Il y a des histoires qui ont une fin. Et puis d'autres, qui disparaissent, tel un murmure, une légende oubliée, qui au fil des années, fini par être effacée. Le jeu vidéo regorge de saga qui se sont terminées sur un final magistral mais aussi d'histoires sans conclusion. C'est en 2010 que l'histoire de la saga Zero Escape a débuté, sur un bateau en train de couler, avec Nine Hours, Nine Persons, Nine Doors. Une histoire qui a su captiver les joueurs qui s'y étaient risqués et qui marqua le début d'une grande saga, pourtant assez méconnue. Deux ans plus tard sortait Virtue's Last Reward, qui s'acheva sur un final puissant, faisant monter la sauce concernant un chapitre 3, ultime conclusion de cette série. Malheureusement, les fans du jeu apprirent avec regret que cette conclusion n'arriverait pas, la faute à des ventes trop faibles au Japon. Alors que tout espoir semblait perdu, les nombreuses demandes de fans ont relancé le projet. Et c'est presque 4 ans après la sortie de Virtue's Last Reward que sort enfin Zero Time Dilemma. Nouvelle direction artistique, un épisode promis plus sanglant et surtout des réponses à toutes les questions. Après un accouchement dans la douleur, cette conclusion à la série est-elle à la hauteur ? Réponse dans cette timeline, dans ce test.
Mors certa, hora incerta
Il est d'une grande difficulté d'aborder l'introduction d'un jeu scénarisé, en particulier quand il s'agit d'une suite, afin d'expliquer le point de départ du jeu, tout en évitant les spoilers. Le jeu commence sur une séquence dans laquelle on retrouve un groupe de neuf personnes, chacune répartie par groupe de trois dans une cellule et qui sont ensuite accueilli par une personnes de taille assez imposante qui se présente sous le nom de Zero II. Cet étrange personnage interpelle alors l'un des protagoniste, Carlos, lui proposant un petit jeu de pile ou face. Dans le cas où ce dernier gagnerait, alors le groupe serait libéré. Dans le cas contraire, ils devraient alors tous rester les prisonniers de leur nouvel hôte qui compte bien faire participer ces derniers à un petit jeu macabre. Le Decision Game, car c'est avec cette scène introductive que Zero Time Dilemma est mis à l'honneur. Exit le Nonary Game, il s'agit cette fois-ci d'un jeu mettant l'accent sur les décisions que devront prendre les protagonistes, qui auront pour conséquence la vie ou la mort d'un des trios de personnages. En effet, afin de pouvoir échapper à cette horreur, nos héros devront récolter six « X-pass », permettant d'ouvrir la porte de sortie de l'endroit où ils sont séquestrés. Petit twist cependant, chacun de ces « X-pass » ne sera délivré qu'à la mort d'un des participants. Par conséquent, cela signifie que pour ouvrir la porte, six personnes devront mourir. Zero Time Dilemma est un jeu qui prend tout d'abord son temps pour mettre en place son intrigue. Si au départ, les choses semblent confuses et même plates, le jeu prend alors une tournure excitante et l'on suit le tout avec passion jusqu'au dénouement. L'intrigue sait tenir le joueur accroché à son siège, tout en faisant battre son cœur à 88 miles par heure. Concernant les protagonistes, il faut savoir que sur les neufs protagonistes, quatre sont de petits nouveaux. Si le groupe est effectivement intéressant, il faut tout de même reconnaître qu'ils sont moins intéressants que les personnages des deux précédants opus. Pour autant, l'alchimie entre chacun des personnages qui composent chacun des trios donnent des situations vraiment passionnantes et parfois même renversantes. C'est un peu une sorte de relation bipolaire où parfois, ces derniers partageront des instants de tendresse et de franche camaraderie... et parfois, ce sont des situations explosives et sanglantes qui naîtront de ces relations. Le jeu nage avec brio avec ces changements d'atmosphère, prenant souvent le joueur au dépourvu, notamment lorsqu'il assiste à une véritable entraide pour sortir d'un piège et qui se soldera pourtant par un bain de sang juste après. Pour autant, tout n'est pas parfait dans ce huit clos, aux allures de film d'horreur mixé avec de la SF, car le jeu souffre parfois de problème d'écriture, tel un Picasso tâché d'une empreinte chocolatée, laissée par un touriste maladroit. Bien entendu, bien loin de constituer un dommage irrémédiable, au pire une petite cicatrice, certains éléments de scénario sont soit passés à la trappe, soit tirés par les cheveux ou tout simplement loin d'être nécessaire. Difficile en effet de tenir une écriture parfaite sur trois épisodes et en dépit de cela, Zero Time Dilemma constitue une conclusion, à mon sens, qui se pose comme la plus satisfaisante mais aussi comme la plus touchante avec le recul. Certaines personnes ont certes grincé des dents, à raison sur certains éléments, mais beaucoup sont passé à côté du message, qui pourtant traînait, à raisons de quelques anecdotes, disséminées entre Virtue's Last Reward et Zero Time Dilemma. Une conclusion qui s'est faite avec difficultés et des coupes budgétaires et l'on ressent que Kotaro Uchikoshi, le scénariste et directeur de la trilogie voulait en dire plus ou dire autre chose, mais que faute de temps, n'a pu en avoir les moyens. Mais qui pour autant délivre une merveilleuse conclusion à cette série. Sans rancunes.
