Nintendo Switch

Hindsight 20/20 - Wrath of the Raakshasa

Test Switch

Hindsight 20/20 - Wrath of the Raakshasa

Par Miki-Daisuki - Le 02/12/2021 à 08:00

« Découvrez le pouvoir de la moralité dans chaque voyage où les choix et les actions ont des conséquences significatives ». La messe est dite pour cette production signée Triple-I Games, studio indépendant composé de quatre vétérans issus de Sucker Punch Studios (Infamous…) ou encore Bioware (Dragon Age, Mass Effect…). A travers quatre niveaux de difficulté (histoire, normal, difficile et expert), le jeu vous propose une aventure aux multiples embranchements. La vie ou la mort ? La clémence ou la vengeance ? De vos réponses à ces questions dépendra l’avenir de votre ville et des âmes qui la peuple ; de vos choix découlera le monde que vous choisirez de laisser derrière vous. Mènerez-vous votre peuple à la ruine ou le sauverez- vous ? Les conséquences de vos actions ne sont pas toujours celles que vous croyez.

Retour vers le passé

« Mon nom est Jehan. En ce jour, j’embarque dans un voyage pour réparer la plus grosse erreur de ma vie ». Telles sont les premières paroles que nous adresse notre héros, en ce jour funeste où tout bascula. Quelque part, la paisible ville de Champaner voit un jour ses murs ravagés par une terrible épidémie qui transforme ses victimes en monstres assoiffés de sang. Chassés de la civilisation des Hommes dont ils sont devenus les ennemis, ceux que l’on nomme désormais les « Raakshasa » trouvèrent en la personne de Sinah un leader. Celui-ci mit au point une arme destructrice, le « Trsishakti », qu’il utilisa contre le peuple de Champaner. Revenu sur ses terres peu de temps après, Jehan ne peut que constater que de sa ville, il ne reste plus que des ruines où s’amoncèlent les cadavres. Hanté par cet échec, Jehan pria les dieux de lui laisser une seconde chance. Ses paroles furent entendues. Propulsé quelques temps avant les tragiques événements qui causeront la perte de Champaner, vous incarnerez Jehan pour tenter de prévenir le massacre à venir.

L’histoire dans son ensemble est des plus classiques sans toutefois tomber dans les écueils du manichéisme en proposant des personnages dont on ne saurait prévoir avec certitude les réactions tant elles sont liées aux vôtres. Et si le récit « programmé » du jeu n'est guère surprenant dans l'ensemble, ce n’est pas toujours le cas des conséquences directes de vos actions, qui peuvent parfois remonter de plusieurs actes en arrière. Il ne vous reste alors plus qu’à constater, impuissant, l’étendue de ce que votre pitié ou votre orgueil a engendré. C'est précisément ce récit « provoqué» par vos choix qui va bénéficier de courtes cutscene relativement marquantes, le plus souvent par leur violence. Car il faut bien le dire, le monde d’Hindsight n’est pas aussi mignon que ne le laisse présager sa couverture, abordant des thèmes très durs comme le suicide ou l’extermination de masse. Ajoutons que les dialogues, peu nombreux et concis, sont toutefois largement suffisant pour que le joueur se sente véritablement investi par sa quête et concerné par la détresse des êtres qu’il rencontre.  

Faites la paix, pas la guerre (ou inversement)

Particularité de votre personnage principal : il ne possède qu’un seul bras et ne peut donc user que d’une seule arme à la fois. Avant chaque combat, le jeu vous propose ainsi de choisir entre deux approches correspondant à deux styles de combat bien distincts : « impitoyable » ou « miséricordieux ». Le premier mode s’accorde à faire passer la violence avant les pourparlers et vous arme d’une épée destructrice semant la mort sur son passage. Le second, son exact opposé, fait de vous un combattant altruiste usant d’une arme non-létale qui force l’ennemi à se rendre sans effusion de sang. Vous hésitez sur quelle approche adopter ? Le jeu vous laisse la possibilité de faire jouer ce côté dédoublement de personnalité à la « Split » même pendant les combats, permettant de varier le gameplay quand bon vous semble. Les touches d’actions étant similaires pour les deux, il est facile de switcher d’une arme à une autre et tester les différents combos nécessitant plusieurs attaques réussies d’affilées pour les déclencher.  

Par ailleurs, la palette d’action est suffisamment fournie pour ne pas rendre chaque combat trop répétitif même si cela entraîne une tendance à réitérer les mêmes techniques face à des types d’ennemis qui ne varient pas souvent leurs attaques. En parlant de technique, Hindsight vous invite à varier votre jeu par l’intermédiaire de diverses attaques spéciales utilisables si vos jauges vous le permettent, couplée à la possibilité de renvoyer les attaques ennemies en appuyant sur la gâchette gauche. Un petit arbre de compétence propre à chacun des modes étoffera votre panel de capacités spéciales au fur et à mesure que vous userez de votre esprit belliqueux ou pacifique. Les développeurs ont tout misé sur la fluidité des combats, créant un jeu d’action à l’efficacité redoutable. Capable de répondre instantanément aux moindres de vos commandes, le jeu permet des affrontements nerveux et rapides aidés par des opposants hargneux et très réactifs. 

Tuer ou ne pas tuer ? Telle est la question.

Préférer une approche par rapport à l’autre n’aura pas toujours l’effet escompté. Epargner certains personnages peut avoir davantage de conséquence que le tuer, mais il sera parfois préférable de les faire disparaître. Les choix que vous faites ont un réel impact sur la façon dont les habitants de Champaner vous perçoivent. Les dialogues, tout comme les comportements de vos compagnons seront fortement influencés selon que vous serez considéré comme un sauveur respectueux de l’honneur ou un tueur sanguinaire sans foi ni loi. Des vies que vous aurez prises ou épargnées découleront plusieurs fins différentes (dix si l’on en croit les développeurs), que vous pourrez découvrir en rejouant votre partie, ce que vous n’aurez peut-être pas envie de faire, cela dit.

