion débordante, son entrain, ses doutes et sa combativité sans faille. On prend véritablement plaisir à suivre son évolution tout au long de l’histoire, grâce à des dialogues, mais aussi des pensées entièrement doublées. Quant au casting masculin, c’est encore ici une belle surprise, à condition de passer suffisamment de temps sur le jeu pour dépasser l’impression de voir encore une fois la même galerie de bellâtres stéréotypés propre au genre à l'image de l’athlète, l’excentrique, le réservé, le ténébreux distant,... A force de les côtoyer, on se prend très vite d’affection pour ces six garçons à la vie pas toujours très réjouissante qui se battent pour réaliser leurs ambitions. Une recette, certes, pas très originale, mais qui fonctionne toujours très bien, surtout quand on en maîtrise aussi bien les codes.

Au théâtre ce soir

Le compte à rebours terminé, notre groupe présentera la pièce au public. L’occasion de voir « en vrai » ce pour quoi nous avons tant travaillé. Un sentiment qui s’explique par la passion si communicative que Jack Jeanne transmet. Que l’on soit familier du monde du théâtre ou pas, l’on est véritablement plongé et investi dans l’aventure grâce à ces  artistes acharnés qui vivent les personnages qu’ils incarnent sur scène. Comme eux, l’on vibrera aux applaudissements du public, appréhendera les accrocs qui surviendront. Côté son, on apprécie le doublage quasi-intégral réalisé par un casting japonais impeccable. La diversité et la douceur des musiques sont aussi un très bon point, d’autant plus que les développeurs nous ont gratifié de chansons inédites en lien avec le thème des pièces jouées.  

Enfin, difficile de parler des graphismes de Jack Jeanne sans mettre l’accent sur sa superbe esthétique. Du chara design aux costumes en passant par la mise en scène, le jeu est une ode à la beauté et aux festivals de couleurs. La grâce de ces personnages habités par leur rôle, féminins comme masculins, est tout bonnement hypnotisant, le tout sublimé par de splendides artworks où resplendit le style d’un Sui Ishida toujours aussi impressionnant.

8
Véritable plongée romancée au cœur du théâtre porté par des personnages attachants à la passion débordante, Jack Jeanne est un visual novel prenant et envoûtant sublimé par une esthétique de toute beauté et une musique soignée. Le scénario jouant sur le temps long, il faudra savoir passer outre ses lenteurs pour en apprécier pleinement toutes les facettes, mais il en vaut largement la chandelle.

  • Une histoire prenante...
  • Des personnages attachants
  • Une esthétique originale et grâcieuse
  • Une belle bande-son
  • ... alourdie par certaines longueurs
  • Des statistiques personnelles sans impact sur la prestation finale
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