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Crowns and Pawns: Kingdom of Deceit

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Crowns and Pawns: Kingdom of Deceit

Par Miki-Daisuki - Le 14/10/2023 à 20:00

Développé par l’équipe Tag of Joy, studio lituanien indépendant, Crowns & Pawns se veut à la fois héritier de l’indémodable point’n click qu’une proposition moderne du genre. Chaussez vos meilleurs baskets et suivez Milda sur les traces d’un secret de famille bien gardé. Peut-être un peu trop ?  

L’héritage du grand-père toujours tu refuseras   

Photographe fauchée mais amie dévouée, Milda voit son paisible quotidien chamboulé par la réception d’une missive inattendue : la voilà devenue chanceuse héritière d’une maison en Lituanie. Mais une fois sur place, la jeune femme découvre que ce grand-père qu’elle ne connaissait que vaguement cachait de nombreux secrets. Bientôt menacée par de mystérieux individus s’intéressant de près à un trésor visiblement lié à sa famille, Milda épaulée par son ami Joris, part exploser diverses villes d’Europe pour tenter de percer le mystère de la couronne de Vytautas qui posséderait, dit-on, des pouvoirs surnaturels.

Partant d’un postulat plutôt sérieux, Crowns and Pawns s’avère beaucoup plus loufoque qu’il n’y parait. N’hésitant pas à faire parfois dans l’absurde, le jeu fourmille de petits moments délicieusement drôles notamment grâce sa formidable héroïne. Extravagante, généreuse, et aussi drôle qu’incisive, Milda est une jeune femme qu’on adore suivre dans ses délires et dans ses dialogues totalement perchés. Une présence telle qu’elle en éclipse totalement les autres personnages du jeu. Et le scénario aussi. Ce qui est un poil plus problématique.  

Avec un pitch de départ plutôt alléchant, promettant courses-poursuites et mystères d’une ère oubliée, le jeu fourni finalement une histoire plutôt sympathique, mais bien loin de ses ambitions affichées de film d’action. L’unique scène de ce genre, et qui est d’ailleurs sur toutes les affiches de promotion du titre, ne représentera que deux minutes sur nos quelques six heures de jeu global. De la même façon, l’aura de mystère qui entoure nos fameux artefacts d’un temps ancien s’étiole au fil du temps, la faute à un scénario qui souffre de nombreux problèmes de rythme. En partie expliqué par les spécificités du gameplay, sur lequel nous reviendront, cette lenteur omniprésente malgré une durée de vie objectivement modeste a pour origine une distillation des informations très mal répartie. Après deux premières heures de jeu captivant, le scénario se trainera ensuite en longueur pour finalement totalement s’effondrer à la fin. Abrupte voire totalement expédiée, celle-ci n’apportera d’ailleurs presque aucune réponse aux questions laissées en suspens, à commencer par celle qui avait justifié notre aventure au départ: où est passé le père de Milda ?

Dis, Joris, je fais quoi, maintenant ?

S’agissant du gameplay, il correspond à la formule classique du point’n click. Il s’agira donc de récolter dans les différents tableaux du jeu divers éléments que l’on pourra ensuite utiliser de différentes manières pour résoudre les énigmes environnantes ou débloquer des situations qui nous empêche d’avancer. Comme bien souvent avec le genre, le passage de la souris d’ordinateur, support d’origine, au profit des boutons nécessite une bonne dose de patience. Les éléments avec lesquels interagir  étant souvent très proches les uns des autres, il faudra soit faire preuve d’une précision exemplaire pour diriger Milda pile au bon endroit ; soit abandonner l’idée de se déplacer soi-même au profit d’une sélection au stick directionnel. Une solution de rapidité qui finira de toute façon par s’imposer vu la lenteur de déplacement de notre personnage.

Si les premières heures de jeu sont de bon augure pour la suite, l’on se rend vite compte que certains éléments de gameplay vont vite trouver leur limite, à commencer par les énigmes ponctuant notre avancée. Qu’il s’agisse de trouver un code, un nom, un objet, ou tout simplement résoudre une situation qui nous bloque le passage, tout devient au fur et à mesure de notre avancée de plus en plus alambiqué et surtout difficile à suivre. Et pour cause : le jeu ne communique pas –ou trop peu- avec ses joueurs, l’obligeant à avoir recours au hasard. Si une discussion avec votre binôme peut parfois vous renseigner sur votre but actuel, la plupart du temps, on ne nous donne aucune indication et on avance à l’aveuglette en essayant de déclencher par tous les moyens quelque chose qui nous fasse enfin avancer. Résultat : on enclenche les événements dans le désordre, ce qui nous met dans des situations improbables comme dénicher  un objet-clé d’abord et découvrir le dialogue nous apprenant son existence ensuite.  

Une sensation de lourdeur aggravée par un autre élément phare de gameplay : l’inventaire. Celui-ci, constamment surchargé par de nouveaux items, va bientôt s’apparenter à un véritable vide-grenier portatif avec des objets qui vont parfois moisir dans nos poches pendant des heures avant de finalement trouver leur utilité. Et même une fois cette finalité atteinte, il n’est pas sûr qu’il disparaisse de l’inventaire pour autant. 

Pêle-mêle, pourtant, les développeurs ont cherché à varier le plus possible la manière dont les énigmes peuvent être résolues. Téléphoner directement à un personnage, fusionner des notes ou encore changer de tenue pourront alors s’avérer être des outils précieux pour débloquer la situation. Malheureusement, leur rareté et leur fugacité seront telles qu’on ne pourra s’empêcher d’y voir un certain effet catalogue en lieu et place d’une véritable proposition de gameplay plus audacieux.   

Escale en Europe

Le moins que l’on puisse dire, c’est que Crowns and Pawns aime nous faire voyager. De Biélorussie jusqu’à l’Italie en passant bien sûr par la Lituanie, c’est réel plaisir de suivre les pérégrinations de Milda à travers ces différents paysages sublimés par une direction artistique aux petits oignons. Chaque tableau a une histoire à raconter et sa propre ambiance pour l’habiter. Des extérieurs aux intérieurs, tout est coloré, vif, lumineux, voire fantastique pour ce qui concerne le dernier segment du récit. Quant à l’ambiance musicale, on regrettera sa trop grande discrétion et la paradoxale surexposition d’une seule et unique musique. Les doublages anglais sont, quant à eux, très réussis de même que les sous-titres français, fluides et de très bonnes qualités.   

5.5
Difficile de ne pas être déçu par Crows and Pawns, qui avait sur le papier tout pour proposer ce que le point’n click sait faire de mieux, à commencer par son héroïne attachante, ses jolis décors inspirés et ses énigmes alambiquées. Mais passé deux premières heures de jeu pleinement convaincantes, les promesses du titre se dilapident pour finalement proposer une histoire sympathique, mais au goût de précipitation, soutenu par une mécanique de jeu efficace, mais aux idées mal exploitées qui alourdissent l’expérience. Laissé pour compte par un jeu qui ne communique jamais avec lui, le joueur aura tendance à faire davantage fonctionner le hasard que la logique, le conduisant à une résolution anarchique des énigmes et un déroulé des évènements qui le sera tout autant.

  • Une héroïne du tonnerre
  • Un humour qui fait mouche
  • Une belle direction artistique dépaysante
  • Une histoire au rythme irrégulier avec une fin des plus abruptes
  • Une mécanique de jeu lourdingue
  • Une faible durée de vie
  • Une absence totale de cohérence dans l'enchainement des énigmes...
  • ...cause de blocages permanents et frustrants
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