Seek a way out
Venons-en à la partie gameplay, car sous ses allures de film interactif, Zero Time Dilemma, comme la série Zero Escape, parfois qualifiée à tort de visual novel, se rapproche beaucoup plus d'un point and click avec une partie scénario assez présente, mais qui pour autant conserve son lot de puzzles. Ainsi, tel une tradition établie depuis 999, Zero Time Dilemma opère en deux temps : Les « Escape Room », dans lesquels le joueur devra résoudre de nombreux puzzles disséminés afin de pouvoir sortir d'une pièce dans lequel un groupe était piégé et les « Cinematics », qui feront progresser l'histoire et qui serviront de support au Decision Game. Les « Escape Room » sont les plus classiques, puisqu'elles reprennent cette mécanique déjà vu dans chacun des opus précédent de la série, sans les bouleverser. Mais était-ce nécessaire ? Au final, ce qui fera le sel de ces Escape Room, ce sont ces puzzles tous aussi tordus les uns que les autres et qui instaurent un joli moment de pression entre chaque bout de scénario. On retrouve donc avec grand plaisir toutes ces pièces thématiques bourrées d'énigmes à la fois bien trouvée, sans pour autant freiner la progression par une difficulté aberrante, le tout soutenu, comme à l'accoutumé, par un thème instaurant un climat pesant et tendu. C'est pourtant l'autre partie, les « Cinematics » qui subissent le gros changement de la série, en terme de rythme et de présentation. Tout d'abord et c'est la première chose qui saute aux yeux... la mise en scène. Exit l'aspect visual novel avec des portraits animés et des boites bourrées de texte, cette fois-ci, la trame est animés par des cinématiques, avec des personnages modélisés en 3D. Si la modélisation en elle-même n'a pas à rougir, il faut tout de même reconnaître que les animations sont assez maladroites et plutôt robotiques... cependant, on fini par s'y habituer, même si quelques scènes d'actions viennent à nous rappeler les limites budgétaires du titre. Pour autant, Uchikoshi oblige, ceci trouve une justification plutôt intéressante, que l'on ne dévoilera pas pour des raisons évidentes. Concernant la progression scénaristique, le flowchart, permettant de revenir à d'autres embranchement scénaristique fait son grand retour, avec un léger twist : Le « fragment system ». En d'autres mots, les scènes sont disponibles par fragment, ce qui a pour conséquence de brouiller le flowcharts. Aussi, pour des raisons scénaristiques, le but ici est de brouiller la place de chaque événements sur la chronologie du jeu jusqu'aux nombreux dénouements. Un système qui peut porter à confusion au départ mais qui permets surtout de switcher entre chaque groupe de survivant pour suivre les événements d'un point de vue différent. Une bonne idée donc, qui trouvera en plus sa justification scénaristique de manière plus que satisfaisante. Ce système de jeu permets surtout de mettre en valeur le nouveau gimmick du jeu auquel nos protagonistes prennent part contre leur gré : Le Decision Game. Durant les phases cinématiques, vous serez amené à prendre des décisions qui aboutiront à une conclusion différente, menant donc à un embranchement différent. La petite nouveauté cependant, c'est que certaines décisions ont aussi un facteur chance. Le hasard viendra donc s'en mêler et le résultat variera en rejouant la scène... et ce de manière totalement aléatoire. Une bonne idée mais qui peut parfois titiller les nerfs des joueurs un poil impatient, lorsque le même résultat tombe trois fois d'affilés. Mais là encore, il s'agit d'une idée qui n'est pas introduite ici pour faire joli mais qui sert à nouveau les ambitions scénaristique du jeu et ce avec brio.
Le temps, c'est de l'argent
Fatalement, il nous faut aborder la partie technique et sonore. En ce qui concerne la première, le bilan est un poil mitigé. Il faut savoir que par souci d'intégrité, le jeu a été testé la première fois dans sa mouture 3DS puis dans sa version PC. Si les deux versions souffrent concernant la partie graphismes de ces animations d'un autre temps, la version 3DS, elle, souffre aussi de son aspect technique. Si les modèles 3D sont plus qu'honnêtes et même assez réussis, la version 3DS est dépourvue de l'aspect cell-shading, rendant les personnages assez ternes et surtout donnant à l'éclairage un aspect jaunâtre qui n'est pas des plus agréable. Plus encore, le framerate est parfois en souffrance, ce qui est plutôt dommage quand cela s'accumule à des animations maladroites. Par ailleurs, il faut noter l'absence totale d'effet 3D sur la version 3DS... ce qui est réellement dommage, puisque si la version PC ne supporte pas cette feature de manière officielle, après l'utilisation du logiciel adéquate, on se rend compte à quel point l'effet est réellement travaillé et que le passage aux cinématiques en bénéficient réellement, tandis que plusieurs salles de puzzles en deviennent bien plus immersives. Concernant la direction artistique, si l'on peut regretter le départ de Kinu Nishimura, artiste sur les deux opus précédente, sa remplaçante est tout aussi talentueuse et a fourni un travail de haute volée pour donner à ce troisième opus un design plutôt sombre et mature. Concernant la partie sonore... point de déception sur cet aspect. Qu'il s'agisse des quelques compositions qui signent un retour magnifique dans de magnifiques remix mais aussi des nouveaux thèmes introduit dans cet opus, le jeu est un réel plaisir auditif... et agrémentent chacun des moments du jeu d'un côté très immersif. Qu'il s'agisse des moments de tensions, des drames ou des moments d'action, tout s’emboîte à la perfection. Si les coupes budgétaires se sont faite sur la partie technique, la réalisation sonore demeure de haut vol. Un régal.