En effet, la linéarité qui se dégage du titre peut rebuter les plus téméraires. Le gameplay s’articulant en général autour d’une trame bien précise : récupérer des clés disséminées dans différents espaces, chacune déverrouillant l’accès à une autre salle et ainsi de suite jusqu’au boss. Une redondance heureusement tempérée par quelques bonnes idées. En effet, le jeu vous propose, en parallèle des combats, de petites phases de puzzle à la difficulté variable, ainsi que des alternatives dans vos recherches de clés en vous demandant par exemple d'éviter des obstacles mouvants pour les récupérer. Trop anecdotiques malheureusement, ces initiatives pourtant intéressantes sont insuffisantes pour justifier de nombreuses relances de parties.

Un véritable RPG ?

Voilà peut-être la plus épineuse question de ce test. Hindsight fleurte tout au long de son histoire avec différents genres du jeu vidéo, sans tout à fait et définitivement se positionner. Si les quêtes de PNJ, la jauge de magie (ici appelée « shakti »), ou plus globalement la répercussion des choix du joueur sur l’univers rappelle bien le RPG, il n’en possède aucune autre caractéristique. Prenez pour exemple l’absence totale de point d’expériences, et donc de niveau, ou encore de l’impossibilité de personnaliser son personnage (pas d’équipements, de compétences, absence d’inventaire etc.). Quant au déroulement des combats, il rappelle davantage le beat-them-up que le RPG : des vagues d'ennemis qui bloquent la sortie jusqu'à ce que tous soient vaincus par une flopée de combos en puissance. Il va sans dire que la remarque n’aurait pas eu lieu d’être si le jeu s'était contenté de supprimer certains aspects inhérents au genre pour des raisons pratiques, mais il est tout de même compliqué de créer un «  Action RPG » en enlevant presque tout ce qui en fait la substance.

Destination : ailleurs qu’à Champaner

Le monde est au bord de la destruction et les couleurs ternes et sombres qui enveloppent vos pas vous le font bien savoir. Un choix judicieux lorsque l’on pense à ce qu’il va se produire si la mission de Jehan échoue. Accompagné d’un fond sonore bien choisi qui sait se faire pesant dans les moments les plus dramatiques, il apporte une vraie cohérence globale au titre et un vrai plus à chaque scène.

Hindsight propose un monde tout en 3D avec une caméra 360 degrés qui aurait laissé penser à un petit côté exploration en réalité totalement absent du titre. Ajoutons que si cette même caméra trouve du sens pendant les phases d’action, l’intérêt est discutable, voire punitif pour un jeu dont certaines textures notamment en extérieur ont un arrière-gout d’inachevés (les arbres ou certains bâtiments par exemple). Les intérieurs, aux couleurs plus vives et aux lignes plus lisses, sont davantage réussis et respirent paradoxalement plus la vie qu’à Champaner. Censé être encore prospère, le bourg a des airs de ville fantôme avec ses rues presque vides où les PNJ errent sans but en attendant qu’une âme charitable vienne leur demander ce qu’ils ont fait de leur journée. Le joueur qui ne tient pas à devenir dépressif préférera donc ne pas s’attarder dans ce hub central, où il n’y a de toute façon rien à faire, pour se précipiter vers la prochaine quête au pas de course. 

Du reste, le level-design des premiers instants n’apporte pas son lot d’originalité contrairement aux actes 3 et 4 largement plus créatifs. Gibsonia, l’antre des Raakshasa, est un lieu sordide où règnent les ténèbres et la ruine. On longe des paysages désolés, plongé dans une obscurité permanente au-dessus d’un précipice qui ne semble pas avoir de fin. C’est à cet instant que l’on saisit réellement qui sont ces ennemis que l’on pourchasse depuis le début. Car c’est finalement sur ses personnages que le style graphique de Hindsight se révèle vraiment. Ne vous fiez pas à leur apparence légèrement cubique, les visages savent afficher des émotions perceptibles au premier coup d’œil. On note un soin tout particulier au personnage de Jehan, son masque dissimulant des émotions qui passent alors par la parole et les actes, nos actes. Les boss, en parallèle, bénéficient eux aussi d’une belle implication visuelle tout comme les ennemis, particulièrement lors des derniers chapitres.


 

7.5
Qu’il s’agisse ou pas d’un véritable A-RPG, Hindsight 20/20 - Wrath of the Raakshasa est un jeu d’action abouti qui en possède toutes les qualités. Avec son gameplay efficace, sa fluidité presque parfaite et son univers intéressant et maîtrisé, le jeu de Triple-I games est dans l’ensemble une franche réussite. Le système de moralité, pensé pour être partie intégrante du voyage, a su aller au-delà du classique « question/réponse » pour donner au joueur la possibilité d’être le maître de son propre destin, mais pas celui du cours des événements, qui par essence échappent à l’emprise de tous, même des héros. Malheureusement, la réussite technique se paie sur le plan visuel qui aurait mérité une meilleure cohésion d’ensemble. Du reste, les amateurs de fins tragiques sauront apprécier les retournements de situation finaux dont ils sont, souvent malgré eux, les instigateurs.

  • Les choix moraux qui ont de vraies répercussions sur l'univers
  • Deux approches très différentes des combats
  • Une excellente maniabilité
  • Une palette d'action complète
  • Des ennemis très réactifs
  • Un hub central inutile
  • Une durée de vie courte (moins de 8h)
  • Des graphismes inégaux
Pas d'images pour ce test.